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Bataille de Marignan, 14 septembre 1515

Bataille de Marignan, 14 septembre 1515

François Ier armé chevalier par Bayard, 14 septembre 1515

François Ier armé chevalier par Bayard, 14 septembre 1515

Bataille de Marignan, 14 septembre 1515

Bataille de Marignan, 14 septembre 1515

Date de création : 1836

Date représentée : 14 septembre 1515

H. : 465 cm

L. : 543 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© RMN - Grand Palais (château de Versailles) / Christian Jean / Hervé Lewandowski

Lien vers l'image

89-000415 / MV 2699

Marignan par Alexandre Évariste Fragonard : le genre historique revisité par l’art troubadour

Date de publication : Décembre 2019

Auteur : Laetitia REBIFFÉ-CARBONNE

Une bataille de la Renaissance par un peintre troubadour pour servir la monarchie de Juillet

Dans le but de concilier les héritages révolutionnaire et monarchique pour s’imposer en « roi-citoyen » et faire oublier son père Philippe Égalité, cousin régicide de Louis XVI, Louis-Philippe Ier fait réaménager une partie du palais de Versailles en musée historique dédié « à toutes les gloires de la France ». Inauguré en 1837, doté des fonds de collections royales ou privées et de nombreuses copies et œuvres originales, il a d’autant plus de succès qu’il rencontre le goût de l’époque pour le Moyen Âge et la peinture historique, déjà en vogue sous la Restauration.

Parmi les artistes recrutés, Alexandre Évariste Fragonard, connu comme peintre troubadour, ne dédaigne ni le genre historique, ni les commandes officielles. Bataille de Marignan, 14 septembre 1515, peint en 1836, a les honneurs du nouveau musée car il prend place dans son fleuron, la galerie des Batailles, ornée de trente-trois tableaux liés chacun à une bataille de l’histoire de France, entre Tolbiac en 496 et Wagram en 1809. Réalisé en 1837, François Ier armé chevalier par Bayard, 14 septembre 1515 est la copie remaniée d’un plafond du Louvre peint en 1819 et est bien moins mis en valeur dans le musée.

François Ier en roi chevalier parmi les chevaliers français

Les deux œuvres portent sur la seconde journée de l’épisode le plus célèbre des guerres d’Italie. Dans la première année de son règne, François Ier reprend la quête de ses prédécesseurs et se lance à la conquête du Milanais, sur lequel il revendique des droits par Valentine Visconti, son arrière-grand-mère. Ce ne sont pourtant pas les troupes du duc de Milan, Sforza, que les Français affrontent près de Marignan, mais celles de ses redoutables alliés suisses. La bataille que le roi de France a voulu éviter à tout prix et à laquelle il prend part s’engage le 13 septembre 1515 et tourne d’abord mal pour les Français, sauvés par la nuit. Le lendemain, l’efficacité de l’artillerie et un renfort vénitien font renoncer les Suisses.

Sur le premier tableau, le roi, sur un destrier blanc, porte une armure couverte d’une cape et un armet ouvert empanaché de blanc, son épée accrochée à sa monture. Il retient ses troupes d’un geste impérieux. En face, des soldats suisses – l’un tenant une longue lance, leur arme emblématique – semblent eux aussi arrêtés et concentrés sur un groupe à terre au premier plan. Il s’agit sans doute du comte de Guise, blessé mais sauvé par le sacrifice de son écuyer Adam Nuremberg, gisant près de lui. La bataille en elle-même est reléguée à l’arrière-plan, estompé par des nuages de poussière et de poudre mais où on distingue un assaut des cavaliers français que cherchent à repousser, lances en avant, les piquiers suisses. Le choix de se concentrer ainsi sur une anecdote dramatique est un code de l’art troubadour.

L’autre scène a lieu le soir même, sous une tente pleine d’étendards. Elle ne montre pas, comme le titre l’indique, l’instant même de l’adoubement mais celui qui précède. Éclairé par le soleil couchant pénétrant par l’ouverture, vêtu d’un manteau blanc richement brodé, le roi se tient au centre, sur une estrade, devant un autel, et prête serment, la main droite sur un livre, sans doute un Évangile, imprimé et enluminé. Assis dans l’ombre, dans une posture soulignant son âge, Pierre Du Terrail, chevalier de Bayard, devant qui le roi va s’agenouiller, comme l’indique la présence d’un coussin, porte encore son armet – suggérant sa participation à la bataille – et tient de sa main droite son épée, posée entre ses jambes. Au premier plan, deux pages inclinés présentent l’épée royale. L’adoubement du roi est donc imminent et aura lieu en présence d’un évêque se tenant près de l’autel. Deux femmes richement vêtues, un enfant et un petit chien observent la scène, apportant le caractère intime et anecdotique typique du style troubadour.

On peut relever le même paradoxe sur les deux tableaux : une grande minutie dans le traitement des costumes et des décors, alliée au plus évident manque de réalisme concernant la composition. Cet instant suspendu du roi face aux Suisses, tous préoccupés par le sort du comte de Guise, est une invention du peintre, de même que le cérémonial religieux dont il affuble la scène de l’adoubement. Si les historiens mettent en doute aujourd’hui la réalité même de ce dernier, on peut en revanche estimer qu’il était tenu pour un fait historique en 1836.

Un roi et une bataille incontournables, mais pas encore populaires

Marignan, première et seule grande victoire militaire de François Ier, ouvre à ce dernier les portes de Milan. Même si elle n’aura qu’un impact de courte durée, nous ne sommes aujourd’hui pas surpris de la trouver sélectionnée parmi les journées glorieuses de l’histoire de France.

Néanmoins, il importe de souligner que dans les années 1830, elle n’a pas encore atteint la célébrité que lui conférera ensuite l’histoire scolaire. Le règne du roi valois souffre des effets de sa dévalorisation par les Bourbons, qui lui ont préféré les figures de Saint Louis et Henri IV, et son image n’a pas encore été restaurée positivement sous la monarchie de Juillet. Le chevalier Bayard est alors plus populaire auprès du public que le roi, et cela restera le cas tout au long du XIXe siècle.

Mais le programme iconographique de la galerie des Batailles a pour but de proposer à la nation une mémoire commune et glorieuse transcendant les conflits politiques, grâce à la commémoration de plusieurs victoires de chaque dynastie, puis de la République et de l’Empire. Or, la dynastie des Valois en a connu assez peu, et Marignan est sans conteste la plus importante à laquelle un de ses rois ait participé. Elle a donc facilement gagné sa place dans la sélection, mais sans intéresser en tant que telle, d’où la place laissée au pittoresque voire à la fantaisie du peintre.

APRILE Sylvie, La Révolution inachevée (1815-1870), Paris, Belin, coll. « Histoire de France » (no 10), 2014 (1re éd. 2010).

LE FUR Didier, Marignan (13-14 septembre 1515), Paris, Perrin, coll. « Tempus » (no 571), 2015 (1re éd. 2004).

Laetitia REBIFFÉ-CARBONNE, « Marignan par Alexandre Évariste Fragonard : le genre historique revisité par l’art troubadour », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 15/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/marignan-alexandre-evariste-fragonard-genre-historique-revisite-art-troubadour

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