Lucile Desmoulins, Horace, Camille Desmoulins.
Auteur : DAVID Jacques Louis
Lieu de conservation : musée national du château de Versailles (Versailles)
site web
Date de création : 1792
Date représentée : 1792
H. : 100 cm
L. : 123 cm
Huile sur toile
Domaine : Peintures
© RMN - Grand Palais (Château de Versailles) / image RMN-GP
MV 5651 - 87-000328-02
Lucile Desmoulins
Date de publication : Décembre 2008
Auteur : Charlotte DENOËL
Les prémices de la Révolution française
Dans la France des années 1780, les idées nouvelles des philosophes des Lumières, défenseurs d’une monarchie parlementaire à l’anglaise, des droits du citoyen et de l’idée de nation, se répandent dans les couches sociales supérieures, tandis que privilégiés et non-privilégiés commencent à manifester des signes de mécontentement à l’encontre du pouvoir royal, les nobles revendiquant le retour de leurs prérogatives politiques traditionnelles et l’augmentation des droits féodaux, la bourgeoisie la reconnaissance de ses droits et l’établissement d’une monarchie à l’anglaise, et le tiers état une amélioration de ses conditions de vie, fortement dégradées du fait de la pression fiscale et des mauvaises récoltes de 1788. Malgré des tentatives de réformes judiciaires et fiscales qui rencontrent l’opposition farouche des parlementaires, le roi ne peut empêcher la tenue d’états généraux le 1er mai 1789. Très vite, un bras de fer s’engage entre la monarchie et le tiers état qui se proclame le 17 juin « Assemblée nationale », et des émeutes éclatent suite au renvoi de Necker et au refus du roi de céder aux revendications. Au milieu de cette effervescence se dessine le destin commun de deux personnages tout dévoués à la cause de la nation, Lucile et Camille Desmoulins.
Lucile et Camille Desmoulins, un même destin
Née à Paris en 1770 dans un milieu bourgeois aisé, Lucile Duplessis-Laridon partage sa vie entre les deux propriétés familiales de la rue de Condé, à Paris, et de Bourg-la-Reine. Au début des années 1780, elle fait la connaissance de celui qui deviendra son mari, Camille Desmoulins, jeune avocat parisien rêvant de jouer un rôle dans la France nouvelle qui s’ébauche.
En décembre 1790, après avoir fréquenté assidûment la famille de Lucile, il finit par obtenir sa main, et leur mariage est célébré à l’église Saint-Sulpice. Parmi les témoins figure Robespierre, ancien condisciple de Camille. Dès lors, la vie de Lucile Desmoulins se confond avec celle de son mari, dont elle partage pleinement les idéaux antiaristocratiques et les fréquentations. De leur union naîtra un fils, Horace Camille, le 6 juillet 1792, ainsi que le montre un portrait de la famille Desmoulins peint par Jacques-Louis David.
Chef de file du mouvement néoclassique et révolutionnaire engagé, David a réalisé un grand nombre de portraits de figures emblématiques de la Révolution, dont celui-ci qui met en scène Camille Desmoulins assis à sa table de travail, entouré de sa femme et de leur jeune fils. Dans cette construction pyramidale, les gestes tendres et les échanges de regards entre les trois protagonistes suggèrent un bonheur familial épanoui.
Dès le début de la Révolution française, Camille Desmoulins se lance avec enthousiasme dans la politique. Élu aux états généraux de 1789, il devient l’un des orateurs les plus écoutés des jardins du Palais-Royal et publie brochures et journaux politiques. En 1792, après avoir milité aux côtés de Robespierre en faveur de la paix, il change de camp et se rapproche de Danton et Marat, partisans de la guerre.
Après la chute de la monarchie le 10 août 1792, dans laquelle il joue un rôle crucial, Danton est nommé ministre de la Justice, et Camille Desmoulins devient son secrétaire général. Bientôt député de Paris à la Convention, il siège avec les Montagnards ; déstabilisé par la condamnation des Girondins le 30 octobre 1793, Desmoulins devient le porte-parole des Indulgents, mouvement dont Danton est le chef de file, et lance en décembre un nouveau journal, Le Vieux Cordelier, qui attaque violemment les hébertistes, partisans de la Terreur à outrance.
Le 31 mars 1794, il est arrêté avec les dantonistes et exécuté en même temps que Danton et Fabre d’Églantine le 5 avril. La veille, Lucile Desmoulins avait été arrêtée et incarcérée à la prison du Luxembourg. Là, elle est accusée d’avoir voulu fomenter dans la prison une rébellion en faveur de son mari avec le général Arthur Dillon, avec qui elle avait été en relation par le passé. Jugée le 13 avril 1794 pour avoir conspiré contre la sûreté du peuple, elle est guillotinée le soir même, avec Arthur Dillon et la veuve de Jacques-René Hébert.
Un couple moderne ?
Unis jusque dans la mort, Camille et Lucile ont transmis à la postérité l’image de deux héros de tragédie, épris de liberté et de romantisme, et victimes de la tourmente révolutionnaire. Tous deux sont parvenus à construire un couple dans lequel l’un et l’autre étaient placés sur un pied d’égalité, loin du modèle du despotisme marital régnant que l’ère napoléonienne n’a fait que renforcer, malgré les avancées révolutionnaires en faveur des droits civils des femmes (droit au divorce, égalité successorale, etc.). Lucile fit siens les combats de son mari, participa à ses enthousiasmes et à ses craintes, à ses joies et à ses peines, tempérant ses ardeurs et l’aidant à acquérir la détermination qui lui faisait parfois défaut. Le journal intime qu’elle tint entre 1788 et 1793 fourmille d’anecdotes sur la vie qu’elle mena aux côtés de son mari et sur les événements révolutionnaires qu’elle suivit de près ou de loin, comme cette terrible nuit du 9 au 10 août qu’elle vécut chez les Danton, dans l’attente de nouvelles de Camille, et dont la narration restitue bien l’atmosphère dramatique qui régnait alors dans les rues de la capitale. Comme d’autres femmes de son époque, Lucile fréquenta les nouveaux lieux de sociabilité révolutionnaires qu’étaient les salons parisiens, tenant elle-même un salon dont les Danton furent des habitués, et assista aux séances de la Convention, sans pour autant revendiquer un rôle politique pour les femmes, rejoignant en cela les prises de position de Madame Roland qui considérait que les femmes devaient se cantonner à la sphère privée.
Jean-Paul BERTAUD, Camille et Lucile Desmoulins, un couple dans la tourmente, Paris, Presses de la Renaissance, 1986.Lucile DESMOULINS, Journal 1788-1793, éd. Philippe Lejeune, Paris, Éditions des Cendres, 1995.Marie-Paule DUHET, Les Femmes et la Révolution, 1789-1794, Paris, Gallimard, coll. « Archives », 1979.Jean-René SURATTEAU et François GENDRON, Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, P.U.F., 1989.Jean TULARD, Jean-François FAYARD et Alfred FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Paris, Laffont, 1987.
Charlotte DENOËL, « Lucile Desmoulins », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 22/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/lucile-desmoulins
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gemolibre
Bonsoir.
Je viens tout juste d'ouvrir un compte sur votre site et, après avoir navigué une petite heure dessus, je m'empresse de vous dire mon admiration pour la qualité, la précision et l'étendue du contenu de chaque sujet ou personnage historique recherché.
Les illustrations également sont de toute beauté.
Donc, bravo pour votre travail et merci pour tout ce plaisir et toute cette culture que vous nous apportez.
Cordialement.
Clio
Si Lucile Demouslins a été guillotinée "le soir même" de son jugement, celui-ci n'a de toute évidence pas eu lieu en 1793, comme vous le dites, puisqu'elle a été guillotinée en 1794. Veuillez corriger la date SVP.
Histoire-image
Bonjour,
Merci pour votre oeil avisé.
Une coquille s'est effectivement glissée dans le texte et nous vous remercions de l'avoir signalé.
Lucile Desmoulins est bien décédée le 13 avril 1794.
Cette erreur va très vite être corrigée
A bientôt
Anne-Lise
Je trouve comme dingue que…
Je trouve comme dingue que la biographie de Lucile Desmoulins ne parle quasiment pas, d'elle mais principalement de son mari...
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