Aller au contenu principal
Le Pédicure

Le Pédicure

Femme à sa toilette

Femme à sa toilette

Le Pédicure

Le Pédicure

Auteur : DEGAS Edgar

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : 1873

H. : 61,5 cm

L. : 46,5 cm

Peinture à l'huile et à l'essence sur papier marouflé sur toile

Domaine : Peintures

© GrandPalaisRmn (musée d'Orsay) / Tony Querrec

Lien vers l'image

RF 1986 - 18-532835

L'hygiène : un nouveau soin du corps

Date de publication : Avril 2011

Auteur : Alexandre SUMPF

Pratiques d’hygiène et espace privé

Au cours du XIXe siècle, les pratiques d’hygiène augmentent en fréquence, en régularité et en diversité. Les femmes sont les premières à renouveler leur approche de la « toilette », à laquelle s’associent désormais d’autres « soins de beauté ». Avec Le Pédicure, réalisé en 1873, Edgar Degas (1834-1917) donne à voir cette actualité. En véritable « peintre de la vie moderne », il représente une situation assez originale, nous renseignant à cette occasion sur le fait que les « soins du corps » exercés par des spécialistes sont de plus en plus répandus, et de moins en moins réservés aux femmes les plus aisées.

Autant de soins qui continuent de se dérouler très largement dans l’espace privé du domicile, comme le confirme indirectement la toile Femme à sa toilette, exécutée par Ernest Laurent (1859-1929) en 1908.

Le soin du corps

Le Pédicure donne à voir une scène assez inédite, et en tout cas très originale, dans l’histoire picturale. Dans un petit salon aux murs verts et au sol rouge, un homme vêtu de noir taille les ongles des pieds d’une jeune femme. Degas choisit de remplir presque totalement l’espace (en plus des personnages, le canapé, la commode, la bassine et la chaise occupent toute la pièce), plaçant au centre de sa composition le pied dénudé, objet des soins du pédicure et véritable « paroxysme » pictural : cette partie de la toile ressort magnifiquement grâce au travail sur les tons pâles (tissus et chairs), qui concentre l’attention sur l’opération en cours. Enveloppé dans un tissu semblable à celui couvrant la chaise, le personnage féminin qui doit être partiellement dévêtu (sa robe repose à sa droite) s’abandonne, les yeux clos ou mi-clos, à ce moment particulier.

Dans Femme à sa toilette, Ernest Laurent figure une femme assise torse nu devant sa coiffeuse, dans ce qui doit être sa chambre à coucher. Les ustensiles posés sur le meuble annoncent le miroir dans lequel elle se regarde. Occupée à attacher ses cheveux, elle semble sortir du lit ou encore du bain. L’influence impressionniste, et plus particulièrement celle de Seurat, est évidente ; elle confère à l’ensemble un flou un peu mélancolique, presque embué, ainsi qu’une grande douceur et un certain érotisme diffus.

L’hygiène et la beauté

Avec Le Pédicure, Edgar Degas explore son thème privilégié : la beauté des femmes de son temps. Comme souvent, il choisit de placer son sujet dans une situation à la fois « contemporaine » et intime. Donnant à voir son modèle dans une situation d’abandon (voir les yeux mi-clos de la jeune fille), le peintre suggère que la séance de pédicure est un temps de repos et de détente, empreint d’une certaine grâce. Loin d’être une scène disgracieuse et gênante pour le spectateur qui l’observe indiscrètement, ce soin du corps se révèle beau et précieux, propre (le blanc des draps) et précis (le travail minutieux du spécialiste). À la différence du traitement dont elle fait l’objet dans le cadre de sa promotion officielle, l’hygiène ainsi conçue et représentée n’apparaît plus comme l’obscur complément de froides pratiques de santé imposées, et le devoir nécessaire de se préserver de maladies inesthétiques.

Si le sujet de Femme à sa toilette est moins « original » et moins « neuf », on note la même intention chez Ernest Laurent que chez Edgar Degas. Jouant à merveille du « flou » impliqué par sa technique picturale (plus moderne quant à elle), il reprend et renouvelle une tradition qui présente la toilette féminine comme un instant de solitude spéculaire, où l’intime et le secret (le lieu confiné, caché, anormalement offert aux regards des spectateurs) se teintent d’érotisme, de mystère et de beauté.

Alain CORBIN [dir.], Histoire du corps, vol. II « De la Révolution à la Grande Guerre », Paris, Le Seuil, coll. « L’Univers historique », 2005.

Marina ROBBIANI, Degas, Paris, Celiv, 1988.

Georges VIGARELLO, Histoire des pratiques de santé. Le sain et le malsain depuis le Moyen Âge, Paris, Le Seuil, coll. « Points Histoire », 1999.

Georges VIGARELLO, Histoire de la beauté. Le corps et l’art d’embellir de la Renaissance à nos jours, Paris, Le Seuil, rééd. coll. « Points », 2004, rééd.2007.

Alexandre SUMPF, « L'hygiène : un nouveau soin du corps », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/hygiene-nouveau-soin-corps

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

L'atelier de couture

L'atelier de couture

C’est sous le règne de l’impératrice Eugénie que naît le concept de haute couture, avec un nouveau protagoniste : le grand couturier. Jusqu’alors,…
L'atelier de couture
L'atelier de couture
Les débuts de la Terreur

Les débuts de la Terreur

L’historiographie révolutionnaire, très développée au XIXe siècle bien qu’elle prît souvent la forme des opinions professées par ses…

Les débuts de la Terreur
Les débuts de la Terreur
Les Dames Goldsmith au bois de Boulogne en 1897 sur une voiturette Peugeot

Les Dames Goldsmith au bois de Boulogne en 1897 sur une voiturette Peugeot

Au XVIIIe siècle déjà, il était du dernier chic pour une élégante de conduire elle-même un léger phaéton ou un cabriolet attelé d’un ou…

Le scandale de la réalité

Le scandale de la réalité

En 1863, Victorine Meurent, modèle préféré de Manet dans les années 1860, pose pour ce nu jugé à l’époque comme le plus scandaleux des nus…

Le thème de l’entremetteuse

Le thème de l’entremetteuse

L’influence de la Rome baroque

Pietro Paolini est un peintre italien baroque du XVIIe siècle. Né à Lucques en Toscane, en 1603, il a…

La Rose Blanche

La Rose Blanche

La foi au-dessus de la loi

Lorsque Jürgen Wittenstein photographie ses amis Hans Scholl (24 ans), Sophie Scholl (21 ans) et Christoph Probst (23…

Les « tondues » de la Libération

Les « tondues » de la Libération

Une démonstration publique

On estime que 20 000 à 40 000 femmes accusées à tort ou à raison de collaboration avec l’occupant allemand auraient…

Greuze et la peinture morale

Greuze et la peinture morale

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les excès de la société aristocratique et libertine incitent le gouvernement ainsi que…

La France coloniale et les zoos humains

La France coloniale et les zoos humains

L’attrait pour les zoos humains

En 1906, la France possède le deuxième empire colonial au monde après le Royaume-Uni. Ces conquêtes ont permis de…

La comtesse de La Fayette

La comtesse de La Fayette

Le portrait perdu d’une précieuse

Fils du peintre flamand Ferdinand Elle, célèbre portraitiste naturalisé sous le règne de Louis XIII, Louis Elle…