Aller au contenu principal
Intérieur d'un atelier de canut

Intérieur d'un atelier de canut

La crise lyonnaise. Intérieur d'un tisseur de soie. (in Le Monde illustré, 3 mars 1877)

La crise lyonnaise. Intérieur d'un tisseur de soie. (in Le Monde illustré, 3 mars 1877)

Intérieur d'un atelier de canut

Intérieur d'un atelier de canut

Auteur : ALEXIS Balthazar

Lieu de conservation : musée Gadagne (Lyon)
site web

Date de création : XIXe siècle

Date représentée :

H. : 44 cm

L. : 34 cm

Ateleir situé dans la montée des Épies.

Huile sur carton.

Domaine : Peintures

© Xavier Schewbel -Musée Gadagne - Lyon

Lien vers l'image

Inv. 97.3

  • Intérieur d'un atelier de canut

Intérieurs de canuts

Date de publication : Août 2005

Auteur : Hélène DELPECH

Intérieurs de canuts

Intérieurs de canuts

La Fabrique de soieries a été créée en 1536 par François Ier. Elle a bénéficié d’abord de l’élan économique apporté par les foires au XVe siècle. Le colbertisme, le rayonnement culturel de la France ont favorisé son développement.

Après les difficultés de l’époque révolutionnaire, le blocus lui a ouvert les cours européennes. Pendant tout le XIXe siècle, elle a continué d’exporter en Europe et jusqu’en Amérique. Tout en dépendant du grand commerce pour la clientèle et pour la matière première (venue du sud-est voisin mais aussi d’Italie et d’Asie), le tissage est réalisé dans de petits ateliers familiaux. Mais les crises qui se succèdent vont transformer les modes de production.

Toutes deux montrent un atelier qui est aussi lieu d’habitation. Le métier tient le maximum de place au sol et en hauteur, ce qui permet d’aménager la « suspente » sous le plafond. Chats et souris cohabitent avec la famille, ainsi que l’habituel oiseau en cage (Selon une tradition locale sa vitalité permet de juger de l’absence de toute émanation toxique de gaz carbonique). Mais les situations sont bien différentes.
Les couleurs, les objets traités comme des natures mortes accrochant la lumière, donnent au tableau un air de prospérité. Les enfants jouent. Outre la jeune fille à la balustrade, cinq personnes sont au travail. La tisseuse assise sur la banquette d’un métier d’unis tire le cordon pour lancer la navette. Le tisseur, armé de forces, procède à quelque réparation. Trois femmes préparent les canettes sur des mécaniques différentes.
Situé sur la rive droite de la Saône, vieux quartier du tissage, l’atelier est sous le toit, probablement à flanc de colline pour recevoir toute la lumière. Le mobilier, les gravures au mur, le buste, la plante, révèlent une certaine aisance et le goût de la beauté, tandis que le bénitier et le buis indiquent de pieuses traditions. Les vêtements, sauf le pantalon et la casquette du garçon, prolongent la mode du XVIIIe siècle. Les bijoux sont un patrimoine qu’on pourra mettre en gage dans les moments difficiles (Tous les détails concordent avec les inventaires après décès ou les contrats de mariage). D’ailleurs le pain, le poisson et les légumes témoignent de la frugalité des repas.
Ce tableau, dont on ne connaît ni l’origine ni la date précise, montre une canuserie à l’ancienne avec peut-être le désir de célébrer des temps heureux.

En revanche, la gravure est une œuvre de circonstance pour faire connaître la crise très grave qui sévit alors à Lyon. L’absence de couleur, la sécheresse des lignes, le mobilier et la suspente rudimentaires, l’accablement des personnages, donnent une impression de tristesse et de pauvreté. Les enfants ne jouent pas. Le métier est arrêté. Il est surmonté de la mécanique Jacquard pour le tissage des façonnés. Il s’agit d’un de ces ateliers installés à tous les étages des immeubles construits depuis la Restauration sur les terrains sécularisés de la Croix-Rousse. Ils sont mieux adaptés aux dimensions des nouveaux métiers, mieux aérés, mieux éclairés par leurs grandes fenêtres que l’habitat vétuste des bords de la Saône et de la Presqu’île. Mais en 1877 il n’y a pas de travail.

La situation des chefs d’atelier n’est pas uniforme, mais leur bénéfice est étroit, entre les frais de montage des métiers (qui leur incombent) et le salaire fixé au plus bas par les négociants. Faute de réserves, le chômage les frappe durement, ainsi que la main-d’œuvre nombreuse, en partie féminine employée aux tâches annexes.
Au cours du XIXe siècle, la production a progressé malgré les crises fréquentes et passagères dues aux variations des cours, aux aléas politiques, à la concurrence étrangère mais aussi des tisseurs entre eux : 18 000 métiers en 1810, 27 000 en 1830, 60 000 en 1850, 100 000 à 120 000 en 1877.

Ils sont de plus en plus nombreux à s’installer à la campagne, pour les unis qui demandent peu de savoir-faire, sont peu payés et sont à la mode. Les beaux façonnés, fleurons de la Croix-Rousse, sont des produits de luxe très sensibles aux secousses du marché. En 1877 une forte hausse des prix de la soie grège, à la suite de récoltes désastreuses des cocons, s’accompagne d’une chute des commandes. Les négociants sont endettés et chargés de stocks à écouler. Les métiers sont arrêtés. A cette crise grave succède la longue dépression de la fin du siècle. La Fabrique devra évoluer, abandonner peu à peu l’artisanat pour la production industrielle.

Évolution dont ces deux images sont aussi symboliques : une commande privée à un artiste local qui s’inspire des maîtres du passé ; les débuts de la grande presse moderne avec un hebdomadaire parisien qui envoie un enquêteur sur place et se soucie d’illustrer l’information.

Justin GODART Travailleurs et métiers lyonnais 1909, rééd.Marseille, Lafitte, 1979.

Maurice GARDEN Lyon et les Lyonnais au XVIIIe siècle Centre lyonnais d’histoire économique et sociale, 1970.

Yves LEQUIN Les Ouvriers de la région lyonnaise 1848-1914 Presses Universitaires de Lyon, 1977.

Françoise BAYARD et Pierre CAYEZ (dir.) Histoire de Lyon du XVIe siècle siècleà nos jours t.II, Horwath, 1990.

Hélène DELPECH, « Intérieurs de canuts », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 15/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/interieurs-canuts

Anonyme (non vérifié)

La montée des Épies est sur la Rive-Droite de Saône, pas à la Croix-Rousse… Ce serait donc plutot un atelier ancien, et non un récent de la Croix-Rousse

sam 21/02/2015 - 21:13 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Rue transnonain, le 15 avril 1834

Rue transnonain, le 15 avril 1834

Les premières années du règne de Louis-Philippe sont marquées par divers mouvements populaires dont la répression fait rapidement retourner à l’…

Rue transnonain, le 15 avril 1834
Rue transnonain, le 15 avril 1834
Rue transnonain, le 15 avril 1834
Aspects de la misère urbaine au XIX<sup>e</sup> siècle

Aspects de la misère urbaine au XIXe siècle

Plusieurs événements, sous la monarchie de Juillet, ont éveillé la réflexion de la bourgeoisie au sujet de la misère populaire : la révolution de…

Aspects de la misère urbaine au XIX<sup>e</sup> siècle
Aspects de la misère urbaine au XIX<sup>e</sup> siècle
Hygiénisme et urbanisme : le nouveau centre de Villeurbanne

Hygiénisme et urbanisme : le nouveau centre de Villeurbanne

Au cours du XIXe siècle, les conditions de vie misérables réservées aux ouvriers dans les viilles et les préoccupations des hygiénistes…

Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831

Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831

Le paupérisme

L’arrivée de Louis-Philippe au pouvoir en juillet 1830 suscite le ressentiment des républicains, très vite doublé de la question…

Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831
Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831
La Révolte des canuts

La Révolte des canuts

Le 20 novembre 1831 l’association mutuelle des chefs d’atelier de soierie décide la grève générale pour obliger les fabricants à respecter le…

La Révolte des canuts
La Révolte des canuts
Intérieurs de canuts

Intérieurs de canuts

La Fabrique de soieries a été créée en 1536 par François Ier. Elle a bénéficié d’abord de l’élan économique apporté par les foires au…

Intérieurs de canuts
Intérieurs de canuts
La politique autoritaire de Casimir Perier

La politique autoritaire de Casimir Perier

Un libéral

Casimir Perier (1777-1832) fut l’un des hommes politiques les plus en vue de la Restauration et des tout débuts de la monarchie de…

L’Industrie de la soie sous la Monarchie de Juillet

L’Industrie de la soie sous la Monarchie de Juillet

Le 24 août 1841, le plus jeune fils de Louis-Philippe visite l’atelier du tisseur Carquillat.

Dix ans auparavant, son frère, le duc d’…