La cavalerie française à la bataille de Sedan.
Le général Margueritte mortellement blessé à Floing (bataille de Sedan), le 1er septembre 1870.
La cavalerie française à la bataille de Sedan.
Auteur : ANONYME
Lieu de conservation : musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem, Marseille)
site web
Date représentée : 01 septembre 1870
Domaine : Estampes-Gravures
© Photo RMN - Grand Palais - F. Raux
07-517533 / 53.86.1124C
L'emblématique naufrage de la cavalerie française à Sedan
Date de publication : Août 2008
Auteur : François BOULOC
Les désastreuses batailles de 1870
La guerre de 1870 est entamée par la France pour des raisons complexes. Il est difficile en effet de dire avec précision quelles sont les attentes du pays et du régime impérial au moment d’affronter la redoutable Prusse bismarckienne. Pour cette dernière, assise sur des succès probants au cours des années 1860 (contre l’Autriche notamment), l’objectif est d’achever l’unité allemande en ralliant à la Confédération d’Allemagne du Nord, présidée par la Prusse, les États catholiques d’Allemagne du Sud, restés jusque-là en marge du processus d’unification. Elle vise aussi à affaiblir le voisin français, dirigé par Napoléon III depuis deux décennies. Militairement, cette période se traduit par une alternance de succès, comme en Crimée (1854-1856) ou en Italie (1859-1860), et de revers retentissants (expédition du Mexique (1863). Rien dans ce bilan contrasté ne permet donc de garantir raisonnablement une victoire aisée contre l’Allemagne. En outre, l’empereur est largement plébiscité par la population française le 8 mai 1870. L’idée parfois avancée d’une guerre lancée pour redorer le blason du régime est donc pour le moins incertaine. Peut-être une part de forfanterie jointe au jeu subtilement maîtrisé par Bismarck des engrenages diplomatiques suffit-elle à expliquer le déclenchement d’un conflit qui va rapidement tourner en marche triomphale de la Prusse. En effet, après la victoire française inaugurale du 2 août à Sarrebruck, les défaites s’enchaînent pour la France.
Les atours héroïques d’une défaite
Durant le mois d’août 1870, les revers français conduisent Napoléon III et Mac-Mahon à se replier vers la citadelle de Sedan. Les batailles livrées, pour être perdues, n’en sont pas moins parfois empreintes de panache comme les charges de Reichshoffen, le 6 août, où les cuirassiers français s’élancent en vain sur Morsbrunn et Elsasshausen. De tels faits d’armes héroïques se reproduisent à Sedan, comme le montre la gravure où les cavaliers se jettent sabre au clair dans le tumulte fumant, sans prêter attention aux pertes nombreuses (hommes à terre au premier plan, cavalier reculant sous l’impact à droite). Fin août, les troupes prussiennes contraignent le maréchal Bazaine à se replier à Metz et assiègent la ville, empêchant tout secours. Au 1er septembre, la situation des armées françaises est donc on ne peut plus délicate.
À Sedan, comme le dit la légende de la gravure, « dès 11 heures du matin, toute la partie nord-ouest du champ de bataille était battue par un épouvantable feu d’artillerie », expression de la supériorité militaire et stratégique de la Prusse. Le général Margueritte, commandant la 1re division de la réserve de cavalerie, doit alors partir en reconnaissance, et « reçoit une blessure mortelle », tandis que « ses officiers tombent autour de lui ». La charge de ces hommes est restée célèbre, l’héroïsme dont l’image donne une idée venant adoucir les plaies de la défaite. Le cas de Margueritte n’est d’ailleurs pas isolé : « Sur 158 généraux et maréchaux de l’armée du Rhin, 16 sont tués entre le 4 août et le 2 septembre, et 45 blessés : soit un taux de perte de 38,6 %. » (S. Audoin-Rouzeau, 1870, la France dans la guerre, p. 106) La mort de Jean-Auguste Margueritte constitue un symbole fort de la mauvaise tournure qu’ont pris les affrontements. De ce militaire habitué aux charges coloniales, qui n’a rien d’un va-t-en-guerre, 1870 va incidemment faire un héros. Ainsi apparaît-il dans la peinture de ses derniers instants par J. A. Walker : dans un ultime effort, soutenu par ses aides de camp dont l’un porte sa longue-vue, le général gravement atteint étend le bras droit pour donner ses dernières instructions. Sa mise en valeur résulte notamment du traitement plus flou dont font l’objet les deux groupes de cavaliers représentés à l’arrière-plan. Cette intention du peintre semble plus prégnante que le souci d’une reconstitution fidèle : le général a en effet été atteint d’une balle dans la bouche, ce que rien dans le tableau ne peut laisser deviner.
Il semble que la postérité ait quelque peu oublié le général Margueritte, la guerre de 1870 étant au vrai un événement lui-même éclipsé par les deux guerres mondiales. Pourtant, des traces encore visibles aujourd’hui attestent la place accordée dans les années ayant immédiatement suivi les hostilités aux « grands hommes » de cette défaite française. À Montpellier, Rennes ou Nantes, des avenues portent encore le nom de l’infortuné général, sans oublier celle qui lui est attribuée à proximité du Champ-de-Mars à Paris. Dans la perspective patriotique qui s’affirme comme un des principaux étayages de la IIIe République, 1870 se résume d’une part à l’incurie impériale d’une part et, d’autre part, à des actes héroïques isolés. À travers ces derniers, on entend donner à voir la permanence de certains traits nationaux français, parmi lesquels le courage dans les situations désespérées tient une bonne place. Parlant des derniers exploits du défunt officier et de ses hommes, le général Boulanger écrira : « Le roi Guillaume, du point où il était placé, put assister à cet inutile sacrifice de la cavalerie française, et reconnaître la bravoure de ces régiments » (Georges BOULANGER (Général), L’Invasion allemande, p. 1338). À côté d’un Roland à Roncevaux, ou d’un Turenne à Salzbach, le général Margueritte et ses intrépides cavaliers peuvent aussi faire figure d’icônes édifiantes pour un pays qui, tout en pansant ses plaies, se projette à loisir dans une future revanche.
Georges BOULANGER (Général), L’Invasion allemande, tome II, Paris, Jules Rouff et Cie, 1888.
Alain PLESSIS, De la fête impériale au mur des Fédérés, 1852-1871, Paris, Le Seuil, 1979.
Stéphane PRZYBYLSKI, La Campagne militaire de 1870, Metz, Éditions Serpenoise, 2004.
François ROTH, La Guerre de 1870, Paris, Fayard, 1990.
Stéphane AUDOIN-ROUZEAU, 1870, la France dans la guerre, Paris, A.Colin, 1989.
François BOULOC, « L'emblématique naufrage de la cavalerie française à Sedan », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 21/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/emblematique-naufrage-cavalerie-francaise-sedan
Lien à été copié
Découvrez nos études
9 janvier 1873 : mort de Napoléon III à Camden Place
Le 9 janvier 1873 mourrait dans la résidence de Camden House, à Chislehurst, près…
L'Enterrement insolite du Second Empire
Charles Louis Napoléon Bonaparte, dit Napoléon III (1808-1873) est un neveu de Napoléon Ier…
Une armée en mal d’idéaux
Regards sur la bataille de Sedan ( 1er septembre 1870)
La guerre de 1870 voit s’affronter deux armées inégalement structurées. Au cours des années 1860, la…
L'emblématique naufrage de la cavalerie française à Sedan
La guerre de 1870 est entamée par la France pour des raisons complexes. Il est difficile en effet de dire avec…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel