Populations abandonnées, faites confiance au soldat allemand !
Auteur : MATEJKO Théo
Lieu de conservation : musée de l’Armée (Paris)
site web
Date de création : 1940
Date représentée : 1940
H. : 123 cm
L. : 87 cm
Papier, impression
Domaine : Affiches
© Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN - Grand Palais - Photo musée de l'Armée
09-541603 / Gg 1
La propagande allemande
Date de publication : Avril 2012
Auteur : Alexandre SUMPF
La première affiche de la propagande allemande diffusée en France
L’armistice du 22 juin 1940 rend officielle la défaite de la France face aux nazis. La « zone occupée », qui correspond à la moitié nord et à la côte atlantique, passe sous occupation allemande, tandis que la « zone libre », située au sud de la Loire, relève directement du gouvernement de Vichy. Si la souveraineté française s’exerce en principe sur l’ensemble du territoire (sauf en Alsace et en Moselle), dans les faits, la puissance occupante soumet le pays à sa domination et à ses décisions.
Réalisée et diffusée à grande échelle dès le début de l’Occupation, l’affiche Populations abandonnées, faites confiance au soldat allemand ! constitue justement la première affiche éditée en France par le régime nazi dans le cadre de sa propagande.
À ce titre, elle présente une valeur documentaire inappréciable, qui nous renseigne sur la politique de diffusion idéologique que le IIIe Reich entend mettre en œuvre pour conserver et organiser son nouveau pouvoir en France. Hautement significative, elle permet aussi de mesurer les changements survenus dès les premiers jours de la défaite. Le graffiti « Et quoi encore ?.. EC. 1940 » qui lui a été ajouté pose quant à lui la question de la réaction de la population française à ce nouvel état de fait.
Une scène idéalisée et « familiale »
Dessinée par l’illustrateur Théo Matejko (1893-1946), l’affiche Populations abandonnées, faites confiance au soldat allemand ! a été imprimée en grand format (123 x 87 cm) et placardée sur de nombreux murs dès la fin du mois de juin 1940.
Le dessin central est accompagné d’un slogan écrit en grandes lettres noires et rouges, disposé en haut (Populations abandonnées,) et en bas (faites confiance au soldat allemand !) de l’image. Cette dernière représente un soldat allemand (vêtu de son uniforme de la Wehrmacht) en compagnie de trois petits enfants français. Beau, grand, solide, les cheveux et les yeux clairs, ce soldat « idéal » selon les critères nazis est aussi souriant et bienveillant. Il porte dans ses bras un garçonnet qui mange avec joie une tartine, tandis que, debout à ses côtés, deux fillettes à la fois timides et désormais rassurées regardent le garçon (et la tartine) avec envie. Tracé au charbon, le graffiti « Et quoi encore ?.. EC. 1940 » est l’œuvre de E. Criks, bijoutier à Paris, qui a conservé cette affiche jusqu’à la fin de la guerre.
De l’ennemi au recours
Écrite en français et directement destinée à la population, l’affiche Populations abandonnées, faites confiance au soldat allemand ! entend faire comprendre à cette dernière que le soldat allemand ne doit désormais plus être considéré comme un ennemi, mais comme un recours protecteur et nourricier pour les familles françaises « abandonnées » par leurs « chefs ».
Populations abandonnées (le constat accablant constitue, en haut, la première partie du message) en effet, puisque la défaite de juin a entraîné la retraite désordonnée de l’armée ainsi que l’exode massif de civils fuyant les nazis (faisant des routes du nord de la France un gigantesque chaos), tandis que le gouvernement, les administrations et les autorités locales fuyaient ou tentaient de fuir vers le sud, laissant les populations démunies et désorganisées face à l’occupant.
Soucieuses de rétablir l’ordre au plus vite, les autorités allemandes entendent donc rassurer les civils (faites confiance au soldat allemand !) en montrant par l’image que l’occupation peut être bénéfique, bienveillante (et même préférable à la situation antérieure) pour peu que l’on accepte les nouveaux chefs du pays, plus solides et plus fiables que les anciens.
Sans être forcément représentatif de l’état d’esprit de l’ensemble des Français, le graffiti « Et quoi encore ?.. EC. 1940 » montre quant à lui que certains n’acceptent pas l’occupation nazie.
AZEMA, Jean-Pierre, De Munich à la Libération, 1938-1944, Paris, Éditions du Seuil, 1979.
AZEMA, Jean-Pierre et Wieviorka, Olivier, Vichy, 1940-1944, Paris, Perrin, 1997.
LABORIE, Pierre, Les Français sous Vichy et l'Occupation, Paris, Milan, 2003 PAXTON, Robert, La France de Vichy, 1940-44, Paris, Éditions du Seuil, 1973.
ROSSIGNOL Dominique, Histoire de la propagande en France de 1940 à 1944, Paris, PUF, 1991.
Alexandre SUMPF, « La propagande allemande », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 13/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/propagande-allemande
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Mallou
ça m'as beaucoup aidé pour l'histoire des arts, merci !
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