Allégorie de la création du musée historique de Versailles
Auteur : COUDER Louis-Charles-Auguste
Lieu de conservation : musée national du château de Versailles (Versailles)
site web
H. : 428 cm
L. : 820 cm
Huile sur toile
Domaine : Peintures
© Photo RMN - Grand Palais
74EE336/MV 5868
Allégorie de la création du musée historique de Versailles
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Barthélemy JOBERT et Pascal TORRÈS
Le château de Versailles est resté sans véritable emploi durant la Révolution et l’Empire. On y avait installé un « musée spécial de l’Ecole française », sorte d’annexe du Louvre pour les peintres français contemporains, mais la création du musée des peintres vivants au Luxembourg, au début de la Restauration, lui fit perdre cette fonction. Des logements y furent créés pour venir en aide à différents serviteurs de l’Etat, plus tard à des nobles tombés dans l’indigence. Après l’instauration de l’Empire et de même sous la Restauration, on pensa y réinstaller la résidence habituelle du monarque et de sa cour (le Grand Trianon fut d’ailleurs complètement remeublé et servit
en ce sens sous l’Empire), mais ces projets n’eurent pas de suite. Louis-Philippe, qui avait connu le Versailles de l’Ancien Régime, sauva le château en lui donnant une raison d’être originale qui perdure aujourd’hui : réaménagé à partir de 1833 en musée de l’histoire de France, le palais devait commémorer la construction de l’identité nationale, de ses origines aux temps contemporains. Pour cela on y rassemblerait autant de peintures et de sculptures originales que possible, sans hésiter toutefois à combler les vides par des commandes aux artistes contemporains. Inauguré en 1837, le musée demeure une source iconographique incomparable, et le vrai conservatoire de la peinture française de la première moitié du XIXe siècle.
L’allégorie de la création du musée
Couder donne ici le motif central d’un carton de tapisserie destiné à être tissé aux Gobelins, sur un programme iconographique très précis : dans le lointain se détachent entre deux buissons de lauriers, sur le ciel bleu, trois monuments : le pavillon central des Tuileries, où le souverain réside à Paris (c’est donc le siège du pouvoir central), l’Arc de triomphe de l’Etoile, symbole de l’Empire, laissé inachevé par Napoléon et que Louis-Philippe entreprit de terminer, l’obélisque de Louqsor, qui illustre la plus ancienne des civilisations antiques et qui, offert à la France par Méhémet Ali, pacha d’Egypte, venait d’être érigé au centre de la place de la Concorde. Minerve, déesse de la sagesse, qui symbolise les accomplissements de la civilisation occidentale, est assise au centre. Elle est assistée de la France, qui, debout près d’elle, appuyée sur son épaule, semble protéger son inspiration. A leurs côtés se tient le Génie de l’histoire, qui déroule sous les yeux de Minerve le plan en élévation du château, avec une vue de la cour d’honneur où se dresse la statue de Louis XIV (érigée par Louis-Philippe). La Poésie, vêtue de rose, porte une palme et contemple la scène, comme la Sculpture en robe verte, l’Architecture en blanc et la Peinture en violet clair. Deux enfants assis « calent » la composition. L’un est assis à côté d’une boîte de rouleaux antiques, l’autre à côté de chartes et de sceaux où se lit le nom de Charlemagne : c’est ici le passé le plus ancien de la France (remontant à la Gaule romaine) qui est ainsi rappelé.
Le carton de Couder, peintre d’histoire alors très actif et fort pourvu en commandes officielles, illustre l’une des réalisations dont le roi-citoyen était le plus fier, et qui était aussi l’une de ses plus symboliques. Loin d’être une simple œuvre d’art, cette tapisserie célèbre une entreprise éminemment politique. En quête d’une légitimité, la monarchie de Juillet cherche à transcender les clivages et à réunir l’œuvre de l’Ancien Régime et de la Révolution. Louis-Philippe entend ainsi être le souverain d’un régime d’unité et de paix civile. Le musée qu’il dédie « à toutes les gloires de la France » apparaît alors comme le moyen de réconcilier les Français au delà de leur parti et de leur classe. Magnifiée par un art chargé de célébrer les gloires de son histoire, la nation doit devenir la puissante source d’identification commune qui a fait défaut jusqu’alors. La révolution de 1848, on le sait, devait montrer qu’une telle ambition était illusoire.
Guy ANTONETTI Louis-Philippe Paris, Fayard, 1994.
Claire CONSTANS Versailles Paris, Imprimerie nationale, 1998.
Claire CONSTANS Versailles, château de la France et orgueil des rois Paris, Gallimard coll., « Découvertes », 1989.
Thomas W.GAEHTGENS « Le musée historique de Versailles » in Pierre NORA (sous la direction de), Les Lieux de mémoire tome II « La nation », Paris, Gallimard, 1988, rééd.coll. « Quarto », 1997.
Philippe VIGIER La Monarchie de Juillet Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1982.
Barthélemy JOBERT et Pascal TORRÈS, « Allégorie de la création du musée historique de Versailles », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 31/10/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/allegorie-creation-musee-historique-versailles
Lien à été copié
Découvrez nos études
La France au service de l'unité italienne
Après les révolutions de 1848, l’Italie a retrouvé le régime de 1815 : d’un côté des petites souverainetés despotiques sans aucun lien confédéral…
La Seine et la Marne
Avec l’accession au trône de Louis XIV, une nouvelle politique artistique est mise en place en France. A partir des années 1660, l’un des grands…
Les caisses d’épargne
Les caisses d’épargne apparaissent dans divers pays européens à la fin du XVIIIe…
L’hôtel des Invalides
Voulue par Louis XIV, l’édification de l’hôtel des Invalides au sud-ouest de Paris est…
Le roi danse : Louis XIV et la mise en scène du pouvoir absolu
La grande tradition des ballets de cour en France fut inaugurée par le Ballet comique de la Reine…
Le siège de Lille (septembre-octobre 1792)
Le 20 avril 1792, sur la proposition du roi Louis XVI, l’Assemblée législative déclare la guerre à l’empereur d’Autriche et engage ainsi la France…
Les Meurtrissures de la Grande Guerre
Théophile Alexandre Steinlen (1859-1923) est âgé de cinquante-cinq ans quand la Première Guerre…
La courtisane, un monstre ?
Le recours à l’allégorie pour dénoncer la prostitution est très fréquent au XIXe siècle…
L’Expédition d’Égypte
En 1798 la France et l’Angleterre, dont la suprématie navale s’accroît, sont en guerre. La paix de Campoformio encourage Bonaparte, général des…
Le prince de Condé
Le 19 mai 1643, le jeune Louis II de Bourbon, duc d’Enghien, fils aîné du prince de Condé et cousin du roi de France,…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel