Cardinal Charles Lavigerie Cardinal-Primat-d'Afrique.
Auteur : BONNAT Léon
Lieu de conservation : musée national du château de Versailles (Versailles)
site web
H. : 239 cm
L. : 164 cm
Huile sur toile
Domaine : Peintures
© RMN-GP (Château de Versailles) / Daniel Arnaudet / Gérard Blot
81-000493 / MV6020
Le cardinal Lavigerie
Date de publication : Mars 2012
Auteur : Jérémie BENOÎT
Évêque de Nancy, Charles Martial Allemand Lavigerie fut nommé archevêque d’Alger en 1867. Il créa alors les Pères blancs (1868) et les Sœurs missionnaires d’Afrique (1869), qu’il envoya en Afrique noire en vue de son évangélisation après le concile d’Alger en 1873. Cette seule action lui vaudrait déjà une grande renommée, mais il la doit plus encore au fameux « toast d’Alger » qu’il prononça en 1890 sur le conseil du pape Léon XIII en vue du ralliement de l’Église à la République. La stratégie de Léon XIII, au lendemain de l’échec du boulangisme auquel avaient adhéré les monarchistes, et en dépit de l’hostilité d’une grande partie du clergé, était d’endiguer la politique anticléricale des opportunistes par une attitude de conciliation pour défendre la liberté des catholiques français au sein même de la République, et non contre elle. Cette ouverture se solda par l’encyclique Inter sollicitudines du 16 février 1892, dont l’accueil fut mitigé parmi les catholiques français. Présentée comme le « besoin suprême de la France », la république, définitivement triomphante autour de 1890, ne tint cependant pas ses promesses puisqu’en 1905 sera proclamée la séparation des Églises et de l’État. Ce toast, qui fit l’effet d’un coup de tonnerre, valut au cardinal Lavigerie les foudres des droites, lui-même ayant longtemps été proche des milieux légitimistes.
Bonnat a représenté le cardinal Lavigerie deux années avant le « toast d’Alger », à l’époque où le prélat se battait pour l’abolition définitive de l’esclavage et où il apparaissait encore comme l’un des pivots du courant légitimiste. Saisi la plume à la main, le personnage pose avec naturel près de sa table de travail. Revêtu de son habit de cardinal, il fixe sur le spectateur un regard presque amusé. Mais sous son air débonnaire perce l’assurance du grand commis de l’Église autant que de l’État, conscient de son importance. Dans l’ombre se dresse une haute croix. Le cadrage choisi par le peintre contribue à traduire la grande considération dont jouit alors le prélat.
L’évolution politique du cardinal Lavigerie se mesure au fait que ce portrait fut exposé au Salon de 1888 en même temps celui de Jules Ferry, dont on sait qu’il fut l’un des artisans de l’ancrage républicain de la France. Peindre ces deux portraits révélait les opinions politiques et religieuses de Bonnat, et l’association de ces deux tableaux évoquait certains rapprochements en cours entre les hommes d’Église et les politiciens de gauche. Ce portrait, très simple dans sa conception, montre plus l’homme que le prélat. Le peintre est en ce sens l’héritier d’Ingres qui, avec son Portrait de M. Bertin (Louvre), ouvrit la voie à ce genre de représentations où le personnage en impose au spectateur par sa forte présence comme par son regard directement posé sur lui. De ce fait, ce portrait n’a rien d’officiel et n’est que l’image d’un homme très populaire et animé de profondes convictions.
Jérémie BENOÎT, « Le cardinal Lavigerie », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 15/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/cardinal-lavigerie
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