Aller au contenu principal
Abainville (Meuse) - Vue extérieure des bâtiments de la forge.

Abainville (Meuse) - Vue extérieure des bâtiments de la forge.

Tôlerie des forges d'Abainville (Meuse).

Tôlerie des forges d'Abainville (Meuse).

Abainville - Lamineur - rattrapeur.

Abainville - Lamineur - rattrapeur.

Abainville - Groupe d'ouvriers lamineurs.

Abainville - Groupe d'ouvriers lamineurs.

Abainville (Meuse) - Vue extérieure des bâtiments de la forge.

Abainville (Meuse) - Vue extérieure des bâtiments de la forge.

Date de création : 1837

Date représentée :

H. : 21,1 cm

L. : 30,1 cm

plume, encre, lavis

Domaine : Dessins

© Coll. Musée de l'Histoire du Fer Nancy-Jarville - C.Philippot

Les forges d’Abainville

Date de publication : Septembre 2011

Auteur : Maria-Thérésa PONTOIS

Les forges d’Abainville

Les forges d’Abainville

Dans l’histoire industrielle de la France, les dates de ces quatre œuvres de François Bonhommé sont contemporaines du grand démarrage de la sidérurgie moderne, lui-même étroitement lié à la montée des commandes en provenance des chemins de fer (rails, locomotives, matériel roulant) et des ouvrages d’art utilisant désormais la fonte et le fer (ponts, gares, halles recourant aux charpentes métalliques).

Dans la décennie concernée, les hauts-fourneaux et forges de la région située aux confins de la Lorraine, de la Champagne et des Ardennes sont, avec les établissements du Berry et de la Bourgogne, en tête de l’industrie du métal en France.

La vue extérieure des bâtiments de la forge dénote cette précision de la représentation qui a dominé toute l’œuvre de Bonhommé. Au centre, noter le canal d’amenée d’eau de l’Ornain, qui entre en sous-sol dans l’usine où les roues hydrauliques sont logées ; à l’arrière-plan, les cheminées indiquent la présence des hauts-fourneaux et de la forge. La force motrice reste hydraulique donc, si le charbon joue son rôle dans le processus métallurgique. À gauche, un chantier de bois de charpente au premier plan ; à l’arrière, la grosse toiture du magasin des fers et ferrailles, dont la maison du directeur est immédiatement voisine ; plus loin encore, on aperçoit deux ou trois travées de logements ouvriers dans une rangée d’habitations. À droite, le magasin (ouvert) destinée à stocker la houille.

La vue intérieure de la tôlerie – un bâtiment ouvert, pour la ventilation, à charpente de bois – décrit un processus complet allant du réchauffement des fers dans les fours situés à gauche, pour les rendre suffisamment malléables, à leur laminage (fers ronds et tôles) au centre et à droite (noter le système de rouleaux). L’atelier grouille de monde : des ouvriers véhiculent le charbon (cf. la brouette), d’autres manipulent de lourds outils destinés à activer le réchauffement ou à saisir et à guider les produits laminés. L’ingénieur Eugène Flachat et son cabinet d’études parisien ont participé à son équipement à partir de 1834. D’emblée donc, Bonhommé était en contact avec l’avant-garde industrialiste de la France de Louis-Philippe, ce qui confère une authenticité et un intérêt de mémoire supplémentaires à son témoignage.

Protégé jusqu’aux genoux par son tablier de cuir, le lamineur-rattrapeur se prépare à saisir à l’aide de sa longue pince un fer rond qui va sortir du laminoir. L’homme est au contact presque direct du métal encore très chaud, qu’il donne l’impression de dompter.

Le groupe d’ouvriers est intéressant à deux titres : d’abord parce qu’il met en évidence la spécialisation par produits de trois d’entre eux en tout cas, comme l’indiquent les différences de forme des pinces ; ensuite parce qu’il suggère bien la nature particulière du temps du travail : les trois ouvriers ne travaillent pas en même temps ; à l’attitude du personnage principal, qui évoque celle d’un gladiateur, s’oppose celle des deux autres : l’un s’appuie sur son outil dans un geste de repos, l’autre s’octroie une pipe.

Bonhommé croyait comme Saint-Simon au rôle social de l’art, à la capacité de persuasion d’images émouvantes et pittoresques, et il entendait reprendre un demi-siècle plus tard l’œuvre des planches gravées de l’Encyclopédie des Arts et Métiers. C’est un premier niveau de lecture : les travaux de l’industrie faisaient partie, pour lui, du patrimoine national et devaient être fixés pour la postérité.

Mais les hommes lui tenaient encore plus à cœur. La grandeur du travail industriel est faite de savoir-faire, mais aussi de danger et de souffrance – comme le laissent deviner les attitudes et les gestes, saisis avec autant d’avidité que les détails techniques.

Mettant au service de l’histoire industrielle sa formation aux Beaux-Arts (si sensible dans ses jeux de lumière et dans la fermeté de son dessin) et sa nouvelle passion personnelle, il aboutit à des réalisations d’une vérité et d’une force qui font de lui un témoin hors pair de la civilisation matérielle de son temps. Lui-même y voyait avant tout les instruments d’une pédagogie introduisant à la connaissance de la culture du travail.

La qualité de son œuvre était si évidente que les milieux industriels (sinon ceux de l’administration ou de l’État) s’en emparèrent tout de suite. Eugène Flachat fut le premier acquéreur de la Tôlerie des forges d’Abainville, représentation d’un lieu qui l’avait réuni au peintre dans une communauté de travail, celui-ci rendant en somme hommage à celui-là. Une rencontre symbolique en un temps où l’on commençait à parler beaucoup de l’alliance de l’Art et de l’Industrie.

Alain AUCLAIR, Les Ingénieurs et l’équipement de la France. Eugène Flachat (1802-1873), Mâcon, écomusée de la communauté urbaine Le Creusot – Montceau-les-Mines, 1999.

Marie-Laure GRIFFATON, François Bonhommé, peintre, témoin de la vie industrielle au XIXe siècle, Metz, Éditions Serpenoise, 1996.

Maria-Thérésa PONTOIS, « Les forges d’Abainville », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 13/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/forges-abainville

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Intérieurs de canuts

Intérieurs de canuts

La Fabrique de soieries a été créée en 1536 par François Ier. Elle a bénéficié d’abord de l’élan économique apporté par les foires au…

Intérieurs de canuts
Intérieurs de canuts
La banlieue parisienne à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle

La banlieue parisienne à la fin du XIXe siècle

Dès la seconde moitié du XIXe siècle, la banlieue nord de Paris a été soumise à une industrialisation massive. Ainsi est né un paysage…

Grève à Saint-Ouen

Grève à Saint-Ouen

Ville située dans la banlieue industrielle du nord de Paris, Saint-Ouen compte au début du XXe siècle de nombreux ateliers métallurgiques et des…
Le travail en atelier et en manufacture

Le travail en atelier et en manufacture

En France, jusqu’aux années 1820, le travail des enfants, qui aident les adultes dans leurs tâches agricoles ou artisanales, ne fait pas débat.…

Le travail en atelier et en manufacture
Le travail en atelier et en manufacture
L'ouvrier artisan

L'ouvrier artisan

Gustave Caillebotte (1848-1894) montre des artisans au travail dans un appartement bourgeois peut-être situé dans la plaine Monceau, dans l’ouest…
Aspects populaires du cubisme

Aspects populaires du cubisme

L’empathie pour le populaire

La bohème montmartroise était essentiellement composée de jeunes gens en rupture avec le milieu bourgeois. Vivant…

Aspects populaires du cubisme
Aspects populaires du cubisme
Aspects populaires du cubisme
Aspects populaires du cubisme
Les forges d’Abainville

Les forges d’Abainville

Dans l’histoire industrielle de la France, les dates de ces quatre œuvres de François Bonhommé sont contemporaines du grand démarrage de la…

Les forges d’Abainville
Les forges d’Abainville
Les forges d’Abainville
Les forges d’Abainville
La « Relève », entre chantage et otages

La « Relève », entre chantage et otages

Le travail rend libre

Pendant l’été 1942, une série d’affiches s’adresse aux centaines de milliers de chômeurs que compte la France et son…

La « Relève », entre chantage et otages
La « Relève », entre chantage et otages
De l'artisanat à l'industrie métallurgique

De l'artisanat à l'industrie métallurgique

Les représentations de Bouhot et de Chassériau datent des années 1820-1840, celles du démarrage décisif de l’industrialisation moderne, qui…

De l'artisanat à l'industrie métallurgique
De l'artisanat à l'industrie métallurgique
De l'artisanat à l'industrie métallurgique
De l'artisanat à l'industrie métallurgique
Les Travailleurs de la mine : ceux du jour

Les Travailleurs de la mine : ceux du jour

Les grandes heures du charbon dans le Pas-de-Calais au début du XXe siècle

Si l’électricité et le pétrole marquent l’entrée dans l’ère…

Les Travailleurs de la mine : ceux du jour
Les Travailleurs de la mine : ceux du jour