Militaires pratiquant le sport
Sauteur à la perche
Louis de Fleurac, coureur du Racing-Club
Militaires pratiquant le sport
Auteur : ANONYME
H. : 13 cm
L. : 18 cm
Tirage d'une plaque de verre
Domaine : Photographies
© Collection Iconothèque de l'INSEP
Les premiers reportages photographiques sportifs
Date de publication : Mars 2007
Auteur : Laurent VÉRAY
Dès 1880, il n’est pas rare que, pour tester les possibilités des émulsions rapides au gélatino-bromure d’argent (une émulsion à la fois plus sensible et favorable à la prise de vue en extérieur), des photographes s’intéressent au sport, dont le succès social est grandissant et qui offre en effet un sujet idéal pour la pratique de l’instantané[1]. Dix ans plus tard, le développement de la photographie de presse, qui accorde au sport une attention croissante du fait de sa dimension spectaculaire, annonce la disparition progressive de l’illustration picturale. Des journaux spécialisés sont créés, comme Le Véloce-Sport ou Le Sport universel illustré. Ils commencent à publier des clichés, dont la plupart demeurent relativement statiques. En 1898, La Vie au Grand Air fait son apparition. Dans cette revue entièrement consacrée à l’actualité sportive et à la pointe de la modernité graphique, on trouve des textes souvent très pertinents et des photographies de grande qualité. Pour cela son fondateur, Pierre Laffite, fait appel à des professionnels chevronnés, tel Jules Beau, mais aussi à de simples amateurs.
La première photographie est une vue générale en plongée montrant différentes pratiques physiques réalisées par des militaires en plein air. Dans le fourmillement des activités encadrées par des moniteurs et des officiers, on distingue des gymnastes, des boxeurs, des escrimeurs, des artilleurs, et des hommes faisant des agrès, du cheval d’arçon, des exercices sur un portique, des échelles ou un octogone (à gauche sur l’image). A noter la présence, au fond à droite, d’une hune (constituée de deux mas de douze mètres de haut que relient des barres fixes successives). La deuxième photographie est une photographie prise avec un vélocigraphe (appareil automatique à répétition rapide) en 1893. Elle montre un saut à la perche en longueur sur la promenade du Gravier, le long de la Garonne, à Agen. Il s’agit d’un très bel instantané : le perchiste, saisi au vol, apparaît de façon très nette. La composition est remarquable : le photographe s’est placé dans l’axe du mouvement, prenant soin de cadrer de chaque côté une partie du public et les commissaires de l’épreuve. L’ensemble possède par ailleurs une bonne profondeur de champ. Le troisième cliché représente Louis de Fleurac, un coureur du Racing-Club de France champion du 4 000 m steeple et recordman de France du 3 000 m en 1904. Elle a été publiée dans la “ Galerie des célébrités sportives ” de la revue La Vie au Grand Air en avril 1906. On croirait, à première vue, qu’il s’agit d’un dessin. La posture de l’athlète, de profil, au contour si net, sa parfaite immobilité, son visage dépourvu de toute trace d’effort, son regard fixe, l’absence de décor et les quelques retouches visibles (sur le corps, les vêtements, le sol et l’ombre), tout cela donne l’impression qu’il évolue comme affranchi des lois de la gravité.
Le premier document est une étonnante mise en scène qui date des années 1890. Elle montre le “ gymnase de plein air ” de l’Ecole de Joinville (créée en 1852) où l’on enseigne, dans la tradition de Francisco Amoros (considéré comme le fondateur de l’éducation physique en France), la gymnastique et l’escrime afin de former des moniteurs qui seront ensuite répartis dans l’armée. Il s’agit d’une sorte de démonstration d’ensemble spécialement organisée pour le photographe : tous les protagonistes ont en effet posé durant le temps nécessaire à la prise de vue. Du coup, la composition rappelle l’imagerie d’Epinal, qui concentre un maximum d’informations dans un espace restreint. D’ailleurs il existe une gravure quasi identique à ce cliché. Cela prouve qu’à l’époque, bien souvent, la photographie prolonge une tradition représentative qui lui est antérieure. Le deuxième document est très différent. Il fait partie d’un album exceptionnel retraçant l’intégralité du Lendit d’Agen qui s’est tenu les 27 et 28 mai 1893. Les lendits étaient des concours sportifs interscolaires organisés par la Ligue girondine, regroupant les élèves des collèges et lycées de l’académie de Bordeaux. Destinées à promouvoir les jeux traditionnels de plein air, ces fêtes républicaines visaient surtout à développer les capacités physiques des jeunes jusqu’à leur incorporation militaire. Ces exercices athlétiques, hygiéniques et récréatifs, intégrés dans une conception globale de l’enseignement d’inspiration patriotique, étaient destinés à former de bons citoyens et de robustes soldats. Ce document démontre que les activités sportives intéressent les photographes amateurs. Le perfectionnement des appareils leur permet désormais de réaliser d’excellentes prises de vue capables de traduire le mouvement avec justesse. Contrairement à l’exemple précédent, la troisième photographie n’a pas été obtenue en situation réelle. C’est un trompe-l’œil étrange. En fait, le personnage a posé devant une toile peinte, simulant pour l’objectif de l’opérateur les gestes de sa course. Cela prouve que la pratique du studio, malgré les progrès techniques des appareils photographiques et l’augmentation de la sensibilité de la pellicule, est encore courante au début du siècle, car la prise de vue instantanée est encore difficile dans certaines circonstances. Les athlètes les plus connus se prêtent alors volontiers à ce genre d’exercice imposé par les revues illustrées, qui cherchent à populariser leur image auprès des lecteurs passionnés de sport.
Pierre ARNAUD (dir.) Les Athlètes de la République Paris, Privat, 1987.
Georges VIGARELLO Une histoire culturelle du sport Paris, Robert Laffont, 1988.
1. Terme désignant une photographie qui capte en une fraction de seconde un objet ou un personnage en mouvement.
Laurent VÉRAY, « Les premiers reportages photographiques sportifs », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 21/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/premiers-reportages-photographiques-sportifs
Lien à été copié
Albums liés
Découvrez nos études
La radio conquiert l'oreille des Français
Dès le début des années 1920, quand les premiers programmes de radio réguliers sont lancés, des associations d’auditeurs…
Nadar, l’art et la photographie
Le tournant des années 1850-1860 marque une étape cruciale quoiqu’en partie méconnue dans l’histoire de la…
La majorité du Prince impérial
Eugène Atget et le pittoresque montmartrois
Avec les travaux d’urbanisme du second Empire, le visage de Paris se modifie profondément : pour construire les…
Les « tondues » de la Libération
On estime que 20 000 à 40 000 femmes accusées à tort ou à raison de collaboration avec l’occupant allemand auraient…
Le daguerréotype
Le 19 août 1839, lors d’une séance officielle à l’Institut de France, Louis-Jacques-Mandé Daguerre (1787-1851),…
Le sport et la photographie scientifique
Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, la photographie, en tant que pratique professionnelle ou de loisir, suscite un engouement…
Liane de Pougy et le charme de l’ambiguïté à la Belle Époque
Depuis le Second Empire, le portrait photographique connaît un véritable essor,…
Représentations de la danseuse à la barre à la fin du XIXe siècle
Indispensable pour s’échauffer, pour apprendre le bon placement du corps et pour faire travailler correctement les muscles dans les positions qui…
Dunkerque : l’évacuation des soldats
Du 20 mai au 3 juin 1940 se déroule la bataille de Dunkerque. Dépassées et défaites par les forces…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel