Tepidarium.
Auteur : CHASSERIAU Théodore
Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web
H. : 171 cm
L. : 258 cm
Huile sur toile
Domaine : Peintures
© Photo RMN - Grand Palais - G. Blot
99-012629 / RF71
Le « bain antique »
Date de publication : Avril 2011
Auteur : Alexandre SUMPF
Une représentation néoclassique du bain antique à l’orée du Second Empire
Élève de Jean Auguste Dominique Ingres, mais aussi influencé par Eugène Delacroix et Paul Delaroche, Théodore Chassériau (1819-1856) est vite reconnu comme l’un des plus grands peintres de son époque. Exposant dès 1836 au Salon, il opère une certaine synthèse entre l’académisme, le néoclassicisme, l’orientalisme et le romantisme, acquérant une grande renommée pour ses portraits, ses peintures de genre et ses scènes historiques.
À cet égard, Tepidarium est sans doute son œuvre la plus célèbre et la plus caractéristique. Présentée avec un grand succès au Salon de 1853 et acquise peu après par l’État, elle figure parfaitement un genre et un style très prisés dans les débuts du Second Empire.
Par le thème choisi et l’esthétique de la représentation, cette toile nous renseigne aussi sur une certaine vision des bains et de l’hygiène caractéristique de la « nouvelle époque », entre référence classique et modernité.
Au centre était le bain
À l’occasion d’un voyage effectué dans les années 1840, Chassériau découvre Pompéi et les vestiges des bains de Vénus Génitrix. Conçu par son auteur comme une véritable « fresque antique dérobée au mur de Pompéi », Tepidarium présente donc clairement une scène antique où de nombreuses femmes de la cité s’adonnent au plaisir des bains dans la partie des thermes où l’on peut prendre des bains tièdes (tepidus), se reposer et se sécher.
La structure de la composition permet de saisir rapidement l’ensemble de l’œuvre. Richement décorée de peintures et de gravures murales, la haute salle du tepidarium abrite de nombreuses femmes : assises autour d’un bassin sur pieds, celles qui viennent aux bains, nues ou vêtues d’étoffes légères ; derrière elles apparaissent celles qui, debout et habillées, les servent, portant des mets ou des amphores. Au centre de la toile, une jeune femme s’étire et se sèche, tandis qu’une autre lui parle, assise.
La leçon antique à l’heure « moderne » du Second Empire
L’Antiquité de Chassériau est aussi un peu orientale, évoquant aussi bien l’exotisme et la douceur d’un harem d’Afrique du Nord. Alors que l’ambiance légèrement érotique, les postures nonchalantes et sensuelles, la langueur, la blancheur et la ligne pure des corps rappellent sans équivoque Ingres et ses femmes au bain, l’usage de la couleur et la sensualité de l’ensemble doivent plus à Delacroix.
Propre au néoclassicisme comme au romantisme qui influencent également Chassériau, ce mélange à la fois artistique et historique des références antiques et orientales est très caractéristique de la vision de l’époque. En effet, on considère alors que les usages raffinés de la civilisation romaine en matière d’hygiène se prolongent dans le monde arabe, ce que confirment à Paris les récits des riches voyageurs français de plus en plus nombreux à goûter sur place aux joies des bains. Le succès à la fois public et officiel de Tepidarium exprimerait et contribuerait alors à diffuser l’idée que l’hygiène, qui devient justement une préoccupation de santé publique sous le règne de Napoléon III, peut aussi être perçue et vécue comme un délice. Le rapport au corps et à sa propreté ainsi que la conscience naissante de la nécessité de l’hygiène prendraient alors un double visage, comme d’autres éléments de cette « modernité » du Second Empire.
Alain CORBIN [dir.], Histoire du corps, vol. II « De la Révolution à la Grande Guerre », Paris, Le Seuil, coll. « L’Univers historique », 2005.
Christine PELTRE, Théodore Chassériau, Paris, Gallimard, coll. « Monographies », 2001.
Alain PLESSIS, De la fête impériale au mur des Fédérés.1852-1871, Paris, Le Seuil, coll. « Points », 1979.
Alexandre SUMPF, « Le « bain antique » », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 12/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/bain-antique
Lien à été copié
Découvrez nos études
Archéologie et imaginaire néogrec au milieu du XIXe siècle : Ingres, Papéty et Gérôme
Si elle continue de nourrir la peinture d’histoire comme la peinture de genre, la référence à l’…
Le « bain antique »
Élève de Jean Auguste Dominique Ingres, mais aussi influencé par Eugène…
Présence des chevaux de Venise à Paris, de 1798 à 1815
Les figures antiques doivent servir de règle et de modèle, énonçait le Dictionnaire portatif (1757) d'Antoine-Joseph…
L’École des beaux-arts et ses bâtiments au XIXe siècle
Officiellement instituée par une ordonnance de Louis-Philippe en date du 4 août 1819, l’École des beaux-…
Papety, un artiste français en Grèce vers 1846
Prix de Rome en 1836, Papety séjourne en Italie de 1836 à 1841 où sa production est fortement marquée par Ingres…
La colonnade du Louvre
Au début du règne de Louis XIV, le Louvre et les Tuileries constituent les résidences privilégiées du…
Lavoisier et sa femme
Au début des années 1780, Jacques Louis David (1748-1825) est un peintre à la mode au sein de la bourgeoisie parisienne…
Isadora Duncan entre hellénisme et modernité
C’est à Paris, vitrine de toutes les avant-gardes, que se forge le mythe d’Isadora Duncan, chef de…
L’Art académique et la peinture d’histoire
Quand il formula les théories du classicisme en 1667, André Félibien plaça la peinture d’histoire au…
Almanach national pour 1791, de PH. L. Debucourt
Fin 1790, l’Assemblée constituante a déjà réussi à mettre en application une grande part des réformes…
argoud || precision
Le commentaire décrit un bassin sur pieds au centre du tableau . En fait il s'agit d'un brasero au près duquel la femme assise à droite avec une tunique rouge se chauffe les mains . On voit nettement les flammèches qui s'échappent des braises .
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel