Le 10 août 1792
Auteur : GERARD, Baron François
Lieu de conservation : musée du Louvre (Paris)
site web
Date de création : Vers 1794-1795
Date représentée : 10 août 1792
H. : 67 cm
L. : 92 cm
Dessin à la plume avec rehauts de gouache.
Domaine : Dessins
© GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizz
INV 26713 - 01-015977
10 août 1792 - De la monarchie constitutionnelle à la République
Date de publication : Août 2014
Auteur : Alain GALOIN
Lors de la réunion des états généraux le 5 mai 1789, Louis XVI dispose encore d’un important capital de confiance et de popularité parmi ses sujets. Cependant, incapable de comprendre les espoirs des représentants du tiers état et d’apprécier l’importance des changements qui s’opèrent dans son royaume, profondément attaché à l’absolutisme de droit divin, le roi déçoit le peuple français. S’ajoutant à la crise politique, la crise économique est à l’origine des journées d’octobre 1789 qui voient le pitoyable retour de la famille royale au palais des Tuileries. Le monarque est en quelque sorte l’otage du peuple de Paris, et le prestige de la monarchie s’en trouve considérablement entamé. La fuite du roi et son arrestation à Varennes le 20 juin 1791 incitent l’Assemblée constituante à précipiter l’instauration d’une monarchie constitutionnelle.
Le 1er octobre 1791, l’Assemblée constituante laisse place à l’Assemblée législative. Louis XVI est alors persuadé que seule une intervention étrangère peut lui permettre de restaurer l’absolutisme. Le 20 avril 1792, l’Assemblée législative déclare la guerre à l’Autriche sur la proposition du roi, qui joue la politique du pire. Les premières batailles sont un désastre pour la France. Le 11 juillet, l’Assemblée déclare la patrie en danger. Le 25 juillet, le manifeste de Brunswick menace la capitale de destruction « s’il est fait la moindre violence, le moindre outrage, à Leurs Majestés, le Roi, la Reine et la famille royale ». Cette déclaration austro-prussienne excite la fureur et les aspirations républicaines des révolutionnaires.
Le 10 août 1792, quarante-sept des quarante-huit sections parisiennes, grossies des fédérés bretons et marseillais, assiègent le palais des Tuileries, contraignant la famille royale à se retirer et à se placer sous la protection de l’Assemblée législative. Moins de deux ans plus tard, dans le contexte d’une Terreur renforcée, le Comité de salut public éprouve le besoin de légitimer les événements révolutionnaires et organise le Concours de l’an II, temps fort de la politique des arts sous la Révolution, pour illustrer les pages glorieuses de la jeune république.
Élève de Jacques Louis David (1748-1825), François Pascal Simon Gérard (1770-1837) s’inscrit au Concours de l’an II, instauré en 1794 par la Convention. Ce concours appelle « tous les artistes de la République à représenter à leur choix sur la toile les époques les plus glorieuses de la République française ». Gérard remporte le concours avec ce dessin préparatoire à un tableau qui devait s’intituler « Le Peuple français demandant la destitution du tyran à la journée du 10 août » mais ne sera jamais achevé.
Après le massacre des suisses et la prise du palais des Tuileries, les insurgés envahissent la salle du Manège des Tuileries, où siège l’Assemblée législative. Ils brandissent des bannières revendicatives sur lesquelles figurent des mots d’ordre révolutionnaires : « Patrie / Egalité / Liberté » et « Plus de roi ». La fureur lyrique de cette foule, figurée dans la partie gauche du dessin, contraste avec l’accablement des membres du bureau de l’Assemblée réunis sur une estrade, à droite. Au-dessus d’eux, assis à une table sur laquelle est posée une clochette, le Girondin Pierre Victurnien Vergniaud (1753-1793) préside la séance. Derrière lui, à sa droite, apparaît la famille royale, réfugiée dans la loge du logographe qu’une rangée de barreaux isole de la salle. Ainsi se conforme-t-on, fût-ce artificiellement, à la Constitution de 1791 selon laquelle le roi ne peut assister aux délibérations de l’Assemblée législative. Au bas de l’estrade, l’artiste a représenté plusieurs coffrets qui renferment les bijoux de la reine et divers biens saisis dans le palais des Tuileries. Placés au centre de la composition, ils mettent en évidence la corruption du régime monarchique et divisent l’espace pictural entre les adversaires et les partisans de la royauté.
Les journées des 20 juin (serment du Jeu de paume) et 4 août 1789 (abolition des privilèges) avaient consacré la fin de l’Ancien Régime politique et social. Le 10 août 1792 marque le début de la seconde Révolution, une révolution populaire organisée et menée par la Commune insurrectionnelle de Paris et les sections parisiennes. Elle est dirigée contre le roi, mais aussi contre une Assemblée législative bourgeoise, libérale et majoritairement favorable à la monarchie constitutionnelle. Sous la pression populaire, l’Assemblée vote, à l’unanimité, la convocation d’une Convention nationale, la révocation des ministres feuillants et la suspension du roi, mais non sa déposition. Elle met en place un Conseil exécutif provisoire de six ministres, chargé d’assurer la continuité du gouvernement : Monge et Lebrun-Tondu y côtoient Roland, Clavière et Servan, anciens ministres girondins révoqués par Louis XVI, ainsi que Danton, à qui l’Assemblée confie le portefeuille de la Justice, comptant sur lui pour amadouer la Commune.
Louis XVI est d’abord assigné à résidence au palais du Luxembourg mais, sous la pression populaire, l’Assemblée remet « la garde du Roi et de sa famille aux vertus des citoyens de Paris ». Le 13 août 1792, la famille royale est emprisonnée au Temple, et le procès du roi, soupçonné de collusion avec les puissances étrangères, apparaît de plus en plus inévitable. Élue au suffrage universel, mais avec près de 90 % d’abstention, la Convention tient sa première séance le 21 septembre 1792 et proclame l’abolition de la royauté. Ainsi commence l’an Ier de la République. Pour les hommes de l’an II, la journée du 10 août a été un événement éminemment fondateur. Porteuse de valeurs essentielles, elle marque l’avènement de la souveraineté du Peuple qui s’incarne désormais dans la Nation.
Albert MATHIEZ, Le 10 Août, Paris, Éditions de la Passion, 1989.
Marcel REINHARD, La Chute de la royauté (10 août 1792), Paris, Gallimard, coll. « Trente journées qui ont fait la France », 1969.
Denis RICHET, entrée « Journées révolutionnaires », in François Furet et Mona Ozouf, Dictionnaire critique de la Révolution française, Paris, Flammarion, coll. « Champs Flammarion », 1992.
Michel VOVELLE, La Chute de la monarchie 1787-1792, Paris, Le Seuil, coll. « Points Histoire », 1972.
Alain GALOIN, « 10 août 1792 - De la monarchie constitutionnelle à la République », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 21/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/10-aout-1792-monarchie-constitutionnelle-republique
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enja
Quelques réticences devant certains aspects de la présentation du contexte historique aux accents "républicanocentrés"
Ex1:A vous lire louis XVI serait dés le début de la révolution "has been"
Le détachement vis à vis de la figure royale, sa dévalorisation semble à l'époque un phénomène progressif et non consensuel.
Ex2 :User de la formule "retour pitoyable de la famille royale"
parait discutable, non argumenté.
Cordialement
fflackk
Quelques erreurs parfois comme par exemple le nom de l'auteur qui n'est pas écrit en entier mais sinon c'est un bon site qui m'as bien aidé.
leflamand
Si le détachement des députés et du peuple envers le roi est effectivement progressif, le roi, lui, et son entourage, jouent dès le début un double jeu, contre la souveraineté nationale.
Maurice
Il est rare de lire que le roi était toujours présent, qu’après les événements de 1789 la monarchie était devenue « constitutionnelle ».
Le roi n’était plus « roi de France », mais roi des Français, des pièces de monnaie en sont la preuve.
Comme quoi, il y a l'Histoire et l'histoire diffusée pour faire plaisir aux peuples par des – historiens – bas de gamme.
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Site trop méconnu, que faire pour plus de lisibilité ? Il est habituel de dire : la balle est dans votre camps !
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