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Marie-Thérèse-Charlotte de France et son frère le Dauphin Louis-Joseph-Xavier François de France

Marie-Thérèse-Charlotte de France et son frère le Dauphin Louis-Joseph-Xavier François de France

Portrait de Marie-Thérèse de France dite Madame Royale

Portrait de Marie-Thérèse de France dite Madame Royale

Marie-Thérèse-Charlotte de France, duchesse d'Angoulême, dite Madame Royale

Marie-Thérèse-Charlotte de France, duchesse d'Angoulême, dite Madame Royale

Marie-Thérèse-Charlotte de France et son frère le Dauphin Louis-Joseph-Xavier François de France

Marie-Thérèse-Charlotte de France et son frère le Dauphin Louis-Joseph-Xavier François de France

Date de création : 1784

H. : 117 cm

L. : 94 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

Lien vers l'image

MV 3907 - 14-542336

  • Marie-Thérèse-Charlotte de France et son frère le Dauphin Louis-Joseph-Xavier François de France

Le destin de la duchesse d’Angoulême, fille de Louis XVI et Marie-Antoinette

Date de publication : Novembre 2023

Auteur : Lucie NICCOLI

Marie-Thérèse-Charlotte de France, survivante de la Révolution

Marie-Thérèse-Charlotte de France, fille aînée de Louis XVI et de Marie-Antoinette, naît à Versailles en décembre 1778. Sa venue au monde est un soulagement pour la dynastie, sept ans après le mariage de ses parents et trois ans après leur accession au trône. Elle est suivie de trois autres enfants dont aucun n’atteindra l’âge adulte : Louis-Joseph en 1781, mort de la tuberculose à la veille de la Révolution, Louis-Charles, éphémère Louis XVII, en 1785, mort à la prison du Temple en 1795, et Sophie, née en 1786 et morte nourrisson. Marie-Thérèse est encore enfant lorsque le peuple révolutionnaire force la famille royale à quitter Versailles pour le château des Tuileries, à Paris, en 1789. L’été 1792, elle est chassée des Tuileries et finalement enfermée à la prison du Temple. L’adolescente est seule à en sortir en décembre 1795, tandis que ses parents et sa jeune tante paternelle, Madame Élisabeth, sont successivement guillotinés entre janvier 1793 et mai 1794.

L’orpheline du Temple est alors vénérée comme une martyre par les royalistes. Elle est rendue à sa famille maternelle à Vienne puis décide de rejoindre ses oncles en exil en Courlande (Lettonie actuelle) pour y épouser en 1799 le duc d’Angoulême, son cousin, fils aîné du futur Charles X. À la chute de l’Empire en 1814, puis après les Cent-Jours, en juin 1815, elle rentre en France avec les Bourbons et tient pour la cour le rôle d’une reine. Représentée par les peintres tout au long de sa vie, son parcours peut se lire à travers trois portraits correspondant à différentes étapes de celui-ci : en 1784 avec son petit frère Louis-Joseph, dans un portrait des enfants de France commandé par Marie-Antoinette à Élisabeth Vigée Le Brun, peintre officiel de la reine ; en 1795 par le graveur et éditeur suisse Christian von Mechel, peut-être d’après François Sergent-Marceau alors en exil à Bâle, lors de son arrivée dans cette ville pour un échange contre des prisonniers politiques détenus par l’Autriche ; en 1816 devenue duchesse d’Angoulême, posant en grand habit de cour pour Antoine-Jean Gros, serviteur de l’Empire puis de la monarchie restaurée.

Fortunes et infortunes de la princesse royale

En 1784, Marie-Thérèse, six ans, et Louis-Joseph, trois ans, sont encore des enfants royaux choyés et élevés dans le luxe du château de Versailles. Élisabeth Vigée Le Brun les met en scène dans un cadre champêtre, sans doute inspiré du parc du château qu’appréciait beaucoup la reine. Assis par terre face au peintre, serrés l’un contre l’autre, ils tiennent sur leurs genoux un nid tombé de l’arbre dans lequel piaillent des oisillons, symbole de la fragilité de l’âge tendre. Les deux bambins ne portent déjà plus la robe de l’enfance, costume habituel pour les filles et les garçons jusqu’à l’âge de sept ans. L’aînée est vêtue d’une élégante robe à l’anglaise en satin rayé, avec son rembourrage matelassé à l’arrière, mise à la mode par sa mère dans les années 1780, car plus confortable que la robe à la française pour la vie en plein air. Elle est coiffée d’un simple ruban et d’un chapeau de paille, celui de son frère étant posé à terre, sur un bouquet de fleurs fraiches. Le cadet porte un habit à la matelote en soie prune, sorte de combinaison à col rond également venu d’Angleterre. Symboles de son statut d’enfant de France, il arbore la croix de chevalier de l’ordre de Saint-Louis et le cordon bleu de l’ordre du Saint-Esprit reçus à son baptême. Le petit Dauphin, au visage fin, le rouge aux joues et les grands yeux clairs un peu tristes, semble chétif ; il est déjà gravement malade. Sa grande sœur, protectrice, l’enlace affectueusement.

À sa sortie de la prison du Temple, la princesse de dix-sept ans est marquée par les épreuves. Ce premier portrait d’après nature depuis sa libération donne sans doute de la jeune fille, devenue malgré elle une célébrité, une image assez ressemblante : son long nez aquilin, comme celui de sa mère, ses grands yeux et sa petite bouche, sont semblables aux traits que lui prête Gros onze ans plus tard. L’artiste la représente de trois-quarts, très droite et digne, adressant au spectateur un regard triste et doux. Elle est vêtue d’une simple robe chemise en coton, comme celles que Marie-Antoinette mit à la mode à la cour, non pas blanche, mais noire, ajustée à la taille par un ruban mauve, couleurs du deuil. Ses cheveux ondulés mi-longs sont lâchés sous un fichu blanc, couvert lui-même par un voile noir attaché à la robe au niveau du buste. Par opposition aux coiffures sophistiquées, excentriques et poudrées des années 1780, ses cheveux libres sous de simples linges évoquent le dénuement de la prisonnière, mais aussi la fin de l’ostentation pour les femmes de toute condition pendant la Révolution. L’expression du deuil elle-même est modeste, la jeune fille devant renoncer aux lourds voiles funèbres pour ne pas dissimuler son visage et rendre un hommage trop ostensible à ses défunts parents.

De retour en France, la duchesse d’Angoulême est présentée par Louis XVIII, veuf, comme la première dame de France. Son portrait en pied, en grand habit de cour, peint par Gros, sorte de pendant au portrait qu’il fit de Louis XVIII en costume de sacre la même année, confirme ce statut de reine de substitution. Elle y figure, comme son oncle, dans un décor d’apparat, debout devant un trône au dossier en demi-soleil orné des armes de France et de Navarre, et à côté d’un tabouret au coussin fleurdelysé supportant une couronne royale. Son costume ressemble étrangement à celui de l’impératrice Marie-Louise commencé par Gérard en 1810 : une somptueuse robe de style Empire en satin blanc brodé de motifs dorés – des abeilles pour Marie-Louise, des palmettes pour Marie-Thérèse –, un lourd manteau de velours doublé d’hermine, de riches bijoux sertis des diamants de la Couronne, en particulier un diadème ornant une coiffure à l’antique – nuque dégagée et boucles sur le front. Âgée de vingt-huit ans, la jeune femme a pris de l’assurance : elle est majestueuse, mais aussi sévère, tête haute et lèvres serrées, regard de marbre, comme si elle prenait sa revanche sur les humiliations passées.

La fille de Louis XVI, quasi souveraine de la monarchie restaurée

Ces trois portraits évoquent le destin singulier d’une survivante, dotée d’une grande force morale. Celle que sa mère surnommait affectueusement Mousseline la sérieuse, déjà fière et attentive à ses jeunes frères vulnérables, s’est endurcie avec les épreuves. Après le deuil, elle se consacre à la réhabilitation de la mémoire de ses parents, pour lesquels elle fait édifier la chapelle expiatoire, et à la restauration de la monarchie. Lors de sa tentative d’organiser la résistance de Bordeaux face aux troupes de Napoléon, de retour de l’île d’Elbe en mars 1815, elle gagne même le respect de l’empereur, qui l’aurait qualifiée de seul homme de sa famille.

En dépit de ses atours féminins, ce sont bien une détermination et une autorité habituellement attribuées à un homme que dégagent sa posture et son regard dans son portrait de quasi souveraine. Son allure sévère reflète aussi son intransigeance morale, sa conception de la monarchie étant plus proche de celle du comte d’Artois que de celle de Louis XVIII. L’omniprésence des symboles royaux, en particulier des fleurs de lys, et la richesse des joyaux, certains hérités de Marie-Antoinette ou des impératrices, d’autres commandés par la duchesse, disent le faste retrouvé des Bourbons et la volonté de renouer avec l’Ancien Régime tout en y intégrant les acquis de l’Empire. Les plumes d’autruche qu’elle porte fièrement, visibles dans plusieurs autres peintures, sont comme le panache de cette héroïne, sorte de sainte vierge (son couple demeura stérile) du parti monarchique. Après la révolution de juillet 1830 et l’arrivée au pouvoir de Louis-Philippe d’Orléans, la famille royale quitte à nouveau la France. Charles X abdique en faveur de son petit-fils Henri d’Artois, fils du duc de Berry, le duc et la duchesse d’Angoulême étant donc écartés de la succession. Marie-Thérèse règne cependant jusqu’à sa mort sur la petite cour en exil à côté de Vienne, veillant très pieusement à l’éducation de ses neveux, les « enfants de France ».

Marie-Thérèse-Charlotte de FRANCE, Mémoire écrit par Marie-Thérèse-Charlotte de France sur la captivité des princes et princesses ses parents depuis le 10 août 1792 jusqu’à la mort de son frère arrivée le 9 juin 1795, E. Plon, Nourrit et Cie, Paris, 1982.

André CASTELOT, Madame Royale, Perrin, Paris,1999.

Hélène BECQUET, Marie-Thérèse de France, Perrin, Paris, 2012.

Lucie NICCOLI, « Le destin de la duchesse d’Angoulême, fille de Louis XVI et Marie-Antoinette », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 27/04/2024. URL : histoire-image.org/etudes/destin-duchesse-angouleme-fille-louis-xvi-marie-antoinette

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