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Ascension de Messieurs Charles et Robert, aux Tuileries, le 1er décembre 1783

Ascension de Messieurs Charles et Robert, aux Tuileries, le 1er décembre 1783

Date représentée : 01 décembre 1783

H. : 113,5 cm

L. : 85,5 cm

Huile su toile

Domaine : Peintures

© CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet

Lien vers l'image

P.484

Innovation et progrès au XVIIIe siècle

Date de publication : Novembre 2012

Auteur : Pierre-Yves BEAUREPAIRE

Invention technique et progrès de l’humanité

Originaires d’Annonay, les frères Montgolfier réussissent les premiers à faire voler un aérostat – en privé en décembre 1782, en public en juin 1783. Ouvrant de nouvelles perspectives pour l’homme, les vols de ballons d’étoffes gonflés d’air chaud ou d’hydrogène suscitent un prodigieux enthousiasme. Lorsque, le 1er décembre, Jacques-Alexandre Charles et Marie-Noël Robert prennent eux-mêmes place – les premiers vols embarquaient des animaux – à bord d’un ballon à hydrogène dans les jardins des Tuileries à Paris, le succès populaire est énorme. Le comte de Ségur commente ainsi le vol dans ses Mémoires : « Mais le courage des aéronautes et l’impatience d’une foule immense appelée à jouir de cet essor du génie, l’emportèrent sur toute défense. La corde fut coupée, le globe s’éleva majestueusement, et nous vîmes les navigateurs aériens parcourir intrépidement la route du ciel. […] Après ce triomphe du génie sur la nature, après cette journée mémorable, chacun des spectateurs se sentait comme grandi ; l’impossible ne paraissait plus un mot français ; on eût dit que toutes les bornes venaient de disparaître devant l’orgueil ambitieux de l’esprit humain. Les jours suivants, on entendait dans tous les salons de Paris tout ce que l’imagination peut ajouter à la vérité […] car même lorsque la science et la raison font les plus grands pas, la folie en profite encore pour étendre son domaine. » La science suscite alors un vif engouement tant parmi les élites d’Ancien Régime qu’au sein des strates intermédiaires du tiers état. Peindre la science en marche, c’est reconnaître et diffuser son exceptionnelle popularité.

Le succès de l’aérostation

Ce tableau anonyme est l’une des très nombreuses représentations des premiers vols de ballon en 1783-1784. Partout, il s’agit d’immortaliser la scène et l’enthousiasme qu’elle suscite. L’architecte de Wailly dessine avec d’autres concurrents le projet d’un monument commémoratif du vol effectué aux Tuileries. Le choix d’un jardin où se promènent non seulement les représentants de la bonne société (les couples de dos au premier plan), mais un plus large public rangé le long des allées témoigne de l’intégration de ces démonstrations à la fois techniques, mondaines et populaires au cœur de l’espace public.

Les enjeux de la « ballomanie »

Le ballon devient le symbole du progrès, son envol un temps de fête marqué dans ces années prérévolutionnaires par l’utopie de la rencontre harmonieuse entre les élites éclairées et le peuple. Les démonstrations sont particulièrement prisées aussi bien dans les salons aristocratiques que sur les boulevards et les promenades publiques.

L’allégresse populaire rencontre le goût des « amateurs » de la bonne société pour la science et les démonstrations techniques, tandis que l’aérostation profite de la révolution que connaît alors la chimie. Ici le progrès scientifique échappe aux laboratoires et au contrôle de l’Académie royale des sciences pour investir l’espace public. Les villes rivalisent pour organiser les prochains vols de ballons, et le phénomène déborde rapidement les frontières du royaume. Le pouvoir monarchique n’est pas en reste. Il veut se montrer sous les traits d’un gouvernement bienveillant qui sait récompenser le génie national au sortir de la guerre d’Indépendance américaine. Un Te Deum est célébré le 14 décembre 1783, les Montgolfier sont anoblis, récompensés par l’Académie des sciences, et leur manufacture reçoit la qualité et les privilèges de « manufacture royale ». Les arts y compris la peinture sont donc convoqués pour célébrer le spectacle de la science.

· Nicolas-Marie-Felix BODARD DE TEZAY, Le Ballon ou la Physicomanie. Comédie en un acte et en vers, Paris, Théâtre des variétés amusantes le 13 novembre 1783, Paris, 1783.

· Bruno BELHOSTE, Paris savant : parcours et rencontres au temps des Lumières, Paris, Armand Colin, 2011.

· Marie THÉBAUD-SORGER, L’Aérostation au temps des Lumières, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », 2009.

· Marie THÉBAUD-SORGER, Une histoire des ballons. Invention, culture matérielle et imaginaire, Paris, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, coll. « Temps & espace des arts », 2010. 

Académie : L’Institut de France est créé par la loi du 25 octobre 1795 sur l’organisation de l’instruction publique. Au sein du palais de l’Institut de France, travaillent cinq académies : l’Académie française (fondée en 1635), l’Académie des inscriptions et belles-lettres (fondée en 1663), l’Académie des sciences (fondée en 1666), l’Académie des beaux-arts (créée en 1816 par la réunion de l’Académie royale de peinture et de sculpture, fondée en 1648, de l’Académie de musique, fondée en 1669, et de l’Académie d’architecture, fondée en 1671) et l’Académie des sciences morales et politiques (fondée en 1795, supprimée en 1803 et rétablie en 1832). (Source : https://www.institutdefrance.fr/les-cinq-academies/.)

Pierre-Yves BEAUREPAIRE, « Innovation et progrès au XVIIIe siècle », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 29/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/innovation-progres-xviiie-siecle

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