Vézelay, église, façade avant restauration.
Saint-Sernin de Toulouse chevet restauré.
Saint-Denis : église abbatiale, projet de reconstruction de la façade.
Vézelay, église, façade avant restauration.
Auteur : VIOLLET-LE-DUC Eugène
Lieu de conservation : médiathèque du Patrimoine et de la photographie (MPP)(Charenton-le-Pont)
site web
Date de création : 1840
Date représentée : 1840
H. : 46,5 cm
L. : 33 cm
Aquarelle.
Domaine : Architecture
© Photo RMN - Grand Palais - G. Blot
79-001709 / MSC1327
Viollet-le-Duc et la restauration monumentale
Date de publication : Mars 2008
Auteur : Charlotte DENOËL
L’invention des Monuments historiques
Sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), la volonté de remettre à l’honneur de grands édifices symboliques de l’Ancien Régime, comme le Louvre, Versailles ou Saint-Denis, conduit l’État à mettre en place un appareil administratif pour les monuments historiques. La création d’un inspecteur général des monuments historiques le 21 octobre 1830, à l’instigation de François Guizot, alors ministre de l’Intérieur, représente l’aboutissement d’une réflexion engagée sous la Révolution puis sous le Premier Empire autour de la notion de patrimoine national. D’abord dirigé par Ludovic Vitet, puis par Prosper Mérimée à partir de 1834, le nouveau service d’inspection a pour mission de classer les édifices et d’y entreprendre des travaux de conservation, ceux-ci pouvant aller d’une simple réparation à la rénovation complète du bâtiment. Dans un contexte de réconciliation nationale, les édifices médiévaux sont les premiers à bénéficier de cette politique de conservation. Cette remise à l’honneur du Moyen Âge s’inscrit dans un double programme culturel et politique, les Romantiques y voyant le creuset de la civilisation française et l’historien Guizot puisant dans les libertés communales l’essence du libéralisme.
Viollet-le-Duc et la restauration : un Moyen Âge réinventé
Ce n’est qu’à partir du début du XIXe siècle que l’on voit se manifester les premiers signes d’une conscience archéologique critique vis-à-vis des monuments anciens. Celle-ci prend corps avec la première grande campagne de restauration monumentale entreprise en France, le chantier de la basilique de Saint-Denis, dévastée lors de la Révolution, et dont les travaux débutent en 1813 sous la houlette de Debret. En 1840, Mérimée confie au jeune architecte Viollet-le-Duc (1814-1879) la restauration de la Madeleine de Vézelay, qu’il avait visitée lors de sa première tournée d’inspecteur général des Monuments historiques en 1834. L’église était alors dans un triste état, ainsi que le montre une aquarelle de Viollet-le-Duc, pour qui le dessin était indissociable de la pratique architecturale : voûtes crevassées, murs lézardés, tour gauche de la façade ouest effondrée, etc. Aussitôt entamé, le chantier de restauration s’étale jusqu’en 1859. Viollet-le-Duc reconstruit une grande partie de l’édifice, en particulier les arcs-boutants et les voûtes, et restaure la façade ouest, ainsi que le chœur. Réputé exemplaire et consciencieux malgré sa radicalité, ce sauvetage marque le début d’une longue série de restaurations : la Sainte-Chapelle (1842), Notre-Dame de Paris (1843), Carcassonne et ses remparts (1844), Saint-Sernin de Toulouse (1846), Saint-Denis (1846)... Dans les deux derniers monuments, Viollet-le-Duc met en œuvre ses grands principes théoriques sur l’architecture : proscrivant l’emploi de matériaux considérés alors comme modernes, tel le fer, il privilégie la structure architecturale de l’édifice au détriment du décor et de la diversité des ajouts effectués au cours de l’histoire. De son propre aveu, « restaurer un édifice, ce n’est pas l’entretenir, le réparer ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut n’avoir jamais existé à un moment donné ». Daté de 1846, le relevé du chevet de Saint-Sernin, dont les travaux commencent en 1860, révèle un projet ambitieux : convaincu que cet édifice est un jalon essentiel entre l’Antiquité et le Moyen Âge gothique qui a hérité son système architectural de l’art gréco-romain, Viollet-le-Duc s’emploie à réélaborer ses structures extérieures en fonction d’un système rigoureux de proportions et cherche à obtenir un effet pyramidal. A Saint-Denis, où il succède en 1846 à Debret, très contesté pour ses choix hasardeux, il ambitionne de rendre à la basilique ses imposants volumes et aux chapelles absidiales leur niveau et leur décor d’origine. Il projette également de reconstruire la façade occidentale, comme en témoigne un autre dessin de janvier 1860. Mais trop coûteuse, cette dernière opération ne put être menée à bien avant sa mort.
Polémiques autour des restaurations
Resituer un aspect « originel » qui n’a souvent jamais existé ou accepter les états successifs d’un monument : tel est le dilemme auquel sont confrontés les restaurateurs du patrimoine depuis l’époque de Viollet-le-Duc. Dès son vivant, et plus encore à partir de la fin du siècle, ses restaurations ont été jugées excessives, parfois même démesurées, et ont suscité de nombreuses polémiques : nombreuses furent les voix qui s’élevèrent pour lui reprocher la lourdeur de ses interventions et son refus de prendre en compte l’évolution architecturale dans le temps au nom d’une exigence d’unité stylistique. Pour ses détracteurs, le monument ancien doit être traité en tant qu’être vivant, ainsi que le préconisaient les Romantiques, et la stratification des différentes époques respectée. Ce sont de telles considérations qui ont notamment poussé les Monuments historiques à entreprendre à partir de 1979 la « dé-restauration » de Saint-Sernin de Toulouse, en vue de retrouver l’état originel de la basilique avant les ajouts effectués par Viollet-le-Duc. Cependant, ces polémiques ne sauraient masquer l’immense influence de cet architecte. Ses grandes théories sur la structure architecturale et sur la restauration conçue comme une lecture de l’édifice furent remises à l’honneur à l’issue de la Première Guerre mondiale, au cours de laquelle un grand nombre de monuments furent presque entièrement détruits.
Bruno FOUCART « Viollet-le-Duc et la restauration », Les lieux de mémoire, II. La Nation éd. P. Nora, Paris : Gallimard, 1997, p. 1615-1643 ( « collection Quarto »).
Jean-Michel LENIAUD, Viollet-le-Duc ou les délires du système, Paris : Mengès, 1994.
Jean-Michel LENIAUD, Les archipels du passé : le patrimoine et son histoire, Paris : Fayard, 2002.
Anne-Marie THIESSE, La création des identités nationales, Paris : Seuil, 2000.Viollet-le-Duc [exposition, Paris, Grand Palais, 19 février-5 mai 1980], Paris : Réunion des Musées nationaux, 1980.
Charlotte DENOËL, « Viollet-le-Duc et la restauration monumentale », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 12/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/viollet-duc-restauration-monumentale
Lien à été copié
Découvrez nos études
Le Palais du Trocadéro, un bâtiment disparu
Le Trocadéro fut élevé sur une des collines de Paris à l’occasion de l’Exposition Universelle de…
Le Mobilier urbain, un symbole de Paris
La multiplication des lieux de divertissement tels que les théâtres ou les cirques sur les boulevards au cours du XIX…
Vue de la Seine au XVIIIe siècle
La vue de la Seine en aval du pont neuf est datée et signée par l’artiste, avec une mention inscrite sur le quai Malaquais ou des…
Le port militaire d’Etretat
Les projets d’aménagement sont nombreux pour des ports le long non des côtes ou le long de sur la Seine. Le…
Le pont Neuf et la Samaritaine au XVIIIe siècle
Cette vue du Pont Neuf et de la Samaritaine est datée et signée par l’artiste, avec une mention inscrite dans l’ombre du coin…
Les édifices de culte sous le régime du Concordat
Le système concordataire reconnaît les cultes catholique, luthérien, réformé…
Le Pavillon des Artisans français contemporains
Dédiée à la diffusion et à la promotion des arts décoratifs, l’Exposition internationale de 1925…
Vue de l’Hôtel de Ville au XVIIIe siècle
Ce tableau tourné vers la place de Grève est signé et daté sous la corniche du quai situé sur la gauche de la toile «…
La Prise de Constantinople par les croisés
Louis-Philippe, intronisé « roi des Français » le 9 août 1830 après les Trois Glorieuses (27-29 juillet 1830), était féru d’histoire comme tout…
Le grand magasin, « temple de la Femme »
Au début du XIXe siècle, beaucoup de vêtements passent d’une classe à l’autre : la « marchande à la toilette » achète d’occasion des…
pepe
Je n'ai pas très bien compris mais j'ai une question : que montre l'histoire de la basilique de Saint-Denis sur l'évolution des technique architecturales ?
Histoire-image
L'étude porte sur la restauration faite par Viollet-le-Duc et non sur la construction de ces églises.
En réponse à la question, l'église abbatiale de saint-deins comporte de nombreuses innovations architecturales (grande élévation et larges baies pour laisser entrer la lumière extérieure, croisée d'ogives, rose au-dessus du portail central, chapelles latérales,...) qui définiront ce que l'on appellera plus tard le style gothique.
Anonyme || dileMMe et non dilemne
dileMMe et non dilemne
Merci !
Merci !
C'est corrigé,
A bientôt, Anne-Lise, équipe du site L'Histoire par l'image
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel