Le Scribe accroupi
Auguste Mariette devant l'entrée déblayée à la gauche du Sphinx
Plan de la tombe de Ti à Saqqarah
Taureau Apis
Le Scribe accroupi
Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web
Date de création : Égypte ancienne, IVe dynastie - 2620 - 2500 avant Jésus-Christ
H. : 53,7 cm
L. : 44 cm
Découvert à Saqqara-Nord, Égypte.
Profondeur : 35 cm
Calcaire peint, albâtre égyptien, cristal de roche, cuivre, yeux incrustés.
Domaine : Sculptures
© Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Christian Décamps
E 3023 - N 2290 - 16-536077
Les découvertes de Saqqarah
Date de publication : Janvier 2010
Auteur : Alain GALOIN
Située sur un plateau à l’ouest de Memphis, la nécropole de Saqqarah est non seulement la plus vaste d’Égypte mais aussi la plus ancienne. Ses vestiges témoignent de toute la longue histoire de l’Égypte pharaonique, depuis la Ier dynastie jusqu’à l’époque ptolémaïque. Lorsque Napoléon Bonaparte débarque à Alexandrie en 1798, ce site prestigieux est encore méconnu : seule la grande pyramide à degrés du pharaon Djoser émerge de décombres informes. C’est au général Enrico Menu von Minutoli (1772-1846), chef de la mission scientifique envoyée en Égypte en 1818 par le gouvernement prussien, que l’on doit la première exploration de cette pyramide avec l’aide de l’égyptologue italien Girolamo Segato (1792-1836). En 1836, John Shae Perring effectue des déblaiements pour le compte du colonel Richard W. Howard-Vyse (1784-1853) et dresse un plan précis des infrastructures du monument. En 1842, Karl Richard Lepsius (1810-1884) dirige une nouvelle mission prussienne et dresse un inventaire monumental de l’Égypte antique publié dans les Denkmäler aus Ägypten und Äthiopien (« Monuments d’Égypte et d’Éthiopie ») en 1849-1850, avec de nombreuses planches concernant le site de Saqqarah. Mais c’est Auguste Édouard Mariette (1821-1881) qui est le premier à considérer la nécropole dans son ensemble. Durant toute sa carrière, il y conduira des fouilles. Le 12 novembre 1851, il met au jour le Serapeum de Memphis, une découverte qui lui assure la célébrité. Il s’intéresse notamment aux nombreuses sépultures de particuliers, auxquelles il donne le nom – toujours utilisé de nos jours dans la terminologie égyptologique – de « mastabas ».
Il existe de nombreuses photos d’Auguste Mariette prises sur les innombrables chantiers de fouilles qu’il a ouverts en Égypte. Sur celle-ci, il pose sur la rampe d’accès d’une des sépultures de Saqqarah. Il s’appuie sur une canne et porte le fez, coiffure qui orientalise le célèbre archéologue.
Au cours de ses fouilles, il effectue de multiples dessins et relevés, comme ce plan du mastaba de Ti à Saqqarah. En forme de L inversé, il obéit à un plan très simple, orienté nord-sud : un portique d’entrée donne accès à une cour ouverte à piliers ; de là, deux corridors successifs mènent à une première salle puis à la chapelle vouée aux offrandes et au culte. Découvert par Mariette en 1860, ce mastaba est une sépulture familiale dont le riche décor montre le rang social de Ti, contemporain et proche de plusieurs pharaons de la Ve dynastie.
À Saqqarah, l’égyptologue fouille quantité de mastabas et exhume des centaines d’objets archéologiques, dont le célèbre Scribe accroupi, découvert le 1er novembre 1850, alors qu’il désensable le dromos (allée menant à un temple) du Serapeum. Assis en tailleur, le scribe tient de la main gauche le rouleau déroulé sur ses genoux. Il s’agissait sans nul doute d’un fonctionnaire important, si l’on en juge par la qualité surprenante de la sculpture, remarquable par le traitement du visage et du corps. Les couleurs d’origine et l’intensité du regard – révélatrice d’une connaissance de l’anatomie oculaire exceptionnelle pour l’époque – comptent pour beaucoup dans la force d’expression de cette statuette.
L’une des découvertes majeures de Mariette à Saqqarah est sans nul doute la mise au jour, en octobre 1850, du Serapeum, la nécropole des taureaux Apis, déjà repérée en 1847 par l’amateur britannique Harris. Apis est le taureau sacré, divinité de la fertilité et image vivante du dieu Ptah sur terre. Les Égyptiens pensaient qu’il était une réincarnation d’Osiris. Le Serapeum aurait été inauguré par le pharaon Amenhotep III (1387-1350 av. J.-C.), et ce culte aurait duré jusqu’à la fin de la période ptolémaïque, quand Apis fut assimilé à la divinité grecque Sérapis. À proximité du dromos, Mariette a découvert deux chapelles funéraires dont l’une a livré cette belle statue en calcaire du taureau Apis.
Parmi les nombreux chantiers de fouilles ouverts par Auguste Mariette en Égypte, le site de Saqqarah est probablement celui auquel il est le plus attaché. Il s’est d’ailleurs fait construire une maison au milieu des ruines. Établie en 1877, la liste non exhaustive des tombeaux qu’il y a explorés regroupe plus de cent sépultures avec l’identité du défunt et sa datation. Néanmoins, le Serapeum reste sa plus belle découverte. Sur la fin de sa vie, Mariette est conscient que la nécropole est loin de lui avoir livré tous ses secrets. Il le déplore dans une lettre à Ernest Desjardin, datée du 18 octobre 1880 : « J’ai commencé ma carrière par le Serapeum ; je m’estimerais très heureux si c’est par le Serapeum que je pouvais la finir. Malheureusement, je crains d’avoir attendu un peu tard. » Il reste que la fouille du Serapeum présente déjà les aspects de ce que sera une grande campagne archéologique moderne. C’est la prospection d’un ensemble cohérent, d’intérêt éminemment scientifique. Les objets ne sont ni vendus, ni dispersés, encore moins détournés par l’égyptologue, mais précieusement conservés au musée de Boulaq ou au musée du Louvre. Auguste Mariette est incontestablement le fondateur d’une archéologie militante. Il est un précurseur en matière de préservation des sites découverts et de lutte contre le pillage des antiquités égyptiennes. Son successeur et disciple Gaston Maspero (1846-1916) aura à cœur de poursuivre l’œuvre du maître, dans le même esprit. À leur suite, de nombreux archéologues français et étrangers continueront à explorer la nécropole de Saqqarah. Arrivé sur le site en 1926, Jean-Philippe Lauer (1902-2001) y travaillera jusqu’à sa mort. Plusieurs générations d’égyptologues trouveront encore dans ce lieu exceptionnel un terrain d’investigations privilégié.
Élisabeth DAVID, Mariette Pacha, Paris, Pygmalion, 1997.
Marc DESTI (dir.), catalogue de l’exposition Des dieux, des tombeaux, un savant. En Egypte sur les pas de Mariette Pacha, Boulogne-sur-Mer, 10 mai-30 août 2004, Paris, Somogy, 2004.
Gilles LAMBERT, Auguste Mariette, Paris, Éditions Jean-Claude Lattès, 1997.
Claudine LE TOURNEUR D’ISON, Mariette Pacha ou le Rêve égyptien, Paris, Plon, 1999.
Auguste MARIETTE, Voyage dans la Haute-Egypte : compris entre Le Caire et la première cataracte, Paris, rééd. Errance, 1999.
Jean VERCOUTTER, A la recherche de l’Egypte oubliée, Paris, Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard » n° 1, 1998.
Alain GALOIN, « Les découvertes de Saqqarah », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 13/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/decouvertes-saqqarah
Lien à été copié
Découvrez nos études
"Tanagra" par Jean-Léon Gérôme
A la fin des années 1860, les habitants de plusieurs villages de Béotie proches de l’antique cité…
Les fouilles de Khorsabad
En 1842, lorsque Louis-Philippe ouvre une nouvelle agence consulaire à Mossoul, le poste de…
La Croisière jaune entre science et marketing
La France de l’entre-deux-guerres se passionne pour son empire, dont hommes et ressources ont contribué à sa…
Napoléon Bonaparte et l'Égypte
En avril et juillet 1795, les traités de Bâle mettent fin à la première coalition des puissances européennes dressées contre la France…
Papety, un artiste français en Grèce vers 1846
Prix de Rome en 1836, Papety séjourne en Italie de 1836 à 1841 où sa production est fortement marquée par Ingres…
La Seconde mission française à Khorsabad
En 1851, l’Assemblée nationale vote un crédit pour la poursuite des fouilles menées en 1843-1844 par…
Auguste Mariette
Riche de trois millénaires d’histoire, l’Égypte voit son antique culture s’effacer peu à peu à la suite des conquêtes grecque et romaine. Le…
Les découvertes de Saqqarah
Située sur un plateau à l’ouest de Memphis, la nécropole de Saqqarah est non seulement la plus vaste d’Égypte mais aussi la plus ancienne. Ses…
Mariette Pacha : un Français pour créer le Service des antiquités de l’Égypte
En 1857, l’égyptologue français Auguste Mariette (1821-1881), conservateur adjoint au musée…
Frontispice de la Description de l’Égypte
Dix ans après le coup d’Etat du 18 Brumaire, Napoléon décide de publier l’ensemble des documents recueillis par la…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel