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Pierre-Paul Riquet, baron de Bonrepos

Pierre-Paul Riquet, baron de Bonrepos

Tracé du canal du Languedoc en 1716

Tracé du canal du Languedoc en 1716

Pierre-Paul Riquet, baron de Bonrepos

Pierre-Paul Riquet, baron de Bonrepos

Date de création : 1651-1675

H. : 86,5 cm

L. : 68 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© GrandPalaisRmn (Château de Versailles) / Gérard Blot

Lien vers l'image

MV5526 - 10-538811

Le canal du Midi de Pierre-Paul Riquet

Date de publication : Mars 2019

Auteur : Stéphane BLOND

Le canal de Monsieur Riquet

Grand serviteur de l’État exerçant une série de charges publiques, comme le suggère la robe noire de ce portrait, Riquet n’est pas un précurseur en matière de construction d’un canal en Languedoc. Avant l’acceptation de son programme au début du règne personnel de Louis XIV, d’autres projets, comme celui de Bernard Arribat se succèdent. Resté anonyme, ce tableau rend donc hommage au porteur du projet retenu, en soulignant la place de choix acquise par les techniciens. Il appartient à la collection de la Compagnie du Midi fondée en 1852, qui en fait don au Château de Versailles en 1900. Non daté, il semble copié sur un tableau réalisé par le peintre Florent de La Mare-Richart (v. 1630-1718), également décliné en gravure en 1672.

La carte du géographe Nicolas de Fer (1646-1720) permet d’embrasser l’étendue du canal. Éditeur et marchand de cartes et d’estampes, ce dernier devient géographe ordinaire du roi en 1702. Nicolas de Fer est l’auteur d’une série de cartes continentales et provinciales, dont une Carte du gouvernement général du Languedoc. Sa carte est produite plus de trente ans après l’inauguration de l’infrastructure, alors qu’il mène un inventaire cartographique des territoires du globe. Grâce à elle, le cartographe, et le pouvoir qu’il représente, rappellent qu’il s’agit d’un chantier modèle au sein du continent européen. Ainsi, cette carte particulière gravée par Starckman, s’inscrit dans une perspective documentaire, afin d’entretenir la mémoire d’un édifice majeur du royaume, tout en faisant la publicité des savoirs techniques mis en œuvre. Le cartouche et la légende décrivent le contenu : « Le Canal Royal de Languedoc, pour la Jonction des deux Mers, Océan et Méditerranée. Par N. de fer. A Paris, Chez le Sr de Fer dans l’Isle du Palais sur le Quai de l’Horloge à la Sphère royale avec Privilège du Roy. 1716 ». Comme le suggère ce titre, le canal permet de relier la mer Méditerranée, depuis Sète, à la mer Océane (Océan atlantique), via Toulouse et la Garonne. La partie supérieure de la gravure contient le tracé de l’ouvrage, avec les localités desservies qui bénéficient de nouvelles retombées économiques.

Une vitrine de l’ingénierie française

Le chantier du canal du Languedoc illustre le savoir-faire tardif, mais réel, des ingénieurs français en matière de construction de voies d’eau artificielles, sur le modèle des canaux italiens ou flamands. Sur le plan technique, le chantier languedocien comporte plusieurs défis relevés par Riquet et son adjoint François Andréossy (1633-1688). En effet, le canal possède une configuration particulière, car il est dépourvu d’une alimentation par des cours d’eau affluents ou des étangs, ce qui implique la conception de bassins. La mesure de génie tient au recueil des eaux de la Montagne noire dans le bassin de Naurouze, représenté sur la carte, et installé à la ligne de partage des eaux, ce qui assure la navigabilité de l’ouvrage en toute saison.

D’une longueur de 240 kilomètres, le canal comprend au total une soixantaine d’ouvrages d’art qui en font un chef-d’œuvre d’architecture et de technicité. La carte de Nicolas de Fer retient sept édifices novateurs. Le tunnel du Malpas, le pont canal de Repudre ou l’écluse ronde d’Agde participent au renom de l’édifice et des techniciens qui les conçoivent. Cette carte entretient une gloire sur laquelle le pouvoir royal capitalise, à l’appui de multiples supports de communication : tableaux, médailles ou gravures. C’est ainsi qu’une autre carte de l’édifice figure en bonne place sur le tableau d’Henri Testelin pour la réception de Louis XIV à l’Académie royale des sciences, en témoignage du savoir acquis par les savants français. Pour l’État central, c’est aussi une façon d’amoindrir l’influence de l’assemblée du Languedoc et de ramener au roi l’essentiel de l’initiative, alors que la province participe financièrement à l’opération.

La politique des voies d’eau

Avec le palais de Versailles, le Canal royal de Languedoc, actuel Canal du Midi, est l’un des chantiers emblématiques du règne de Louis XIV, d’où la nécessité de rappeler la grandeur du projet. Sa réalisation est attachée au nom de l’entrepreneur languedocien Pierre-Paul Riquet (1609-1680). Baron de Bonrepos, grand voyageur et fermier général des Fermes du Languedoc. Celui-ci devient le promoteur du canal auprès de la monarchie, avant d’assurer la direction des travaux. Plus qu’à l’administrateur, ce portrait rend surtout hommage au concepteur de génie et au technicien qui obtient ainsi une stature officielle et une renommée qui dépassent de beaucoup les limites du Languedoc.

La carte de l’édifice promeut quant à elle la politique d’investissement de la monarchie en faveur des voies d’eau au XVIIe siècle. Dans ce domaine, une première expérimentation est lancée au cours du règne du roi Henri IV et s’achève en 1642. Le canal de Briare assure alors la jonction entre la Loire et la Seine, avec l’élargissement de l’aire commerciale des deux fleuves. Au début du règne de Louis XIV, la voie d’eau reste plébiscitée. Le contexte politique et économique est favorable, grâce au retour de la paix et aux réformes mercantilistes de Jean-Baptiste Colbert (1619-1683). La représentation de Nicolas de Fer permet de se faire une idée de l’immensité du territoire irrigué et désenclavé par le canal qui forme une artère économique de premier choix.

Le 15 novembre 1662, Riquet présente son plan à Colbert. Sa faisabilité est examinée pendant deux ans, avec un devis global estimé à 5 millions de livres. En 1665, des travaux expérimentaux sont lancés et l’année suivante, un édit royal autorise la construction de l’édifice. Relié aux « deux mers », le canal ouvre de nombreux débouchés aux productions locales, tout en sécurisant les trajets commerciaux qui évitent ainsi le détroit de Gibraltar. Toutefois, ces deux œuvres masquent les nombreux problèmes posés par le chantier. Le creusement est lent, car il s’accompagne de multiples résistances et difficultés financières. En outre, Riquet meurt le 1er octobre 1680, huit mois avant l’achèvement des travaux qui sont menés à leur terme par son fils Jean-Mathias, pour un budget global avoisinant désormais les 20 millions de livres !

Antoine-François ANDRÉOSSY, Histoire du canal du Midi, ou canal de Languedoc, Paris, Imprimerie de Crapelet, 1804.

Michel COTTE, Le Canal du Midi : « Merveille de l’Europe », Paris, éditions Belin-Herscher, 2003.

Monique DOLLIN du FRESNEL, L’incroyable aventure du Canal des Deux-Mers, Bordeaux, éditions Sud Ouest, 2012.

Pierre PINON, Canaux : Rivières des hommes, Paris, Rempart-Desclée de Brouwer, 1995.

Stéphane BLOND, « Le canal du Midi de Pierre-Paul Riquet », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 14/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/canal-midi-pierre-paul-riquet

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