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La Promenade

La Promenade

Auteur : KNAUS Ludwig

Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web

Date de création : 1855-1900

H. : 97 cm

L. : 127 cm

Titre d'usage  : dit à tort La Promenade aux Tuileries. La sculpture, au fond à droite est identifiable avec le Faune flûteur d'après l'antique de la collection Borghèse, permet de localiser la scène au jardin du Luxembourg (Paris).

Huile sur toile. 

Domaine : Peintures

© RMN - Grand Palais (musée du Louvre) / Tony Querrec

Lien vers l'image

RF 98 - 14-518963

Une promenade mondaine dans un jardin parisien

Date de publication : Septembre 2021

Auteur : Lucie NICCOLI

Une scène de la vie parisienne acquise par l’État lors de l’Exposition universelle de 1855

Lors de l’Exposition universelle de 1855, première exposition internationale d’art contemporain, les œuvres d’artistes allemands remportent un certain succès populaire. Certaines sont même acquises pour une somme importante par l’État français : c’est le cas de La Promenade de Ludwig Knaus, achetée 8 000 francs et destinée aux appartements du ministre d’État, le comte Walewski, au Louvre.

L’auteur a été formé à l’Académie des beaux-arts de Düsseldorf et a achevé sa formation à Paris, dans l’atelier de Thomas Couture. Ses scènes de genre sont appréciées des Français pour leurs sujets, qui leur sont familiers, ses qualités d’observateur et la virtuosité de sa technique.

Celle-ci représente, dans l’allée d’un jardin public, une nurse promenant une fillette, escortée par un jeune serviteur noir, et constitue une scène typique de la vie parisienne sous le Second Empire

La petite fille blanche, sa nurse et son domestique noir

Au premier plan du tableau, les trois promeneurs principaux sont très élégants, notamment la petite fille, dont la coûteuse tenue en dentelles, les bottines blanches et le chapeau à plumes indiquent qu’elle est issue de la haute société – bourgeoisie ou aristocratie. La nurse à la robe et au tablier blancs impeccables, ainsi que le jeune domestique noir portant haut-de-forme et redingote confirment ce statut social élevé. Les regards divergents des trois personnages, chacun absorbé dans ses propres pensées, révèlent les frontières invisibles qui les séparent. La différence de classe entre les deux enfants est aussi marquée par le contraste entre la lumière dont est nimbée la petite fille vêtue de blanc, au centre de la composition, et l’ombre dans laquelle est relégué le domestique noir qui se tient derrière elle (détail 1).

Au fond de l’allée, plusieurs femmes assises, certaines portant un bébé – probablement des nourrices – semblent converser. On distingue aussi d’autres promeneurs : un homme en haut-de-forme et des femmes avec des ombrelles.

La sculpture à l’arrière-plan, identifiée avec le Faune flûteur (détail 2) d’après l’antique de la collection Borghèse, indique que le jardin représenté est celui du Luxembourg.

Une promenade mondaine dans un jardin public, reflet de la hiérarchie sociale sous le Second Empire

La promenade à but récréatif ou mondain dans les parcs et jardins était déjà pratiquée par la bourgeoisie et l’aristocratie depuis le XVIIe siècle, quand Louis XIV ouvrit au public le jardin des Tuileries, puis au XVIIIe, quand Louis XV en fit de même pour les bois de Boulogne et de Vincennes. L’ouverture du jardin du Luxembourg attendit la Révolution. Cette pratique prit une ampleur inédite sous le Second Empire, avec le réaménagement par le Service des Promenades et Plantations de Paris des jardins, parcs et bois et la création de vingt-quatre squares. Si le peuple investit alors les squares, la haute société leur préféra cependant les jardins historiques, ceux du Luxembourg et des Tuileries notamment.

Dans les grandes villes et notamment Paris, les familles bourgeoises – aisées comme modestes – avaient alors l’habitude de confier leurs enfants à des nourrices, de jeunes mères issues souvent de régions rurales et pauvres, telles que le Morvan, le Limousin, le Nord ou la Bretagne. Une fois le nourrisson sevré, elles restaient souvent auprès de la famille en qualité de bonne d’enfant. Les nourrices bénéficiaient d’un statut privilégié par rapport aux autres domestiques et pouvaient même avoir leur propre domestique – ici, peut-être, le jeune serviteur noir.

Alors que l’esclavage avait été définitivement aboli en 1848, les Noirs affranchis en métropole, devenus pour la plupart domestiques, dockers ou saltimbanques, étaient encore en effet des citoyens de seconde zone, victimes de racisme.

Dans l’espace public d’un jardin, cette toile met donc en scène, par les attitudes et les tenues vestimentaires des protagonistes, les rapports sociaux très codifiés qu’entretenaient, au milieu du XIXe siècle, les enfants des classes supérieures, leurs nourrices et leurs domestiques.

Guy COGEVAL, Yves BADETZ (sous la dir. de), Spectaculaire Second Empire, Skira, Paris, 2016.

Luisa LIMIDO, L’Art des jardins sous le Second Empire, éditions Champ Vallon, Seyssel, 2002.

Nöelle RENAULT, Au Temps des nourrices du Morvan, association Nourrices du Morvan, Lormes, 1997.

Cécile DEBRAY, Stéphane GUEGAN, Denise MURRELL, Isolde PLUDERMACHER (sous la dir. de), Le Modèle noir, de Géricault à Matisse, coédition Musées d'Orsay et de l’Orangerie / Flammarion, Paris, 2019.

Lucie NICCOLI, « Une promenade mondaine dans un jardin parisien », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 23/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/promenade-mondaine-jardin-parisien

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