
Affiche de recrutement de l'armée de l'armistice - GÉNIE.

Affiche de recrutement de l'armée de l'armistice - L'ARTILLERIE.

Affiche de recrutement de l'armée de l'armistice - LA CAVALERIE.

Affiche de recrutement de l'armée de l'armistice - GÉNIE.
Lieu de conservation : musée de l’Armée (Paris)
site web
Date de création : 1941
Date représentée : 1941
H. : 78
L. : 59
Affiche papier (impression en quadrichromie)
© Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN - Grand Palais / Laurent Sully-Jaulmes
08-528297 / 20657.1
L’armée de Vichy recrute
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Jean-François BRUN
L’« armée nouvelle » de Vichy
Aux termes de l’article 4 de la convention d’armistice signée avec l’Allemagne le 22 juin 1940, l’armée française est limitée aux « troupes nécessaires au maintien de l’ordre intérieur ». Concrètement, cela représente en métropole 100 000 hommes tenant garnison dans la zone non occupée. Dépourvue d’unités motorisées ou blindées, d’artillerie lourde et d’armes antichars, cette force militaire est incapable de participer à un conflit moderne. De juin à novembre 1940, Vichy démobilise l’essentiel des troupes qui n’ont pas été capturées en 1940 puis, en novembre, l’armée d’armistice est mise sur pied.
Hormis les officiers et sous-officiers, qui sont des militaires d’active, elle ne doit être constituée que d’engagés volontaires. Le service militaire, suspendu, est remplacé par une période de huit mois dans les « Chantiers de jeunesse ». Or, le flux des engagements s’avérant insuffisant, Vichy maintient sous les drapeaux une partie des conscrits des classes 1938 et 1939, précédemment incorporés, et lance parallèlement une grande campagne de recrutement. Tirées d’un corpus qui en compte une dizaine, ces trois affiches ont été éditées en 1941 par le ministère-secrétariat d’État à la Guerre et réalisées à Clermont-Ferrand (grande ville la plus proche de Vichy, siège du gouvernement de l’État français) par les soins de l’imprimerie Mont-Louis, sous l’égide de l’agence Sogno.
Une volonté d’afficher la modernité
Les trois affiches présentées ici concernent le génie, l’artillerie et la cavalerie. Elles sont organisées de façon analogue : un ou plusieurs soldats en tenue de campagne, croqués dans une attitude représentative de leur spécialité, se détachent sur un fond très sobre. L’accent est mis sur la technicité, excluant toute référence à l’exotisme qui caractérise l’affiche des unités coloniales. Le slogan « engagez-vous, rengagez-vous » signale le désir de recruter des soldats formés et expérimentés. Afin de ne pas affaiblir le message, les conditions d’âge et d’état civil, les avantages financiers ainsi que les formalités à accomplir ne sont pas spécifiés sur l’affiche, mais regroupés dans un dépliant à part et largement diffusé. Surtout, la volonté de rupture d’avec l’armée vaincue de 1940 se marque de façon explicite. Les soldats sont vêtus de l’uniforme de campagne défini en 1941 (pantalon dit « de golf », casque métallique à bourrelet de cuir initialement réservé aux troupes motorisées, brodequins et jambières de cuir). Il importe de donner la meilleure image possible de cette « armée nouvelle », expression utilisée dans deux affiches. Celle du génie, qui vise à recruter des « techniciens », préfère recourir à la formule « arme des spécialistes ».
Chacune des trois affiches insiste sur les caractères particuliers de chaque arme. Celle du génie met en avant un militaire du rang consultant ce qui semble être un plan. L’homme se détache sur l’image d’un pont en construction, traitée comme un « bleu », c’est-à-dire un document technique. Le rouge et le noir des caractères du mot « GÉNIE » correspondent aux couleurs traditionnelles de cette arme (comme le rappelle l’écusson de col du soldat). L’affiche pour l’artillerie fait également appel à la couleur de tradition, le rouge, présent dans une partie des caractères et dans l’écusson de col. La scène montre une pièce d’artillerie de campagne en batterie, prête à tirer, le caisson à munitions ouvert. Le chef de pièce, reconnaissable à son galon de manche, vient d’ordonner le feu. Le tireur (à droite) s’apprête à faire partir le coup tandis que le servant (à genoux) semble préparer l’obus suivant. L’action collective de l’équipe (plus nombreuse en réalité) est ici réduite à trois personnages pour symboliser le « cœur de métier ». L’orientation de la scène, qui met le spectateur à la place de l’officier commandant la batterie, renforce la puissance du message.
L’affiche pour la cavalerie s’appuie sur un double registre que résume le slogan « Arme moderne et sportive ». Les trois soldats illustrent trois activités supposées attractives, équitation, moto et automitrailleuse. La tourelle blindée, au premier plan, et la posture du chef d’engin revêtu de sa traditionnelle veste de cuir, visent à renforcer l’idée de puissance associée à la mécanisation. Rien n’indique s’il s’agit d’un char (dont l’armée d’armistice est dépourvue) ou d’une simple automitrailleuse, puisque la caisse de l’engin et son train de roulement ne sont pas représentés. Le bleu des caractères correspond à la couleur traditionnelle des hussards, c’est-à-dire de la cavalerie légère.
Une réalité fortement embellie
Ces trois affiches s’efforcent de donner de l’armée d’armistice l’image d’un instrument moderne et efficace alors qu’elle est, en réalité, toute petite et totalement déclassée dans un conflit moderne, faute de motorisation suffisante.
L’image du génie, assez statique, est dépourvue de toute référence à un assaut mettant en œuvre des unités motorisées caractéristiques de la guerre-éclair. Quant aux artilleurs, ils utilisent un canon de 75 mm, calibre maximal autorisé par la convention d’armistice, qui a eu son heure de gloire au début de la Première Guerre mondiale, mais s’avère totalement dépassé en 1941. Enfin, la cavalerie, qui dispose de moins d’une centaine d’automitrailleuses pour appuyer ses escadrons à cheval ou à bicyclette, demeure totalement incapable de s’opposer efficacement aux unités motorisées ou blindées de la Wehrmacht.
Dans ces conditions, il est tout à fait compréhensible que l’armée d’armistice attire peu de candidats, d’où le maintien des appelés. Dès lors, incapable de s’appuyer sur sa capacité militaire proprement dite, « l’armée nouvelle » s’efforce de dépasser l’obstacle que représentent ses faibles moyens en mettant l’accent sur la formation morale, ce qui correspond par ailleurs à l’un des principaux axes idéologiques de l’État de Vichy. À cet effet, elle pratique intensivement le sport, notamment l’athlétisme (mais non le vol à voile ou le parachutisme, interdits par la convention de juin 1940). Elle fait également preuve d’une très grande rigueur dans la tenue ou l’organisation de cérémonies. Finalement, cette armée est dissoute en novembre 1942, quand les Allemands envahissent la zone sud sans combats.
BACHELIER Christian, « L'armée française entre la victoire et la défaite », dans La France des années noires, tome 1, Paris, Éd. du Seuil, 1993.
CORVISIER André (dir.), Histoire militaire de la France, T.IV, De 1940 à nos jours, Paris, PUF, 1992.
DELPERRIÉ DE BAYAC Jacques, Le Royaume du Maréchal, Histoire de la zone libre, Paris, R.Laffont, 1975.
PAXTON Robert, L'Armée de Vichy - Le corps des officiers français 1940-1944, Paris, Tallandier, 2004.
SEREAU Raymond, L’Armée de l’armistice, 1940-1942, Paris, Nouvelles Editions latines, 1961.
Jean-François BRUN, « L’armée de Vichy recrute », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 06/06/2023. URL : histoire-image.org/etudes/armee-vichy-recrute
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