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<i>La Perte du plus grand paquebot du monde</i>

La Perte du plus grand paquebot du monde

Le Naufrage du <i>Titanic</i>

Le Naufrage du Titanic

<i>La Perte du plus grand paquebot du monde</i>

La Perte du plus grand paquebot du monde

Date de création : 28 avril 1912

Date représentée : 14 avril 1912

Titre complet : Le "Titanic" a sombré après être entré en collision avec un iceberg.

Dernière page du Petit journal. Supplément du dimanche, numéro 1119.

Domaine : Presse

Bibliothèque Nationale de France - Domaine public © Gallica

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  • <i>La Perte du plus grand paquebot du monde</i>

Le Naufrage du Titanic

Date de publication : Novembre 2024

Auteur : Lucie NICCOLI

Le Titanic et les circonstances de son naufrage

Dans la nuit du 14 au 15 avril 1912, moins de trois heures après avoir heurté un iceberg, sombrait au large des côtes de Terre-Neuve, dans les eaux glaciales de l’Atlantique nord, l’un des plus grands et luxueux navires de son temps, le RMS (1) Titanic. Ce « palais flottant » de 269 mètres de long sur 28,5 mètres de large, d’une hauteur de 53 mètres du bas de sa quille à l’extrémité de ses quatre cheminées, comptait 8 étages reliés pour trois d’entre eux par des ascenseurs, et pouvait accueillir 3 000 personnes. Comme ses deux frères jumeaux, l’Olympic avant lui et le Gigantic après lui – renommé plus humblement, après la catastrophe, le Britannic –, il avait été construit à Belfast par la White Star Line et équipé de tout le confort moderne : éclairage et chauffage à l’électricité, véritables chambres avec salles de bains, salons luxueux, piscine, bain turc et appareils de sport.

Pour sa traversée inaugurale, il avait appareillé de Southampton le 10 avril et fait escale à Cherbourg puis à Queenstown (Irlande) avant de se diriger vers New York avec à son bord 885 membres d'équipage et environ 1 315 passagers parmi lesquels plusieurs milliardaires et un grand nombre de migrants irlandais voyageant en troisième classe.

Sur ces 2 200 passagers, environ 1 500 se noyèrent ; seulement 711, dont une majorité de passagers de première classe et de femmes, purent prendre place dans l’un des vingt canots de sauvetage disponibles et furent ramenés à New York par le Carpathia, le 18 avril.

Les dernières communications du Titanic, les récits et croquis des rescapés firent connaître les circonstances du naufrage, provoquant dans la presse et l’opinion un émoi considérable, particulièrement en Angleterre et aux États-Unis. Dès le 28 avril, Le Petit Journal, l’un des quatre plus grands quotidiens français, publia dans son supplément du dimanche une gravure colorisée montrant la collision du paquebot avec l’iceberg.

La deuxième semaine de mai, le peintre de marines Willy Stöwer représenta pour Die Gartenlaube, un hebdomadaire illustré allemand à gros tirage, la première phase du naufrage, la plus impressionnante : le moment où, sous les yeux des rescapés dans les canots, le Titanic s’enfonce par l’avant.

Le spectacle du drame

Pour la presse, les dessinateurs ont choisi de donner à voir les phases les plus spectaculaires du drame : la collision avec l’iceberg à 23h45, et le début de l’engloutissement du navire à 1h40, d’abord par la proue, avant qu’il ne se brise par le milieu et que les deux parties ne sombrent l’une après l’autre, à 2h05.

Ces images accompagnent des articles évoquant la catastrophe : Le Petit Journal détaille les merveilles de ce « géant des mers » et se montre critique envers la course à la vitesse et au gigantisme à laquelle se livrent l’Angleterre et l’Allemagne ; l’article du Gartenlaube, rédigé par un capitaine de marine, se veut rassurant quant à la sécurité de la flotte allemande.

L’illustrateur du Petit Journal a choisi le format « portrait » pour mettre en scène une machine fonçant à pleine vapeur vers le spectateur et venant percuter de plein fouet la glace au premier plan, qui vole en éclats.

Dans Die Gartenlaube, Stöwer adopte le point de vue d’un rescapé, à l’arrière d’un canot de sauvetage, au premier plan, et montre ainsi l’étendue du désastre dans un plan plus large : le paquebot qui commence à pencher vers la proue, déjà sous l’eau, et dont la poupe, où sont massés les passagers, se dresse peu à peu, une douzaine de canots partiellement remplis et des naufragés accrochés à des épaves, enfin les montagnes de glace à l’arrière-plan. Le sujet principal des deux images est cette machine noire qui crache de la vapeur et paraît hors de contrôle. Les lignes obliques tracées par les séries de hublots éclairés des différents étages et les sommets des quatre cheminées donnent une impression de vitesse et de déséquilibre : elles dessinent une diagonale qui va de droite à gauche – ascendante dans la scène de la collision, descendante dans celle du naufrage – et vient se briser sur un obstacle – la glace ou la surface de l’océan.

Au moment du choc avec l’iceberg, aucun passager n’était sur le pont ; l’illustrateur a donc seulement dessiné deux petites silhouettes levant les bras en l’air, affolées, au niveau de la passerelle de navigation.

Dans la scène du naufrage, en revanche, Stöwer a représenté un véritable drame humain : à côté du monstre qui coule, ses hélices tournant dans le vide, les hommes luttent pour survivre. De petites taches noires indiquent les chutes de corps et de débris à la mer, depuis la proue qui se soulève. Au premier plan, à bord du canot qui s’éloigne, des marins (reconnaissables à leur casquette à visière) rament et des hommes sont emmitouflés dans des couvertures ; trois naufragés sont repêchés tandis qu’un corps dérive, déjà inanimé.

Un événement devenu mythique

Pour cette image, Willy Stöwer s’est certainement inspiré de l’aquarelle de Fortunino Matania parue dans l’hebdomadaire britannique The Sphere, le premier à couvrir l’événement, à partir du 20 avril. Comme son confrère, qui avait recueilli de nombreux témoignages de rescapés, il recherche à la fois l’exactitude historique et un effet dramatique dans la mise en scène.

L’illustrateur du Petit Journal, en revanche, ne disposait sans doute pas d’informations aussi précises et l’image de la collision comporte plusieurs erreurs : l’iceberg évoque plutôt une banquise avec des stalactites ; il n’a pas brisé la rambarde mais endommagé la coque ; les silhouettes des officiers sont disproportionnées par rapport à la passerelle de navigation ; il manque au navire un étage ; et, surtout, la nuit était noire et étoilée, alors que, dans cette image, le ciel rosissant et les taches de lumière jaune évoquent les premières lueurs de l’aube. Cette représentation un peu naïve de la catastrophe, parée de couleurs qui semblent prémonitoires – l’aube se lève sur la catastrophe, les lumières crues du navire tachent la glace immaculée –, a plutôt valeur d’emblème.

Dans les années 1910 marquées, en Europe et aux États-Unis, par la course à l’industrialisation, elle rappelle d’autres images de machines fumantes atteignant les vitesses record de 40 à 60 km/heure, telles les locomotives à vapeur peintes par Albert Marquet, et d’accidents de train ou de tramway rapportés par la presse. Comme l’exprime l’article qui l’accompagne, elle illustre bien la prise de conscience, avec cet accident hors du commun, considéré à l’époque comme le plus meurtrier jamais connu (2), des limites au « génie humain », qui ne peut l’emporter face aux « forces aveugles de la nature ».

Après les deux guerres mondiales, la tragédie du Titanic resta aussi dans les mémoires comme le symbole de la fin de la Belle Époque, celui de la course à l’abîme d’une société de classes décadente et encore insouciante.

Antoine RESCHE, Le Titanic. De l’histoire au mythe, La Geste, 2022.

Philippe MASSON, Le Drame du Titanic, Éditions Tallandier, 2012.

Walter LORD, A night to remember, Henry Holt & Company, New York, 1955.

1 - RMS Royal Mail Ship : désigne à partir de 1850 les navires des compagnies privées sous contrat transportant le courrier de la poste britannique à l'étranger.

2 - Le nombre de victimes des naufrages n’avait alors jamais dépassé cinq à six centaines, à l’exception de celui du SS Sultana, un bateau à vapeur surchargé dont l’explosion sur le fleuve Mississippi en 1865, à la fin de la guerre de Sécession, pourrait avoir causé la mort de 1800 passagers, pour la plupart des soldats prisonniers de guerre.

Lucie NICCOLI, « Le Naufrage du Titanic », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 13/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/naufrage-titanic

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