Aller au contenu principal
Le Ventre Législatif. Aspect des bancs ministériels de la chambre improstituée de 1834.

Le Ventre Législatif. Aspect des bancs ministériels de la chambre improstituée de 1834.

Charles Philippon.

Charles Philippon.

Jean-Pons-Guillaume Viennet.

Jean-Pons-Guillaume Viennet.

François-Pierre-Guillaume Guizot, Ministre de l'Intérieur (1790-1874).

François-Pierre-Guillaume Guizot, Ministre de l'Intérieur (1790-1874).

Le Ventre Législatif. Aspect des bancs ministériels de la chambre improstituée de 1834.

Le Ventre Législatif. Aspect des bancs ministériels de la chambre improstituée de 1834.

Date de création : 1834

Date représentée : 1834

H. : 28 cm

L. : 43 cm

in L'Association mensuelle, 13 janvier 1834 lithographie

Domaine : Estampes-Gravures

© Cliché Bibliothèque Nationale de France

L'Association mensuelle, 13 janvier 1834

Portraits-charges des célébrités du juste milieu

Date de publication : Février 2014

Auteur : Robert FOHR

Les bustes-charges des “ Célébrités du juste milieu ” et les lithographies qui en découlent remontent aux débuts de la monarchie de Juillet. Leur titre est emprunté à un discours du 30 janvier 1831 dans lequel le roi Louis-Philippe fait connaître son intention de “ se tenir dans un juste milieu également éloigné des excès du pouvoir populaire et des abus du pouvoir royal ”. Cette formule malheureuse allait donner à Charles Philipon, directeur de La Caricature et du Charivari, l’idée de publier des portraits-charges de personnalités du régime qu’il annonce à ses lecteurs dès le mois d’avril 1831. Echelonnée de 1832 à 1835, la publication de ces lithographiques satiriques a pour toile de fond le durcissement de la rivalité entre le “ parti du mouvement ” (Laffitte), au pouvoir seulement du 2 novembre 1830 au 22 mars 1831, et “ le parti de la résistance ” (Casimir Perier, Thiers, Guizot, Soult…) qui prend la relève sous le regard critique et face à l’agitation grandissante des républicains, aux rangs desquels appartiennent Philipon et Daumier.

La Caricature, écrit Charles Philipon dans le numéro du 26 avril 1832 de ce journal, avait dans le temps promis à ses abonnés une galerie de portraits des célébrités du juste milieu, dont les ressemblances, consciencieusement étudiées, devaient posséder, outre un caractère énergique, ce trait burlesque connu sous le nom de “charge”. Habituée à porter dans ses publications toutes les conditions possibles du succès, La Caricature a différé quelque temps la réalisation de ce projet, parce qu’elle a fait modeler chaque personnage en maquette. C’est ensuite d’après ces moules [sic] de terre que les dessins ont été exécutés. ” Il faut préciser que le projet avait été confié à Daumier, auquel revient probablement l’idée de ces modèles (et non “ moules ”) en terre crue coloriée qui constituent la plus remarquable série de caricatures sculptées jamais réalisées. Les bustes-charges parvenus jusqu'à nous sont au nombre de trente-six : la majorité représente des ministres et des personnages influents de l'entourage du roi Louis-Philippe, des députés issus principalement de la magistrature, de l'industrie et de la banque, des journalistes gouvernementaux, tous hostiles aux idées républicaines, voire, comme Guillaume Viennet, au mouvement romantique et aux tendances les plus modernes de l'art et de la littérature. Plusieurs de ces “ célébrités du juste milieu ”, députés ou ministres, réapparaissent sur les bancs de la “ chambre improstituée ”, pour reprendre l’expression de La Caricature, dans la magnifique planche de 1834, Le Ventre législatif. Toutefois, quelques-uns des modèles des bustes appartiennent à l’entourage amical et professionnel de Daumier, tels Philipon, les publicistes Gallois et Louis Huart. Il n’est au reste pas certain que la galerie soit complète, car les trois séries de lithographies auxquelles ces sculptures ont servi de modèle – portraits-vignettes “ aux armes ”, portraits-vignettes en buste et portraits en pied – représentent d’autres figures du régime dont il serait étonnant que Daumier n’ait pas modelé les maquettes : ainsi Thiers, Bugeaud, Choiseul, l’avocat général Plougoulm, l’une des cibles préférées du Charivari, etc.

Arsène Alexandre, le premier biographe de Daumier, en témoigne – “ Il faut dire et nous aurons l'occasion de répéter que jamais au grand jamais Daumier ne dessina d'après nature ” –, c’est en atelier, et non sur le modèle, que Daumier modela les bustes-charges, ce qui laisse imaginer la prodigieuse acuité de sa mémoire – on ne conserve aucun dessin préparatoire – et la sûreté de son métier de sculpteur. Bien qu'on leur connaisse quelques antécédents remarquables, comme les figurines-charges, amusantes et parfois cruelles, de Charles Dantan, les bustes de Daumier occupent une place tout à fait originale dans le genre relativement rare de la caricature sculptée. En accusant les particularités physionomiques de ses personnages, Daumier ne fait pas que céder au goût du laid et du burlesque bien dans l'esprit de son temps, dont témoignent par exemple les Grimaces, dessinées par Boilly entre 1823 et 1828. Il va plus loin, tirant en quelque sorte des enseignements de la physiognomonie du pasteur suisse Lavater et de la phrénologie du docteur Gall, qui prétendaient étudier le caractère, les “ facultés ” dominantes des individus, le premier d'après les traits de leur visage, le second d'après la forme générale et les bosses de leur crâne. Si Daumier “ charge ” ses personnages, ce n'est donc pas pour les trahir, mais pour en révéler au contraire ce que lui, en tant que républicain, considérait comme leur personnalité profonde, et dénoncer du même coup les travers du régime qu’à ses yeux ils incarnaient. Il est évident qu’une juste interprétation de ces œuvres, qui constituent l’une des charges les plus violentes jamais imaginées contre la bourgeoisie libérale, doit tenir compte du contexte idéologique dans lequel elles ont été créées. Le développement de régimes libéraux au XIXe siècle s’est fait au prix d’une lutte à la fois contre la droite cléricale et légitimiste et contre la culture néojacobine des républicains…

Daumier 1808-1879 catalogue de l’exposition au Grand Palais, 1999-2000.

Robert FOHR, « Portraits-charges des célébrités du juste milieu », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 28/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/portraits-charges-celebrites-juste-milieu

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

L'immoralité au cœur de la lutte religieuse pendant la III<sup>e</sup> République

L'immoralité au cœur de la lutte religieuse pendant la IIIe République

Une querelle longue de plus de 20 ans

Vingt ans séparent la date de réalisation de ces deux affiches. En 1884, l’ouvrage de Léo Taxil publié par…

L'immoralité au cœur de la lutte religieuse pendant la III<sup>e</sup> République
L'immoralité au cœur de la lutte religieuse pendant la III<sup>e</sup> République
Kupka et l’Assiette au beurre : L’Argent

Kupka et l’Assiette au beurre : L’Argent

L’Assiette au beurre

Après la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, les interdictions qui frappent les journalistes, dessinateurs…

La traite illégale

La traite illégale

Réprimer la traite

Avant que n’éclate la Révolution en France, l’Angleterre et la France pratiquaient toutes deux la traite des Noirs. Au début…

La traite illégale
La traite illégale
Le Mouvement anticlérical à la veille de 1905

Le Mouvement anticlérical à la veille de 1905

La France à la veille de la loi de séparation de 1905

La France de la première décennie du XXe siècle est en proie à de nombreuses…

Daumier  et les critiques d’art

Daumier et les critiques d’art

Le Salon et la puissance de la critique

Au début du XIXe siècle, le Salon annuel de peinture et de sculpture a acquis une importance…

Daumier  et les critiques d’art
Daumier  et les critiques d’art
L'Exécution du duc d'Enghien

L'Exécution du duc d'Enghien

La légende « noire » napoléonienne

De son vivant déjà, Napoléon Ier faisait l’objet d’un mythe que sa chute en 1814 puis sa mort sept…

L'Exécution du duc d'Enghien
L'Exécution du duc d'Enghien
L'Exécution du duc d'Enghien
Un pamphlet contre l'aristocratie

Un pamphlet contre l'aristocratie

La hantise du complot aristocratique

En 1789, un mécontentement général contre la réaction seigneuriale s’ajoute à la vive effervescence…

Un pamphlet contre l'aristocratie
Un pamphlet contre l'aristocratie
Rimbaud, jeune à jamais

Rimbaud, jeune à jamais

Inoubliable

À 43 ans, Étienne Carjat (1828-1906) réalise l’un de ses plus célèbres clichés – le portrait d’Arthur Rimbaud (1854-1891), âgé de 17…

Rimbaud, jeune à jamais
Rimbaud, jeune à jamais
Bustes-charges de banquiers par Honoré Daumier

Bustes-charges de banquiers par Honoré Daumier

L’oligarchie de Juillet

Fragmentés en groupes concurrents, les parlementaires n’en constituaient pas moins une entité d’une exceptionnelle…

Bustes-charges de banquiers par Honoré Daumier
Bustes-charges de banquiers par Honoré Daumier
Bustes-charges de banquiers par Honoré Daumier
Grandjouan, militant radical

Grandjouan, militant radical

Du militantisme radical au communisme

La IIIe République ancre les pratiques démocratiques en France mais est loin de satisfaire les…

Grandjouan, militant radical
Grandjouan, militant radical
Grandjouan, militant radical