Aller au contenu principal
Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain  dans la voiture-salon de Hitler

Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain dans la voiture-salon de Hitler

Le Ministre de l'Intérieur von Ribbentrop et le chef de l'OKW Keitel saluent le maréchal Pétain

Le Ministre de l'Intérieur von Ribbentrop et le chef de l'OKW Keitel saluent le maréchal Pétain

Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain  dans la voiture-salon de Hitler

Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain dans la voiture-salon de Hitler

Date de création : 24 octobre 1940

Date représentée : 24 octobre 1940

Domaine : Photographies

© BPK, Berlin, Dist. GrandPalaisRmn / Heinrich Hoffmann

Lien vers l'image

18-539152

L’entrevue de Montoire

Date de publication : Mars 2012

Auteur : Alexandre SUMPF

La rencontre du 24 octobre 1940

Le 24 octobre 1940, le maréchal Pétain rencontre pour la première fois Hitler et son ministre des Affaires étrangères dans la gare de Montoire-sur-le-Loir (Loir-et-Cher). Après une poignée de main échangée entre les deux hommes sur le quai, la discussion se déroule dans un wagon du train personnel du Führer. Précédée et préparée par la rencontre du 22 octobre entre Pierre Laval (alors ministre des Affaires étrangères), Hitler et von Ribbentrop, cette entrevue visant à préciser les principes de la collaboration du gouvernement français avec l’Allemagne nazie n’a pas de caractère officiel et ne débouche sur aucune mesure précise.

Elle comporte toutefois une forte valeur symbolique, qui lui confère une importance historique et politique. De ce fait, les images de l’événement réalisées par la propagande nazie et largement diffusées jouent, notamment en France, un rôle considérable dans les représentations, la perception et les conceptions associées à la fois au régime de Vichy et au maréchal Pétain. Réalisées par Heinrich Hoffmann le 24 octobre 1940 dans le cadre du tournage d’un film d’actualités consacré à l’événement, les deux photographies étudiées ici, « Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain » et « Le ministre de l’Intérieur von Ribbentrop et le chef de l’OKW Keitel saluent le maréchal Pétain », sont donc en elles-mêmes très significatives.

La défaite incarnée

Pris par l’un des photographes « officiels » d’Hitler, Heinrich Hoffmann, le cliché « Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain » est assez saisissant. Il semble avoir été pris sur le vif, en dehors de toute pose (von Ribbentrop, presque hors champ, a l’air surpris). Les trois hommes ont pris place autour d’une table dans un compartiment aux boiseries très sombres et dont les rideaux ont été tirés. La lumière répandue par le flash dans cet espace exigu frappe jusqu’aux cheveux brillantinés du Führer. L’air perdu, Pétain joint les mains sous le regard en biais presque carnassier d’Hitler.

« Le ministre de l’Intérieur von Ribbentrop et le chef de l’OKW Keitel saluent le maréchal Pétain » immortalise la rencontre entre les deux délégations. Elle est centrée sur la poignée de main qu’échangent le maréchal Pétain et le chef du haut commandement de l’armée de terre allemande Keitel (au premier plan), tous deux en uniforme, puis composée suivant la ligne diagonale formée par la délégation nazie. Au second plan et à droite de Keitel, le ministre de l’Intérieur von Ribbentrop (en uniforme lui aussi) salue un autre membre de la délégation française, qui reste ici invisible. À l’arrière-plan plus à droite, un simple soldat de la Wehrmacht armé de son fusil regarde Pétain, le visage de trois quarts par rapport à l’objectif.

Les vainqueurs et le vaincu

Ces deux photographies montrent tout d’abord que la France vaincue entend collaborer avec la puissance occupante. Accueilli et reçu par les plus hauts responsables nazis, le maréchal est traité et respecté en homme d’État (et en militaire), salué et placé à la même table qu’Hitler. Partenaire à part entière, la France conserverait ainsi sa souveraineté, sa dignité et son honneur. Pour le régime de Vichy, il s’agit de signifier que la défaite peut être transformée en participation d’égal à égal à l’ordre nouveau. Pour les nazis, cette mise en scène pourrait servir à s’assurer de la collaboration du peuple français qui, si elle n’est pas essentielle, constitue tout de même un atout stratégique et tactique.

Cependant, de nombreux éléments distinguent assez nettement et assez durement les vainqueurs et le vaincu et suggèrent l’humiliation française. Ainsi, on peut opposer le pluriel des vainqueurs au singulier du vaincu, puisque Pétain apparaît seul face aux Allemands dans les deux images. D’autre part, et alors que la rencontre a lieu en France, ce sont bien les nazis qui accueillent Pétain : le soldat armé de la seconde image rappelle que l’ordre est assuré par les occupants, tandis que le wagon de « Rencontre entre Hitler, von Ribbentrop et Pétain » est bien celui d’Hitler, qui préside la séance (en bout de table). Enfin, cette dernière image propose le saisissant contraste entre un vieil homme fatigué, à l’air hagard, et un chef dont le regard noir, cruel et déterminé a tout de celui, humiliant, du rapace sur sa proie.

L’ambiguïté d’une telle image incarne en fait celle du régime de Vichy, qui tente de concilier défaite et honneur.

AZEMA Jean-Pierre, De Munich à la Libération, 1938-1944, Paris, Éditions du Seuil, 1979.

AZEMA Jean-Pierre et WIEVIORKA, Olivier, Vichy, 1940-1944, Paris, Perrin, 1997.

DELPLA François, Montoire, Les premiers jours de la collaboration, Paris, Albin Michel, 1996.

FERRO Marc, Questions sur la Deuxième Guerre mondiale, Firenze : Casterman, 1993.

PAXTON Robert, La France de Vichy, 1940-44, Paris, Éditions du Seuil, 1973.

Alexandre SUMPF, « L’entrevue de Montoire », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 21/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/entrevue-montoire

Anonyme (non vérifié)

Que se sont-ils alors promis ? rien. Hitler n'avait pas besoin d'améliorer le sort de la France contre sa prétendue envie de collaboration.
Hitler aura davantage besoin de racketer la France après l'échec de son attaque contre la Russie.

jeu 08/03/2012 - 12:10 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Ces photos sont effectivement d'un symbolisme bouleversant. Oui, la France touche du doigt son humiliation.
D'un autre côté, la publication de tels clichés a permis à nombre de Français de comprendre où ils en étaient arrivés.
A vouloir trop en faire, les nazis ont mis en place, eux-mêmes, de quoi redonner à la France vaincue l'envie de redevenir elle-même.

Humilier pour humilier me paraîtra toujours une politique à très courte vue et, ceci, où que ce soit.

lun 05/11/2012 - 10:49 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Le IIIe Reich n'a pas humilié la France pour l'humilier. Par l'armistice, il lui a laissé une zone non occupée avec un gouvernement, qui a gardé ses préfets y compris en zone non occupée, sauf en Elsass-Lothringen. Le IIIe Reich a également relâché des centaines de milliers de prisonniers, dont le général Juin, réclamé par Weygand. Le IIIe Reich n'est devenu impitoyable qu'après ses premiers revers en Russie, quand il dut généraliser la guerre totale (voir les exigences du Gauleiter Sauckel, que Laval a réussi à atténuer considérablement)

lun 05/11/2012 - 14:01 Permalien
Anonyme (non vérifié)

Laval avait tout à fait raison d'entrer en discussion avec Otto Abetz pour tenter d'adoucir les conditions de l'armistice. Il était sur le point d'obtenir d'énormes concessions, lorsque Vichy l'a destitué le 13 décembre 1940.

lun 05/11/2012 - 14:04 Permalien
Anonyme (non vérifié)

@ Huntziger,
je ne vous répondais pas, je commentais les images.

Mais, puisque en vous venez sur ce terrain, je vous conseille de relire les "mémoires d'un soldat", du Général Guderian, de loin le meilleur stratège de Hitler.
Il n'avait pas du tout la même vision que vous.

lun 05/11/2012 - 14:59 Permalien
Anonyme (non vérifié)

mais Guderian, ne prenait pas les décision politiques. Et Pomaret, dans propres mémoires, a publié une proclamation de Hitler à son arrivée à Paris, demandant à ses troupes d'être vainqueurs de nouvelle génération, ce qui est resté vrai jusqu'aux premiers attentats communistes contre les officiers de la Wehrmacht

lun 05/11/2012 - 15:07 Permalien
Anonyme (non vérifié)

quelques erreurs d'interprétations, malgré une bibliographie de qualité. N'hésitez pas à venir visiter le musée situé dans l'ancienne gare pour en découvrir plus sur le contexte, les protagonistes présents, .... Cette période sombre et cette entrevue sont beaucoup plus complexes qu'elles n'y paraissent. Au plaisir de vous y retrouver.
La guide du musée.

jeu 04/05/2017 - 21:07 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Berlin dans les années 30 : entre frénésie et chaos

Berlin dans les années 30 : entre frénésie et chaos

L’Allemagne en plein chaos

La Première Guerre mondiale et la défaite allemande ont eu d’importantes conséquences politiques et économiques. D’une…

Pierre Laval, le collaborateur en chef

Pierre Laval, le collaborateur en chef

Une réunion assez exceptionnelle

Le 19 décembre 1942, Pierre Laval, chef du gouvernement de Vichy, rencontre Hitler dans son Wolfsschanze («…

L'homme aux couteaux entre les dents, revisité

L'homme aux couteaux entre les dents, revisité

La Section française de l’Internationale communiste (S.F.I.C.) est née en novembre 1920 de la scission entre socialistes et communistes, lors du…

L'exposition d'art dégénéré en 1937

L'exposition d'art dégénéré en 1937

La condamnation de l’art moderne par les nazis

Pris lors de l’exposition Entartete Kunst organisée en 1937 à Munich par les nazis, ce cliché du…

15 mai &ndash; 31 juillet 1942 : l’exposition « Arno Breker » à Paris

15 mai – 31 juillet 1942 : l’exposition « Arno Breker » à Paris

La vie culturelle sous l’Occupation

Loin de cesser, la vie culturelle demeure relativement animée sous l’Occupation. Dans tout le pays et notamment…

La propagande hitlérienne

La propagande hitlérienne

L’arrivée de Hitler au pouvoir en Allemagne

Dans les années 1920 en Allemagne, le refus des conditions imposées par les vainqueurs lors du traité…

La propagande hitlérienne
La propagande hitlérienne
Berlin, capitale du monde, un projet total et totalitaire

Berlin, capitale du monde, un projet total et totalitaire

Une « capitale mondiale » pour un « Reich de mille ans »

L’idée de transformer Berlin en « capitale du monde » (Welthaupstadt) émerge, semble-t-il…

Faute de main

Faute de main

Sport et propagande

Le 15 mai 1938, certains journaux allemands et britanniques consacrent leur une à un événement sportif dépassé par son enjeu…

Les Accords de Munich

Les Accords de Munich

Les ambitions militaires du IIIe Reich

Parallèlement à la mise en place d’un régime autoritaire en Allemagne lors de son arrivée au…

Une Victoire à la pire-russe

Une Victoire à la pire-russe

« Plus un pas en arrière ! »

Au mois d’octobre 1942, Adolf Hitler est en passe de réussir son pari. Pour cette deuxième offensive estivale, après…