Tir mortel sur l'archiduc François-Ferdinand d'autriche et son épouse le 28 juin 1914
Arrestation de l'assassin Gavrilo Princip
Tir mortel sur l'archiduc François-Ferdinand d'autriche et son épouse le 28 juin 1914
Auteur : SCHWORMSTÄDT Felix
Lieu de conservation : Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz (BPK, Berlin)
site web
Date de création : 1914
Date représentée : 28 juin 1914
Dessin publié dans le Leipziger Illustrirte Zeitung
Domaine : Dessins
© BPK, Berlin, dist. RMN - Grand Palais / image BPK
12-546639 / 00010595
L’attentat de Sarajevo
Date de publication : Septembre 2018
Auteur : Alexandre SUMPF
Un retentissement international
Survenu dans un contexte international tendu entre les grandes puissances européennes, l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, héritier de l’Empire austro-hongrois, et de son épouse Sophie Chotek, duchesse de Hohenberg, le 28 juin 1914 connaît un immense retentissement dans tous les pays européens. Actualités filmées, radios ou journaux font leurs gros titres sur cet événement, animant alors toutes les discussions, suscitant d’innombrables débats ou nourrissant diverses conjectures sur la suite politique et diplomatique qui lui sera donnée.
Sans entrer ici dans les controverses sur le rôle exact qu’a pu jouer cet attentat dans le déclenchement du premier conflit mondial, il convient d’en rappeler brièvement le récit (aujourd’hui encore partiellement incertain). Préparé et perpétré par plusieurs nationalistes serbes de Bosnie qui refusent la domination austro-hongroise en Bosnie-Herzégovine (annexée en 1908), le déroulé de cet attentat est assez improbable. Un des terroristes n’ose pas faire feu ; un autre lance sa bombe, qui rebondit sur la capote de la voiture avant d’exploser, manquant ainsi sa cible ; et Gavrilo Princip lui-même est mal placé lors d’un premier passage de François-Ferdinand. Revenu à l’hôtel de ville de Sarajevo, l’archiduc insiste pour poursuivre la visite officielle et aller visiter des blessés du matin. Une modification de l’itinéraire initial est bien prévue, mais le chauffeur n’en est pas informé. Lorsque l’on s’aperçoit de l’erreur, on arrête le convoi pour le faire changer de route, offrant une nouvelle opportunité à Princip qui s’avance, grimpe sur le marchepied du véhicule et fait feu deux fois sur le couple, tuant François-Ferdinand et sa femme.
Ce dessin – paru quelques jours après l’attentat dans le Leipziger Illustrirte Zeitung, un périodique hebdomadaire à large tirage (cent mille exemplaires en 1914) – et cette photographie anonyme nous renseignent à leur manière sur ce moment historique.
L’attentat et son auteur
Originellement en couleurs mais ici proposé en noir et blanc, Tir mortel sur l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche et son épouse le 28 juin 1914 est un dessin de Felix Schwormstädt (1870-1938), peintre et célèbre illustrateur allemand. Avec un grand sens du mouvement et une certaine théâtralisation (voir l’expression de l’archiduchesse, en jeune femme vulnérable et apeurée), l’artiste choisit le moment critique et décisif, celui où Princip se précipite vers la voiture pour faire feu sur François-Ferdinand et sa femme – leurs visages sont fidèles à la réalité, mais les costumes ne correspondent pas à ceux portés ce jour-là. On note également une certaine esthétisation du criminel (le bras puissant, le costume et la coupe de cheveux modernes, la posture déterminée et assez virile). À l’arrière-plan, une foule indécise et assez mouvante achève de donner une touche « historique ».
Arrestation de l’assassin Gavrilo Princip après l’attentat contre l’héritier du trône François-Ferdinand et son épouse est un cliché anonyme pris le 28 juin 1914 (la mauvaise qualité de l’image laissant supposer qu’il s’agit en fait d’une reproduction de celui-ci). Après avoir été désarmé par des badauds présents dans la foule, Gavrilo Princip est en premier lieu interpellé par la police. Ici, il serait plutôt encadré par des militaires austro-hongrois, vraisemblablement lors de son transfert au commissariat central de la ville. Le jeune homme de 20 ans apparaît en plein cadre, assez proche de l’objectif, semblant occuper et organiser toute la composition de la photographie. Vêtu d’un costume civil sombre, les yeux et les cheveux très noirs, il se tient bien droit, une main derrière le dos. Le regard dans le vague, Princip semble détendu, un peu ailleurs, halluciné. Un léger rictus barre son visage, lui donnant un air à la fois étrange et fascinant.
Raconter le 28 juin 1914 : à la croisée des représentations
À la croisée de deux tendances iconographiques, les deux représentations témoignent différemment de cette journée du 28 juin 1914.
Inscrite dans la grande tradition de la presse illustrée européenne du XIXe siècle, dont elle reprend les codes et le style caractéristique, le dessin entend saisir et mettre en scène toute la dramaturgie de l’événement afin de la restituer au plus grand nombre. À mi-chemin entre le fait divers de roman (un crime dans la rue avec ses personnages stéréotypés, la stupeur et les expressions bien marquées des protagonistes) et le fait politique (la foule, l’identité des victimes), l’image fait de cet attentat un « grand moment » à la fois romanesque et historique.
On ignore qui a pris la photographie (un passant ? un journaliste ? un membre des forces de l’ordre ?), de même qu’on ne sait rien d’une possible utilisation ultérieure qui en aurait été faite (dans la presse ou au procès, comme pour d’autres photographies de l’arrestation), mais on constate que l’épisode de l’arrestation est ici rapporté de manière plus documentaire et « objective ». C’est justement cette sobriété qui fait ressortir le visage mystérieux ou même énigmatique de Princip, donnant toute sa force au cliché.
Ainsi, sur le premier document, c’est un personnage qui surgit, dont le bras armé fait basculer l’intrigue à Sarajevo et peut-être sur tout le continent. Sur la photographie, c’est un homme qui se détache de la masse assez uniforme des soldats, au centre de l’actualité et de l’attention.
CLARK Christopher Munro, Les somnambules : été 1914, comment l’Europe a marché vers la guerre, Paris, Flammarion, coll. « Au fil de l’histoire », 2013.
COCHET François, PORTE Rémy (dir.), Dictionnaire de la Grande Guerre (1914-1918), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2008.
KRUMEICH Gerd, Le feu aux poudres : qui a déclenché la guerre en 1914 ?, Paris, Belin, coll. « Histoire », 2014.
VALLAUD Pierre, 14-18 : la Première Guerre mondiale, Paris, Fayard, 2004, 2 vol.
Alexandre SUMPF, « L’attentat de Sarajevo », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 12/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/attentat-sarajevo
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