Raccommodeur de faïences
Marchand de paniers
Hôtel Carnavalet
Raccommodeur de faïences
Auteur : ATGET Eugène
Lieu de conservation : Bibliothèque nationale de France (BnF, Paris)
site web
Date de création : 1899
Date représentée : 1899
Série : Vie et métiers à Paris.
Épreuve sur papier albuminé.
Domaine : Photographies
Bibliothèque Nationale de France - Domaine public © Gallica
PET FOL-OA-615 (1)
Le Vieux Paris - la photographie documentaire
Date de publication : Octobre 2005
Auteur : Charlotte DENOËL
Mutations urbaines
« Dehors, des thèmes populaires finement écrits pour des instruments variés, depuis la corne du raccommodeur de porcelaine ou la trompette du rempailleur de chaises, jusqu’à la flûte du chevrier, qui paraissait dans un beau jour être un pâtre de Sicile, orchestraient légèrement l’air matinal, en une « ouverture pour un jour de fête » » : dans La Prisonnière, Marcel Proust a admirablement décrit les cris des marchands ambulants dont Paris retentissait encore vers 1900.
Partie intégrante de l’imagerie populaire dès le XVIe siècle, ces petits métiers contribuèrent longtemps au charme de la capitale, faisant le bonheur des passants. Toutefois, sous l’effet conjugué de l’essor industriel du XIXe siècle et de la réglementation de plus en plus stricte de la voirie parisienne, ils sont en voie d’extinction dès les années 1880. À ces mutations sociales s’ajoutent de nombreux changements dans la topographie parisienne, consécutifs aux grands travaux d’aménagement entrepris par le baron Haussmann entre 1853 et 1869.
Beaucoup de rues pittoresques de la capitale laissent place à de grandes artères adaptées à la circulation et à des infrastructures modernes. Toutefois, ces nouvelles artères sont tout autant productrices de petits métiers – camelots divers, hommes-sandwichs, bonneteurs – que les nostalgiques du « Paris qui s’en va » ne semblent pas voir avant leur disparition… dans les années 1950.
Photographier le Paris pittoresque
Face à la désagrégation de l’ancien tissu urbain, nombreuses sont les voix qui s’élèvent pour réclamer la sauvegarde du Paris pittoresque et des vieux quartiers qui n’ont pas encore été touchés par ces remaniements. Par son œuvre documentaire, Eugène Atget (1857-1927) a joué un grand rôle dans ce combat : dès 1898, date de la création de la Commission du Vieux Paris, ce photographe consacre plusieurs séries aux petits métiers et à la topographie du Vieux Paris.
Dans la première série qui comprend au moins 135 planches, Atget s’intéresse aux marchands et leur demande de poser pour lui, comme le montrent deux clichés sur papier albuminé d’un raccommodeur de faïences et d’un vannier. Dans ces deux photographies, cadrées au plus près, habits et marchandises permettent d’identifier le métier qu’exercent ces personnages. Tandis que le raccommodeur de faïences est portraituré « sur le vif », accroupi sur le trottoir et absorbé dans sa tâche, la pose un peu figée du vannier debout devant la gare de Sceaux, chargé de nombreux et volumineux paniers, s’inscrit dans une tradition iconographique ancienne qui remonte à l’Ancien Régime.
Cette culture classique s’observe également dans les vues d’architecture, qui visaient à donner une représentation aussi claire et aussi exacte que possible de la réalité. Adoptant le point de vue du piéton, du flâneur, Atget photographie méthodiquement les rues et les monuments situés dans les quartiers historiques menacés de démolition. Il a ainsi consacré plusieurs vues à la rue de Sévigné, située au cœur du Marais, et à ses hôtels particuliers. L’une d’elles représente l’hôtel Carnavalet en perspective, tel qu’il est visible du côté de la rue de Sévigné. Le choix d’un cadrage serré et d’une grande profondeur de champ met en valeur l’architecture de l’édifice, dont la façade classique se déploie harmonieusement le long de la rue de Sévigné.
L’essor de la photographie documentaire
Conscient de la valeur historique et documentaire de ses clichés, Eugène Atget procédait systématiquement par séries, archivant chacun de ses tirages et constituant des albums thématiques qu’il proposait aux musées et aux bibliothèques ainsi qu’à des clients privés nostalgiques du Vieux Paris. Cette approche sérielle et la volonté de promouvoir une certaine objectivité font considérer ce photographe comme le père de la photographie documentaire.
Sa renommée tardive est le fait de la photographe américaine Bérénice Abbot qui, à la mort d’Atget en 1927, acquit un ensemble de négatifs sur verre et de tirages et contribua à faire connaître l’œuvre d’Atget aux États-Unis, puis en Europe. La découverte de celle-ci a conduit un certain nombre de photographes à adopter dès les années 1920-1930 une nouvelle démarche documentaire qui, de Bérénice Abbot à Bernd et Hilla Becher, pour ne citer que ces trois noms, tend à considérer l’objet photographié comme un document d’étude, susceptible de fournir des informations sur un sujet donné.
Michel FRIZOT (dir.), Nouvelle histoire de la photographie, Paris, Larousse-Adam Biro, 2001.
Jean-Claude LEMAGNY, Atget, le pionnier, Paris, Marval, 2000.
Jean-Claude LEMAGNY et André ROUILLE (dir.), Histoire de la photographie, Paris, Larousse-Bordas, 1998.
Eugène Atget : intérieurs parisiens, catalogue de l’exposition du musée Carnavalet, 19 octobre-21 novembre 1982, Paris, Éd. Carré Paris-Musées, 1982.
Charlotte DENOËL, « Le Vieux Paris - la photographie documentaire », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 12/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/vieux-paris-photographie-documentaire
Pour aller plus loin : Exposition Eugène Atget, BNF
Lien à été copié
Albums liés
Découvrez nos études
Le Premier crématorium de Paris
La construction de ce bâtiment, rêve de Bosphore sur la rive droite de la Seine, est le point final d’un…
Le grand magasin, « temple de la Femme »
Au début du XIXe siècle, beaucoup de vêtements passent d’une classe à l’autre : la « marchande à la toilette » achète d’occasion des…
L’Opéra de Charles Garnier
Décidée en 1858 pour remédier à la vétusté et à l’incommodité de la salle de la rue Le Pelletier, la…
La Guadeloupe, une image au service de la colonisation
L'histoire de la colonisation de la Guadeloupe par les européens débute avec le second voyage de Christophe…
Le Palais du Trocadéro, un bâtiment disparu
Le Trocadéro fut élevé sur une des collines de Paris à l’occasion de l’Exposition Universelle de…
Le pont Neuf et la Samaritaine au XVIIIe siècle
Cette vue du Pont Neuf et de la Samaritaine est datée et signée par l’artiste, avec une mention inscrite dans l’ombre du coin…
Le phare du cap Fréhel
Les premiers phares apparaissent de façon isolée, souvent à l’initiative de grands ports…
De la place de grève à la place de l'Hôtel de ville
La place de Grève, devenue en 1803 place de l’Hôtel de Ville, abrite le siège de la municipalité parisienne…
Le palais de la Porte-Dorée, témoignage de l’histoire coloniale
Le palais de la Porte Dorée représente de seul vestige monumental de l’Exposition…
Le Vieux Paris - la photographie documentaire
« Dehors, des thèmes populaires finement écrits pour des instruments variés, depuis la corne du raccommodeur de porcelaine ou…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel