La bande à Bonnot : la fin d'un bandit
Auteur : ANONYME
Lieu de conservation : musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem, Marseille)
site web
Date représentée : 28 avril 1912
Huile sur toile.
Domaine : Peintures
© Photo RMN - Grand Palais - T. Le Mage
06-524620 / 983.39.14
28 avril 1912 : Bonnot tué par la police à Choisy-le-Roi
Date de publication : Juillet 2008
Auteur : François BOULOC
Un criminel et une police acculés
L’homme cerné de toutes parts qui meurt à Choisy-le-Roi le 28 avril 1912 se trouve là suite à un enchaînement de circonstances fortuites. Jules Joseph Bonnot est né en 1876 dans le Doubs dans une famille ouvrière. Pour son instituteur il est « un élève intelligent mais paresseux, indiscipliné, insolent, constamment chassé de classe, brutal envers ses camarades ». Tôt familiarisé avec la répression policière, professionnellement instable, cet homme actif des milieux illégalistes de la région lyonnaise déploie ses talents dans la mécanique (trafic de voitures volées) ou la fausse monnaie. A l’automne 1911, Bonnot échappe à son arrestation à Lyon. Il fuit alors vers Paris en compagnie d’un camarade italien, Platano, qui meurt, peut-être assassiné par Bonnot, au cours du trajet. Pour un homme déjà aux abois, il semble qu’un point de non retour se cristallise à ce moment-là : il bascule très vite de la délinquance à la criminalité. A Paris, il a tôt fait de trouver des complices parmi les anarchistes se reconnaissant dans l’illégalisme, et pratiquant la « reprise individuelle ». Ces hommes mènent une série de braquages et de meurtres, durant laquelle Bonnot va jusqu’à tuer Jouin, le sous-chef de la Sûreté, lors d’une tentative d’arrestation à Ivry. Ce meurtre, qui exacerbe le ressentiment de forces de l’ordre plusieurs fois jouées les mois précédents, se déroule le 24 avril 1912, quatre jours seulement avant la mort de Bonnot.
La prise en étau du garage Dubois, ultime refuge de Bonnot
Ce tableau se découpe en 4 parties, la scène principale en bas étant surmontée d’une frise composée d’une autre image et de deux petits portraits de part et d’autre. Très réaliste, le style de cette huile sur toile évoque les illustrations de la presse à grand tirage des années 1910. Cet élément autorise, malgré l’anonymat de l’auteur et l’absence d’informations qui en découle, l’hypothèse d’une exposition thématique consacrée aux fameux bandits durant l’entre-deux-guerres. Mal en point après avoir été blessé par l’inspecteur Jouin quelques jours plus tôt, Bonnot se voit offrir l’asile par un certain Dubois, qui possède un garage à Choisy : un lit de fer dans une chambre aux tapisseries fanées et aux meubles douteux, si l’on croit la partie principale du tableau. Vols et maquillages de voitures ont amené Bonnot et Dubois à se côtoyer quelques années auparavant. L’ami est fidèle, mais une dénonciation a tôt fait de faire repérer le hors-la-loi. C’est ainsi qu’à 7 h 30 le dimanche 28 avril 1912, les hommes de la Sûreté et leurs chefs commencent à encercler le bâtiment. Les policiers ne se cachent pas, et une fusillade intense ne tarde pas à éclater. Des renforts sont demandés, afin d’éviter au maximum les pertes du côté des forces de l’ordre. A 9 heures, le préfet de police Lépine arrive en personne sur les lieux, déjà envahis de badauds. Pour ne pas recourir à l’armée et conserver le mérite de la capture de Bonnot par les services de police, il est décidé d’utiliser de la dynamite pour faire sauter la bâtisse. L’explosif est dissimulé dans une charrette à fourrage appartenant à un riverain (encadré supérieur central). Celui-ci insiste pour tenir les rênes de son cheval avec son associé, ce qui explique la présence de deux civils avec les trois hommes en uniforme sur l’image. Après deux ratés, la charge explose enfin, écroulant peu ou prou le bâtiment. Guichard, chef de la « brigade des anarchistes » représenté ici avec une casquette et un veston, s’élance l’arme au poing avec d’autres policiers. Ils trouvent Dubois mort, puis Bonnot agonisant, qui tire une ultime salve depuis son matelas avant d’être réduit au silence.
« Force reste à la loi » ?
« Force reste à la loi » est une phrase extraite d’un article du Petit Journal suivant la mort de Bonnot, où l’on se félicite de ce que la cavale se soit « terminée comme il convenait pour que la morale publique y trouvât son compte : le défi persistant que la sinistre bande portait à la police devenait une menace redoutable. Quand l’armure sociale est ébréchée, c’est tout le sang de l’organisme qui se répand ». Pourtant, des questions sont posées dès l’annonce de la mort de Bonnot. Le déploiement policier (des centaines d’hommes), l’emploi d’explosifs sont mis en cause. La République devait-elle employer les méthodes de Ravachol ? D’un autre côté, face à des individus armés et ne faisant plus cas de leur existence, il est ardu de trouver d’autres issues. Condamné à mort sans procès, Bonnot a écrit peu avant sa mort des mots pesés : « J’ai le droit de vivre. Tout homme a le droit de vivre et puisque votre société imbécile et criminelle prétend me l’interdire, eh bien, tant pis pour vous ». Toutefois, ces ambiguïtés autour des conditions de capture de l’ennemi public numéro un n’entament pas la résolution des policiers, qui, à Nogent, procèderont de la même manière pour éliminer les derniers comparses, Garnier et Valet.
François BOULOC, « 28 avril 1912 : Bonnot tué par la police à Choisy-le-Roi », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 24/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/28-avril-1912-bonnot-tue-police-choisy-roi
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