Aérodrome à Ham
Aérodrome
Défilé des troupes à la cérémonie de la présentation du drapeau américain à l'Escadrille Lafayette
Aérodrome à Ham
Auteur : ANONYME
Lieu de conservation : Musée franco-américain (Blérancourt)
site web
Date de création : 1917
Date représentée : 1917
H. : 27,7cm
Domaine : Photographies
© GrandPalaisRmn (Château de Blérancourt) / René-Gabriel Ojeda
DSB 193.5 - 07-519451
L'Escadrille Lafayette : des héros volontaires
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Alexandre SUMPF
Montrer les héros volontaires d’une guerre qui se modernise
Pendant le conflit de 1914-1918, la photographie est largement mise à contribution, permettant aux militaires de connaître rapidement et précisément l’état des combats, des installations ou des troupes et offrant un formidable outil d’information et de propagande auprès des civils. Nombre de ces clichés de guerre sont réalisés directement par des photographes rattachés à l’armée qui seuls ont le droit de se trouver sur les lieux d’opérations ou les différentes bases. C’est le cas des trois photographies retenues ici, consacrées à l’escadrille La Fayette : Aérodrome à Ham, 1917, Aérodrome et Défilé des troupes à la cérémonie de la présentation du drapeau américain à l’Escadrille La Fayette.
Au moment où ces clichés ont été pris (entre fin 1916 et fin 1917), l’aviation joue un rôle de plus en plus important (même s’il reste très relatif) dans le déroulement de la guerre. De nombreuses photographies, largement reprises par la presse, montrent aux civils lassés par l’horreur et la monotonie des tranchées les images nouvelles d’une guerre moderne, chevaleresque, plus noble, plus propre et plus supportable. Les pilotes sont des héros qui font rêver, et les avions sont présentés comme les armes invincibles de la victoire à venir. Le fait qu’il s’agisse ici d’une escadrille de volontaires américains est aussi très significatif.
Créée le 20 avril 1916 et d’abord basée à Luxeuil-les-Bains, l’unité aéronautique N 124 ou escadrille La Fayette est composée de volontaires américains qui ont décidé de servir l’armée française et ont été recrutés dans la Légion étrangère ou parmi les ambulanciers bénévoles. Placée sous le commandement du capitaine Georges Thénault, l’escadrille opère d’abord à Luxeuil puis dans le secteur de la Somme (Cachy, Saint-Just-en-Chaussée et Ham) à compter d’octobre 1916. Avec l’entrée en guerre des États-Unis le 6 avril 1917, la majorité de ses membres rejoignent l’armée américaine, et l’escadrille cesse d’exister sous sa forme originale le 18 février 1918. Aux États-Unis, la presse célèbre, nombreuses photographies à l’appui, les exploits de ces jeunes héros, soit sur un mode « aventurier » dénué de considérations politiques, soit pour montrer son soutien à l’effort de guerre du pays. En France, il s’agit de montrer que la guerre est juste (puisqu’elle attire des volontaires) et qu’elle s’inscrit dans la tradition de la lutte pour la liberté et la république, comme le suggère le nom « La Fayette ».
Une histoire de lignes
Trois lignes de fuite structurent et organisent le cliché Aérodrome à Ham, 1917. À droite apparaissent un petit hangar de toile (où les avions sont garés) et deux petits baraquements. La ligne du centre est dégagée, seulement occupée par le drapeau américain qui flotte au haut de son mât, assez loin du premier plan. À l’arrière-plan, d’autres bâtiments bornent l’horizon, annonçant la campagne plate et ouverte de la Somme, que l’on devine derrière eux. Sur la gauche, deux avions rangés parallèlement auprès desquels deux groupes d’hommes (pilotes et mécaniciens) sont réunis. Il s’agit vraisemblablement de Spad S. VII (avions biplans datant pour la plupart du début de 1917). Près du premier avion, une manche à air servant à jauger le vent répond au drapeau central.
Aérodrome est structuré plus horizontalement. La profondeur de champ est très réduite, car les deux gigantesques hangars de toile bouchent l’horizon. Précédés par une courte étendue de terre, les avions alignés (légèrement de biais pour le spectateur) constituent le premier plan. Les appareils étant rangés très près les uns des autres, leurs ailes forment une ligne presque continue, qui semble infinie.
On retrouve une organisation tout en parallèle (légèrement de trois quarts, suivant une horizontale comportant cette fois une certaine profondeur) pour Défilé des troupes à la cérémonie de la présentation du drapeau américain à l’Escadrille La Fayette. Prise de plus loin, la photographie présente un assez vaste panorama. Tout au fond, les deux premières lignes correspondent aux hangars et aux avions stationnés de la même façon que dans la photographie Aérodrome. Puis, l’espace central, constitué et rendu lui aussi linéaire par les troupes qui défilent. Au premier plan, un espace de terre nue, qui laisse du champ au photographe.
Entre puissance militaire et rêve américain
Les images suggèrent plusieurs thèmes. Destinées aux militaires mais aussi aux civils, elles ne doivent rien au hasard : il s’agit de transmettre un message positif, rassurant et renouvelé sur la guerre. Par une impression d’organisation (linéaire) sans failles et de puissance tout d’abord, particulièrement visible dans Aérodrome où les avions menaçants pour l’ennemi font figure d’armes redoutables, prêtes au combat. De même, Défilé des troupes à la cérémonie de la présentation du drapeau américain à l’Escadrille La Fayette montre que les troupes sont prêtes à utiliser ces moyens modernes.
Par une impression de mobilité, ensuite. Installés en pleine campagne et près du front, l’aérodrome et toute l’organisation qu’il implique semblent très facilement déplaçables : les « bâtiments » se démontent aussi vite que des tentes, les hommes et les avions sont prêts à entrer en action. Une guerre « aérienne » de mouvement (des raids de l’aviation aux bases mobiles) rapide, différente de celle que mènent les fantassins enlisés dans la boue des tranchées.
Enfin, par une touche américaine et moderne, plus nette dans Aérodrome à Ham, 1917. Ici, le drapeau (présent aussi dans Défilé des troupes à la cérémonie de la présentation du drapeau américain à l’Escadrille La Fayette) rappelle aux Français comme aux Américains le symbole politique que constituent l’escadrille et ses engagés. Quant aux hommes, leur maîtrise des avions et du ciel leur confère une sorte d’aristocratie et en fait les invincibles chevaliers d’une ère nouvelle.
Jean-Jacques BECKER, Dictionnaire de la Grande Guerre, Bruxelles, André Versaille éditeur, 2008.
Jean GISCLON, Chasseurs au groupe La Fayette, 1916-1945, Paris, Nel, 1997.
Jean GISCLON, Les As de l’Escadrille La Fayette, Paris, Hachette, 1976.
Jean GISCLON, L’Escadrille La Fayette. De l’Escadrille La Fayette au La Fayette Squadron, 1916-1945, Paris, France Empire, 1975.
« L’Escadrille La Fayette », in revue Icare n° 158 (1996) et n° 160 (1997).
Alexandre SUMPF, « L'Escadrille Lafayette : des héros volontaires », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 11/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/escadrille-lafayette-heros-volontaires
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