Frédéric Chopin.
Auteur : DELACROIX Eugène
Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web
H. : 45,5 cm
L. : 38 cm
Huile sur toile. A appartenu à un tableau représentant George Sand et Chopin.
Domaine : Peintures
© RMN - Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado
RF 1717 - 14-500196
Chopin, musicien romantique
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Malika DORBANI-BOUABDELLAH
En 1834, dans son atelier du 15, quai Voltaire à Paris, Delacroix fait de George Sand, juste après sa rupture avec Alfred de Musset, un portrait en costume d’homme pour la Revue des Deux Mondes à laquelle elle collabore. Ils se prennent d’affection l’un pour l’autre, et une amitié intellectuelle naît entre eux. A cette époque, Delacroix connaît déjà Chopin, mais ils se lieront davantage pendant la liaison du compositeur et de la romancière. Sa rencontre avec George Sand stimule sa passion enfouie mais constante pour la littérature et la musique. Elle conditionne l’évolution ultérieure de sa peinture et de sa conception esthétique.
Témoin de l’intimité de Sand et de Chopin, Delacroix décide au printemps 1838 de réunir leurs portraits dans un même tableau. Les dessins préparatoires indiquent une composition en largeur du double portrait, avec un piano à droite. Delacroix ne cherchait pas seulement à reproduire leurs traits ou leur personne, mais à représenter une action créatrice où le piano, c’est-à-dire la musique de Chopin, joue le premier rôle.
A droite, le musicien assis de profil, improvise à son Pleyel, le visage illuminé et tourmenté par l’inspiration. George Sand, les bras croisés sur la poitrine comme à son habitude, se tient derrière lui. Cela rappelle les concerts de Chopin dans sa maison de la Chaussée d’Antin, où Delacroix est convié.
Commencé avec la ferveur exaltée de son admiration pour Chopin, celle-là même mise en 1832 à l’exécution du portrait de Paganini jouant du violon, le portrait devait être fait d’un seul jet, le ton de la peinture et le son de la musique jouant comme en duo.
Mais Chopin tombe malade puis accompagne George Sand à Majorque. Avant de s’éloigner lui-même de Paris, Delacroix suspend l’exécution de la toile et demande à son ami Pierret de faire enlever le piano que Chopin avait fait porter dans son atelier. La toile restée inachevée sera coupée en deux. Le fragment avec le portrait de George Sand se trouve à l’Ordrupgaard Museum près de Copenhague.
Chopin regarde au loin, comme perdu dans son jeu. Il est ébauché en un frottis rapide, avec des tonalités brunes, monochromes, presque à la manière de Carrière. Les traits accentués du visage animé et expressif, le regard et les lèvres ardents et tendus, reflètent son âme agitée. Le favori sur le côté droit, exposé au regard du peintre, rappelle les dandys romantiques parisiens.
Le portrait inachevé n’est pas un abandon de l’idée première de Delacroix. Ses amis, déjà associés à ses idéaux personnels, le seront davantage, à ses œuvres ultérieures. Ils l’inspireront encore pour le Plafond d’Homère dont il ornera la coupole de la bibliothèque du palais du Luxembourg.
Grâce à sa relation avec Chopin, Delacroix intègre – comme il l’a toujours souhaité – les moyens de la musique au langage pictural. La symphonie et le tableau, le ton et le son, deviennent complémentaires. Ensemble, ils réalisent cette synthèse des arts qui caractérise la période romantique. La Barque de Dante a été peinte sous l’effet du chant.
Ce tableau de l’amitié représente aussi la fin de cette période. Désormais, Delacroix se consacre à l’expression de la forme par le seul langage de la couleur, tandis que Chopin s’oriente vers un nouveau style. Imprégné de la théorie des reflets et de la lumière de Delacroix, le compositeur écrit : « Rien que des reflets, des ombres, des reliefs qui ne veulent pas se fixer. Je cherche la couleur, je ne trouve même pas le dessin… ». « Ils sont l’un dans l’autre », répond Delacroix.
Frédéric Chopin, deux en un !, une vidéo de France Musique
Paul BENICHOU, Le temps des prophètes. Doctrines de l’âge romantique. Paris, Gallimard. 1977.
Jean-Jacques EIDELINGER, L’univers musical de Chopin, Paris, Fayard, 2000.
Barthélemy JOBERT, Delacroix, Paris, Gallimard, 1997.
Pierre LASSERRE, Le romantisme français, essai sur la révolutions des sentiments et dans les idées au XIXe siècle, Paris, Champion, 2000.
Marie-Paule ROMBEAU, Chopin dans la vie et l’œuvre de Georges Sand, Paris, Belles Lettres, 1985.
Romantisme : Le mot est introduit dans la langue française par Rousseau à la fin du XVIIIe siècle. Il désigne par la suite un élan culturel qui traverse la littérature européenne au début du XIXe siècle, puis tous les arts. Rompant avec les règles classiques, la génération romantique explore toutes les émotions données par de nouveaux sujets, en privilégiant souvent la couleur et le mouvement.
Malika DORBANI-BOUABDELLAH, « Chopin, musicien romantique », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 24/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/chopin-musicien-romantique
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