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Paysans chez un homme de loi, dit aussi Le Paiement de la dîme

Paysans chez un homme de loi, dit aussi Le Paiement de la dîme

Sac à procès.

Sac à procès.

Sac à procès.

Sac à procès.

Paysans chez un homme de loi, dit aussi Le Paiement de la dîme

Paysans chez un homme de loi, dit aussi Le Paiement de la dîme

Date de création : 1575-1625

Date représentée :

H. : 55 cm

L. : 80 cm

La date de 1617 est apocryphe.

Huile sur bois.

Domaine : Peintures

© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado

Lien vers l'image

RF 1973 37 - 17-627597

La perception de l’impôt et la place de l’écrit dans les campagnes

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Anne-Cécile TIZON-GERME

L’avocat de village

Daté de 1617 dans la version du musée du Louvre, ce tableau est connu à plusieurs dizaines d’exemplaires à travers le monde, sous des titres divers tels que « le paiement de la dîme », « l’avocat de village », « le cabinet d’un procureur », « les redevances seigneuriales »... C’est dire la fortune de la scène dont nombre de versions sont identifiées comme venant directement de l’atelier Brueghel. En dehors du témoignage d’une production presque commerciale, cette scène montre l’importante présence de l’écrit jusque dans les campagnes..

Une petite pièce encombrée

Dans une petite pièce, face à un avocat qui porte le bonnet des hommes de loi, se pressent de nombreux solliciteurs. Le chapeau à la main, les paysans de tous âges viennent présenter leur affaire. L’un d’entre eux tient des grappes de raisin, un autre une volaille, une femme sort des œufs d’un panier. Installé derrière la porte entrouverte par laquelle un nouveau plaignant est en train de se glisser, un clerc écrit sur un petit bureau encombré de papiers. Partout dans la pièce pendent des sacs gonflés des pièces de procédure, identifiés par une étiquette cousue ; sur les étagères s’amoncellent de nombreux papiers pliés en liasses, froissés parfois et même déchirés, qui débordent jusque sous les pieds de l’avocat et dans les coins de la salle. Dans cette représentation satirique de la justice, le maintien de l’avocat, désinvolte, avachi sur son siège, reflète la distance entre l’homme qui détient le savoir et les paysans, inclinés dans une attitude humble de respect et de soumission. Mais ce sont aussi l’entassement et l’encombrement des papiers qui attirent l’attention.

La place de l’écrit

Si ce tableau est souvent utilisé pour illustrer la perception de l’impôt et notamment son paiement en nature à travers les denrées visibles dans les mains de plusieurs personnages, il représente plus vraisemblablement un avocat rural. En effet, les papiers que celui-ci conserve autour de lui, suspendus dans des sacs en chanvre soigneusement étiquetés, sont caractéristiques des placets, mémoires et pièces de procédure que l’on trouve dans les archives de justice jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. D’autres documents sont simplement pliés dans la longueur et tenus par une ficelle. Dans Les Plaideurs, Racine mentionne d’ailleurs à plusieurs reprises les gros sacs à procès de Dandin, mais aussi les importantes dépenses qu’entraîne sa manie procédurière.

Ce mode de rangement des papiers était d’autant plus courant que la culture du chanvre était très répandue dans les campagnes jusque dans les années 1950. Souvent cultivé par les femmes, le Cannabis sativa était utilisé dans son entier, notamment pour fabriquer des cordes de marine, de l’étoupe, du gros fil que l’on tissait à domicile pour les draps. Dans certaines régions linières, on avait recours au lin pour la confection de ces sacs.

Ce rangement caractéristique des documents judiciaires d’Ancien Régime a parfois traversé les siècles, et certains fonds d’archives renferment encore aujourd’hui des documents dans des sacs de grosse toile de chanvre. La langue française en garde aussi trace dans des expressions comme « l’affaire est dans le sac », « avoir plus d’un tour dans son sac » ou « une affaire pendante ».

· Klaus ERTZ, « L’avocat des paysans » in catalogue de l’exposition Pieter Brueghel le Jeune (1564-1637-8), Jan Brueghel l’Ancien (1568-1625) : une famille de peintres flamands vers 1600, Anvers, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, 3 mai-26 juillet 1998, Lingen-Anvers, Luca Verlag-Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, 1998.

· Louis LIGIER, « Chanvre », in Nouvelle maison rustique ou économie générale de tous les biens de campagne, Paris, Veuve Savoye, 1775. 

Anne-Cécile TIZON-GERME, « La perception de l’impôt et la place de l’écrit dans les campagnes », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 23/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/perception-impot-place-ecrit-campagnes

Anonyme (non vérifié)

Excellent commentaire, qui éclaire l'immersion des campagnes dans la culture écrite, par delà la diffusion du livre et de l'imprimé.
Le vrai titre du tableau pourrait être "La paperasse" (néologisme du 16e siècle).
Aux locutions qu'a données la pratique des sacs de procès, on pourrait ajouter "Vider son sac"(le jour du procès).

ven 15/05/2015 - 11:20 Permalien

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