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Frontispice des plans routiers de la généralité d'Alençon

Frontispice des plans routiers de la généralité d'Alençon

Extrait du plan de la grande route de Paris en Bretagne

Extrait du plan de la grande route de Paris en Bretagne

Deux plans d'ouvrages d'art de la généralité de Moulins

Deux plans d'ouvrages d'art de la généralité de Moulins

Frontispice des plans routiers de la généralité d'Alençon

Frontispice des plans routiers de la généralité d'Alençon

Date représentée :

H. : 58,5 cm

L. : 43 cm

Lavis et encre sur papier

Domaine : Dessins

© Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine

Lien vers l'institution

F14 8451

L’atlas de Trudaine

Date de publication : mai 2015

Auteur : Stéphane BLOND

Restaurer le réseau routier

La réalisation de l’atlas dit de Trudaine s’inscrit dans le cadre de la réforme routière entreprise par la monarchie française au cours de la Régence du règne de Louis XV. Dès 1716, le corps des ingénieurs civils des Ponts et Chaussées est fondé, afin de répondre aux besoins de l’administration dans ce domaine essentiel au bon fonctionnement de l’économie et du commerce du royaume, c’est donc également un instrument de pouvoir politique pour le roi.

En 1737-1738, Philibert Orry, contrôleur général des finances, également directeur des Ponts et Chaussées de France, lance un vaste état des lieux du réseau routier français. Il diffuse auprès des intendants de province plusieurs textes qui orientent durablement la politique routière de la monarchie française. Parmi les principales dispositions prises par Orry, on note la généralisation de la corvée, avec des travaux d’entretien des routes réalisés par les contribuables assujettis à la taille. Cet impôt en nature permet de dépasser les perpétuelles difficultés financières de la monarchie. Afin de répartir équitablement les travaux entre les corvéables, le ministre ordonne également la réalisation d’un inventaire cartographique pour chaque route royale, c’est-à-dire les artères majeures du royaume.

Cette décision novatrice amène de vastes opérations réalisées par le personnel des Ponts et Chaussées qui est dépourvu d’une véritable formation. En 1743, l’intendant des finances Daniel-Charles Trudaine obtient l’administration du service des Ponts et Chaussées. Il commence par fonder un bureau des dessinateurs à Paris, afin d’alléger le travail des ingénieurs qui se concentrent sur le levé de terrain. En 1747, Trudaine place Jean-Rodolphe Perronet à la tête de ce bureau, avec une mission élargie comprenant un vaste volet pédagogique. Technicien d’expérience, Perronet conçoit un programme d’études qui devient la référence, en particulier pour les procédures de l’inventaire cartographique qui se poursuivent jusqu’à la fin de la décennie 1770.

Le territoire en cartes

Les trois illustrations présentées permettent de saisir les différentes facettes de l’atlas de Trudaine, avec un titre-frontispice, un plan de route et le dessin d’un ouvrage d’art. Ces trois documents sont extraits de deux des 62 volumes qui composent l’atlas dit de Trudaine, avec au total 2 349 cartes routières accompagnées par 751 planches d’ouvrages d’art, pour 22 généralités.
Le frontispice des trois volumes de la généralité d’Alençon décrit le lien étroit entre l’entreprise cartographique et le pouvoir royal. Dans la partie supérieure, le blason porte les armes royales, avec les trois fleurs de lys couronnées. De part et d’autre, des personnages font référence aux bienfaits de l’action du souverain. En bas du cartouche, plusieurs scénettes et instruments décrivent les opérations pour la réalisation d’une carte, comme la triangulation, la mesure d’angles ou le dessin.
Le plan routier est réalisé sur une feuille qui se décompose en deux parties de taille inégale. Les deux tiers supérieurs contiennent le tracé de la route, avec une bande étroite qui contient le nom des paroisses corvéables. La partie inférieure contient des mentions manuscrites sur l’état de la chaussée ou l’avancée des travaux. La carte de la route correspond à un faisceau à l’intérieur duquel l’orientation varie pour un tracé en long, concentré sur le chemin. L’échelle est de 10 lignes pour 100 toises, soit un rapport numérique de 1/8500e, ce qui permet une représentation précise des abords de la route, avec d’éventuelles variations de parcours. Les figurés cartographiques sont simples et représentent le territoire au plus près de la réalité de terrain. Différentes cotes et mesures sont reportées sur le dessin, pour garantir une grande exactitude des informations.

Les ouvrages d’art sont indispensables pour une viabilité de la route en toute saison. À l’aide d’un système de lettres, la carte routière renvoie à des plans de ponts dont l’échelle dépend de l’envergure de l’édifice. La feuille de la généralité de Moulins est scindées en deux parties distinctes, pour deux ouvrages, avec une présentation pratiquement immuable autour de trois types de vue : en plan, en coupe et en élévation. La minutie du dessin, les cotes et le devis annexe permettent d’obtenir là aussi une vision précise de l’édifice. Cette représentation est essentielle pour les autorités publiques, car la construction des ponts est réalisée après adjudication sur les fonds propres du Trésor royal, donc au prix le plus juste. En ce sens, un plan limite les dérives.

L’État et le territoire

Supervisé par Daniel-Charles Trudaine, puis par son fils, Jean-Charles-Philibert Trudaine de Montigny, l’atlas des routes royales porte une nouvelle conception du territoire pour les autorités administratives. Un tel recours à l’outil cartographique est inédit dans l’histoire de la monarchie française. Ainsi, dès 1738, Philibert Orry décrit la carte comme un élément incontournable pour tout projet routier : « À proportion qu’il sera fait ou réparé des routes et grands chemins, le plan du nouvel alignement sera porté sur la carte, tel qu’il aura été approuvé sur les plans particuliers qui en auront été fournis. »
Grâce aux cartes, les administrateurs ne sont plus obligés de se déplacer sur le terrain pour décider. Ainsi, la carte routière sert de support intermédiaire entre la province et le lieu de décision. En outre, ce support est modifiable à la demande et suffisamment précis pour saisir toutes les contraintes et l’ampleur des travaux. Cette approche est rendue possible par l’utilisation des techniques cartographiques les plus récentes, afin d’avoir une vue exacte des lieux. Désormais, les ingénieurs des Ponts et Chaussées sont également formés, avec un « langage » standardisé et des techniques communes qui permettent de rendre leur action plus efficace.

Ainsi, la carte est un outil d’aide à la décision qui s’insère dans un circuit entre la province et Paris. Elle suscite des questions, des ajouts et des suppléments qui permettent de ne rien négliger et d’améliorer le contrôle exercé par l’État. En dernier lieu, la décision revient au Conseil d'État du roi, qui juge sur pièces et ordonne le lancement des travaux sur le terrain.

ARBELLOT Guy, « La grande mutation des routes de France au milieu du XVIIIe siècle », Annales : économies, sociétés, civilisations, vol. 28, no 3, 1973, p. 765-791.

BLOND Stéphane, L’atlas de Trudaine : pouvoirs, cartes et savoirs techniques au siècle des Lumières, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2014.

LEPETIT Bernard, Chemins de terre et voies d’eau : réseaux de transports et organisation de l’espace en France (1740-1840), Paris, École des hautes études en sciences sociales, coll. « Recherches d’histoire et de sciences sociales » (no 7), 1984.

PICON Antoine, L’invention de l’ingénieur moderne : l’École des ponts et chaussées (1747-1851), Paris, Presses de l’École nationale des ponts et chaussées, 1992.

VIGNON Eugène, Études historiques sur l’administration des voies publiques en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Dunod, 1862-1880, 4 vol.

Stéphane BLOND, « L’atlas de Trudaine », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/atlas-trudaine

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