Aller au contenu principal
Mme Léon Bertaux - Sculpteur française

Mme Léon Bertaux - Sculpteur française

Auteur : CARJAT Étienne

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : vers 1870

H. : 10,5 cm

L. : 6 cm

épreuve sur papier albuminé à partir d'un négatif verre, contrecollée sur papier canson

Domaine : Photographies

© RMN - Grand Palais (musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski

lien vers l'image

98-009818 / PHO 1986 75 44

Hélène Bertaux, sculptrice, vue par Étienne Carjat

Date de publication : Juillet 2016

Auteur : Saskia HANSELAAR

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, l’usage de la photographie et de ses dérivés techniques s’est développé malgré les nombreux débats issus de son utilisation et de son identité dans le milieu artistique. Dans les années 1850 et 1860, considérée par ses opposants, tels que Charles Blanc et Henri Delaborde, comme une reproduction mécanique et non intellectuelle et artistique -au contraire de l’estampe-, la photographie ne peut alors trouver une crédibilité que par l’expression du portrait. En opposition directe à la gravure pour la reproduction d’œuvres d’art, la photographie est pourtant jugée utile pour la transcription du réel et donc du vivant.

Le photographe de ce cliché, Etienne Carjat, débute sa carrière vers 1858, grâce à Pierre Petit, lui-même photographe de métier. Reconnu comme un très bon caricaturiste, spécialisé dans le portrait-charge, tout comme Félix Tournachon dit Nadar, il ouvre son premier atelier photographique, rue Laffitte, en 1861 et commence à immortaliser les artistes et intellectuels en vue sous le Second Empire, tels que Gustave Courbet ou Jean-Auguste-Dominique Ingres. La plupart sont ses amis et le suivent également dans la création d’un journal intitulé Le Boulevard.

Popularisées et inventées par Eugène Disdéri dans les années 1850, les photographies de type carte de visite sont très populaires jusqu’à la fin des années 1860, encourageant la collection de ces portraits de grands hommes et grandes femmes ou d’anonymes. Ces types de photographies permettaient de réaliser de véritables campagnes de valorisation pour ces personnalités.

Comme à son habitude, Carjat fait poser son modèle devant un fond dépourvu de décor. La sculptrice Hélène Bertaux, née Pilate, est présentée telle une artiste et non une personnalité déjà reconnue. Cette élève de Pierre Hébert, sculpteur, est photographiée de plein pied à son travail. Elle est occupée à finaliser une esquisse pour une de ses premières grandes commandes privées. Dans un décor sobre amplifiant sa place de sujet principal, elle porte un tablier de travail, couvrant totalement sa robe de ville et gommant ainsi les particularités de son sexe. Penchée sur son ouvrage, tout autant que tournée vers l’objectif, elle regarde intensément le spectateur et n’est pas dans une attitude de séduction, mais bien de persuasion et de forte concentration.

L’œuvre qu’elle présente ainsi aux yeux du public est la plus grande sculpture réalisée par une femme à cette date. Ce monument était une fontaine, réalisée pour la place Longueville à Amiens. En 1861, un riche mécène, Herbet-Briez, avait donné à la ville picarde la somme de 20 000 francs afin qu’une fontaine, composée d’une figure de nymphe à la coquille en pied et de sept angelots, dessinée par son fils Léon Herbet soit érigée. Hélène Bertaux est choisie pour accomplir ce tour de force. L’œuvre est inaugurée en 1864. Réalisée en bronze, la fontaine monumentale est transférée en 1888, dans les petits jardins du boulevard de Belfort, pour finalement être fondue en 1941.

Souvent oublié au profit du plus reconnu Nadar, Etienne Carjat a pourtant été l’un des meilleurs photographes de son temps, capable de révéler la force de caractère de ses modèles. Ainsi, devant le succès de ses épreuves, Gustave Courbet ou encore Victor Hugo lui redemandèrent des clichés de leurs portraits. Habitué à la pratique du portrait-charge, Carjat a capturé la volonté inébranlable d’Hélène Bertaux, et rend compte avec justesse du charisme et de la grandeur de cette sculptrice. La commanditrice a en outre choisi un moment de sa carrière qui n’est pas anodin. Cette sculpture monumentale qui l’accompagne dans l’immortalité est l’œuvre qui la fait connaître. L’année d’après, en 1864, son Jeune Gaulois Captif (plâtre disparu, version en marbre acheté par l’état en 1867 et conservé au musée des Beaux-arts de Nantes) est l’un des tout premiers nus masculins réalisés par une femme, pour lequel elle obtient une médaille de première classe. Grâce à cette œuvre, elle fait désormais partie des sculpteurs en vogue sous le Second Empire et sous la Troisième République et obtiendra des commandes prestigieuses pour les nouvelles ailes du Louvre ou pour l’Hôtel de Ville de Paris. Elle est également la première femme à obtenir une médaille d’Or de première classe pour Psyché sous l’empire du Mystère (1889, plâtre, 1, 81 m x 0,49 m x 0, 43 m, Sète, musée Paul Valéry), à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1889. Elle fonde et préside l’Union des Femmes Peintres et Sculpteurs en 1881. Grâce à son combat féministe, les jeunes femmes purent enfin accéder aux cours dispensés par l’Ecole nationale des Beaux-arts et concourir pour le Prix de Rome, qui leur avait toujours été refusé.

Les débuts de la photographie - La quête de légitimité artistique, une vidéo du MOOC,Une brève histoire de la photographie proposé par La RMN Grand Palais et la fondation Orange

COLLECTIF, Étienne Carjat (1828-1906) : photographe, cat. exp. (Paris, 1982-1983), Paris, musées de la Ville de Paris, 1982.

LEPAGE Édouard, Une page de l’histoire des arts au XIXe siècle. Une conquête féministe : Mme Léon Bertaux, Saint-Michel-de-Chavaignes, Soleil en livres, 2009 (1re éd. Paris, J. Dangon, 1912).

Saskia HANSELAAR, « Hélène Bertaux, sculptrice, vue par Étienne Carjat », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 14/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/helene-bertaux-sculptrice-vue-etienne-carjat

Un article sur Hélène Bertaux , Icônes, exposition virtuelle, notices biographiques des femmes artistes sur le site du Ministère de la Culture

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

La France au service de l'unité italienne

La France au service de l'unité italienne

Après les révolutions de 1848, l’Italie a retrouvé le régime de 1815 : d’un côté des petites souverainetés despotiques sans aucun lien confédéral…

La Tour du travail

La Tour du travail

La glorification du monde du travail

Cherchant un symbole marquant pour l’Exposition universelle de 1900, Armand Dayot eut l’idée d’un monument…

La Tour du travail
La Tour du travail
Une révolution esthétique : le <i>Balzac</i> de Rodin

Une révolution esthétique : le Balzac de Rodin

Victoire d’une révolution esthétique

“ Vos photographies feront comprendre au monde mon Balzac ! ” s’exclame Rodin en 1908 quand il découvre les…

<i>L'homme qui marche</i>

L'homme qui marche

Un homme qui marche à la fin du siècle

L’exposition universelle qui ouvre ses portes en grandes pompes à Paris au printemps 1900 se présente au…

L'Académie de France à Rome : le palais Mancini

L'Académie de France à Rome : le palais Mancini

Fondée par Colbert en 1666 sur les conseils des peintres Charles Le Brun et Charles Errard, l’Académie de France à Rome occupe une place à part…

L'Académie de France à Rome : le palais Mancini
L'Académie de France à Rome : le palais Mancini
Voltaire nu ou le Vieillard Idéal

Voltaire nu ou le Vieillard Idéal

François Marie Arouet dit Voltaire (1694-1778) est le philosophe des Lumières par excellence. Son succès littéraire public débute grâce aux pièces…

Henri de Rochefort

Henri de Rochefort

Portrait d’un rebelle

Lorsqu’il pose en 1884 pour Rodin, Henri Rochefort (1831-1913), aristocrate converti au socialisme, est célèbre pour son…

La Chasse à courre sous le Second Empire

La Chasse à courre sous le Second Empire

Codification de la vénerie sous le Second Empire

Napoléon III rétablit la vénerie impériale en 1852 et, renouant avec la tradition de l’…

Rodin : le buste de Clemenceau

Rodin : le buste de Clemenceau

Un buste de commande

En 1900, la force de ses portraits avait déjà valu une réputation mondiale à Rodin : écrivains, industriels et hommes…

Le Développement des pratiques amateur féminines

Le Développement des pratiques amateur féminines

S’occuper, une nouvelle nécessité pour les femmes

Au cours du XIXe siècle, les femmes se retirèrent progressivement de la vie active…

Le Développement des pratiques amateur féminines
Le Développement des pratiques amateur féminines