Siège de Constantine. L'ennemi repoussé des hauteurs de Coudiat-Ati, 10 octobre 1837.
Les colonnes d'assaut se mettent en mouvement lors du siège de Constantine, 13 octobre 1837.
Siège de Constantine. Prise de la ville, 13 octobre 1837
Siège de Constantine. L'ennemi repoussé des hauteurs de Coudiat-Ati, 10 octobre 1837.
Auteur : VERNET Émile-Jean-Horace, dit Horace
Lieu de conservation : musée national du château de Versailles (Versailles)
site web
Date de création : 1838
Date représentée : 10 octobre 1837
H. : 512 cm
L. : 518 cm
huile sur toile
Domaine : Peintures
© RMN - Grand Palais (Château de Versailles) / Franck Raux
MV 2021 - 19-531978
La prise de Constantine
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Mathilde LARRÈRE
La prise de Constantine
En 1834, le roi Louis-Philippe se résout à maintenir la présence française en Algérie, mais choisit de restreindre l’occupation à certaines positions côtières. Le reste du pays est laissé sous le contrôle de princes maghrébins sur lesquels la France espère exercer une suzeraineté, mais auxquels elle s’affronte bientôt. En 1835-1836, l’armée française essuie de cuisantes défaites, dans le marais de la Macta et aux portes de Constantine. Pour effacer la honte de l’échec, les parlementaires réclament une seconde expédition de Constantine. Commencée le 10 octobre 1837, elle s’achève victorieusement le 13, après un sanglant combat de rues et au prix de lourdes pertes humaines.
L’héroïque armée d’Afrique
En 1838, Louis-Philippe passe commande à Horace Vernet de plusieurs toiles consacrée aux principales victoires de la campagne algérienne, destinées au musée historique de Versailles. La prise de Constantine est un des sujets demandés.
Le peintre travaille à partir de dessins croqués sur place par des artistes qui accompagnent le corps expéditionnaire ; il effectue même quelques voyages en Algérie pour observer les champs de bataille. Voilà qui explique l’extrême précision dans le traitement des détails de l’armée en campagne comme des paysages ou de la flore algérienne, précision qui confère à ces toiles une grande valeur documentaire.
Les trois tableaux de la prise de Constantine suivent la progression de l’armée française : le 10 octobre 1837, arrivée tout près de la ville (que l’on aperçoit dans le fond du tableau), elle repousse l’ennemi des hauteurs du cimetière de Coudiat-Ati (d’où les tombes ouvertes au premier plan de la toile) ; le 13 au matin, au pied de la cité, les colonnes d’assaut se mettent en mouvement ; dans la journée, les murs sont pris, permettant à l’armée d’entrer dans Constantine.
Suivant les règles habituelles de la représentation des batailles, ces toiles, pleines de bruit et de fureur, présentent les combats sur le vif. La juxtaposition dense des figures, la multiplication des scènes, la figuration de victimes, contribuent à créer la tension dramatique tout en fixant la geste de l’épopée algérienne qui met sur le devant de la scène les chefs militaires et l’armée d’Afrique. Le peintre s’applique en effet à représenter les principaux officiers. On reconnaît ainsi le duc de Nemours, fils du roi venu récolter quelques lauriers dans la campagne algérienne (comme le feront plus tard ses frères), le général gouverneur Damrémont qui trouvera la mort dans les rues de Constantine, ainsi que de nombreux autres officiers parfaitement identifiables pour les contemporains. La troupe des soldats anonymes reproduit fidèlement la nature composite de cette armée d’Afrique : aux détachements français se mêlent des soldats indigènes, chasseurs d’Afrique ou zouaves, recrutés localement pour épargner le sang et l’argent français.
On remarquera l’utilisation récurrente (dans les différentes toiles, mais parfois au sein d’une même œuvre) d’une même scène : un officier, le bras tendu, brandissant un sabre, un chapeau ou un drapeau, le corps tendu vers la bataille mais la tête tournée vers ses hommes, semble les exhorter à l’action. Il s’agit là d’une pose stéréotypée figurant l’héroïsme : elle fut pour la première fois utilisée par Gros représentant Bonaparte au pont d’Arcole, puis reprise dans toute l’iconographie de la campagne d’Italie ; elle est ensuite maintes fois déclinée dans diverses représentations des Trois Glorieuses. La retrouver ici dans les toiles de Vernet montre bien le succès de cette scène devenue un classique de la représentation des batailles. Elle permettait également aux contemporains de faire le lien entre ces toiles et les représentations de l’épopée napoléonienne, ou même de la victoire du peuple en juillet 1830.
La deuxième expédition de Constantine, victorieuse, est largement exploitée pour rehausser le prestige de l’armée défaite les années précédentes et dépasser les controverses politiques sur le bien-fondé d’une occupation. Les toiles de Vernet font courir Paris pour reconnaître les protagonistes des grandes scènes ; elles flattent l’esprit cocardier des Français encouragés à soutenir la campagne par goût du panache et incités à la comparer à la glorieuse épopée napoléonienne. Elles arracheront à Baudelaire, anticolonialiste et journaliste artistique au Salon où sont présentées les œuvres, un commentaire lapidaire : « Je hais cet homme. »
Charles-Robert Ageron Histoire de l’Algérie contemporaine Paris, PUF, 1979.Denise Bouché Histoire de la colonisation française , tome II « Flux et reflux, 1815-1952 »Paris, Fayard, 1991.André Corvisier (dir.) Histoire militaire de la France , tome II « 1715-1871 »Paris, PUF, 1992.J.Martin L’Empire renaissant, 1789-1871 Paris, Denoël, 1987.Jean Meyer, J.Tarrade et Annie Rey-Goldzeiguer Histoire de la France coloniale tome I « La conquête », Paris, Armand Colin, coll. « Agora Pocket », 1996.Christian-Marc Bosséno « Bonaparte de Lodi à Arcole : généalogie d’une image de légende », in Annales historiques de la Révolution française 1998, n° 3.
Mathilde LARRÈRE, « La prise de Constantine », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 24/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/prise-constantine
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