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Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans)

Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans)

Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans) - La partition

Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans) - La partition

Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans)

Le Chant de la Libération (Le Chant des partisans)

Auteur : LEFEBVRE René

Lieu de conservation : musée de l’Armée (Paris)
site web

Date de création : 1944

dessin, impression

© Paris - musée de l'Armée, dist. RMN - Grand Palais / Émile Cambier ; © Droits réservés

lien vers l'image

09-518556 / My 1

Le Chant des partisans

Date de publication : Avril 2016

Auteur : Alexandre SUMPF

L’image d’un chant

Réalisée en 1944 par René Lefebvre, le dessin Le Chant de la Libération (le chant des Partisans) vient illustrer le célèbre chant du même nom. Il est donc postérieur à ce dernier dont la musique (signée Anna Marly) date de 1941, et les paroles (signées Joseph Kessel (1) et Maurice Druon) de mai 1943. C’est surtout la date d’impression et de diffusion de cette image (été 1944) qu’il convient de bien préciser pour mieux saisir son contexte.

Un contexte où la Résistance sort de la confidentialité et de la clandestinité pour devenir une réelle coalition politique (des communistes aux gaullistes) qui bataille aux côtés des Alliés mais aussi par rapport à eux pour reconstruire un pouvoir autonome dans une France en voie de libération depuis le Débarquement. C’est bien dans cette perspective qu’il convient d’appréhender l’enjeu de la diffusion, de plus en plus massive, du chant à partir de cette période, ainsi que celle de l’image qui l’accompagne désormais.

Avant de devenir le véritable hymne de la Résistance française au fil du temps, le chant des Partisans n’est en effet d’abord connu que pour son air, choisi comme « indicatif musical » de l’émission Honneur et Patrie réalisée par la France Libre et diffusée sur la B.B.C. depuis mai 1943. La mélodie est écoutée et interprétée clandestinement dans les milieux de la Résistance où, sifflée entre partisans elle devient même un signe de ralliement et de reconnaissance dans les réseaux et les maquis. Ce n’est en revanche qu’à partir de 1944, que les paroles et le dessin Le Chant de la Libération (le chant des Partisans) se font véritablement connaître de plus en plus largement, cette fois au-delà des seuls cercles de résistants qui sont d’ailleurs toujours plus nombreux.

Le Chant de la Libération (le chant des Partisans) est l’une des premières illustrations connues pour ce chant (il y en eut plusieurs). Dès le printemps 1944, elle figure sur la pochette de certains disques et plus généralement sur la pochette de la partition (c’est le cas pour l’exemplaire ici étudié). Elle est parfois également diffusée avec le texte seul (en feuillet ou livret), ou encore sous la forme de simples tracts ou affiches. Moins célèbre que le chant lui-même, le dessin qui l’accompagne devient cependant familier, ancrant dans les consciences et les représentations une certaine image de la Résistance, avant et après la fin de la guerre.

Une allégorie de la Liberté et de la Libération

C’est à René Lefebvre que l’on doit l’illustration Le Chant de la Libération ici étudiée. L’illustrateur français, connu pour ses affiches de cinéma et de publicité travaille également régulièrement avec le monde du spectacle (cabarets, théâtres) et de la musique (illustrations de disques) dans les années 40 et 50 à Paris.
L’illustration a vraisemblablement , été éditée après la Libération de Paris d’août 1944. En effet, la présence du bandeau en bas de l’image suggère bien que les Éditions Raoul Breton (éditions musicales et générales) situées dans la capitale peuvent alors la publier et la diffuser librement, ce qui n’aurait pas été possible sous l’Occupation.

À l’encre rouge sur fond blanc, l’illustration assez stylisée représente un village français « typique » (le clocher surmonté du coq, quelques maisons et des arbres). Le village est entravé dans de lourdes chaînes (épaisseur du trait) tandis que de noirs (rouges ici) corbeaux flottent dans son ciel. La Statue de la Liberté se dresse au-dessus de lui en contre-plongée et semble animée d’une certaine force, capable déjà de briser quelques liens de la servitude (à droite).

En plus de la signature de l’auteur (centre de l’image), Le Chant de la Libération comporte plusieurs parties de texte, qui figurent également en rouge (même couleur que le dessin). On rappelle d’abord les noms du compositeur et des paroliers (à droite). Une citation du journaliste écrivain Quentin Reynold datée de janvier 1944 (en bas à gauche) décrit aussi le destin, la nature et l’essence de ce chant : « C'est le chant de la liberté, les chant des partisans français, d'un peuple qui veut être libre, le chant des hommes qui ne veulent pas être esclaves. C'est : " LA NOUVELLE MARSEILLAISE " ».

La « nouvelle Marseillaise »

Le dessin constituant Le Chant de la Libération comme le texte qui l’accompagne est naturellement didactique et pensé pour être directement compréhensible. Il s’agit de figurer l’oppression nazie et de lui opposer un mouvement de libération qui s’apparente à une nouvelle révolution (référence à La Marseillaise), c’est à dire à une renaissance de la France en tant que telle (dans son essence, comme République, comme pays des Lumières et patrie la Liberté). Une Liberté ici personnifiée dans la figure à la fois glorieuse au sens presque religieux et imposante de la célèbre Statue, qui évoque en tout cas le mouvement puissant (brisant les chaînes les plus lourdes) et l’avènement inéluctable d’une sorte de principe idéal et immortel (haut dans le ciel des idées morales).

Certains éléments font directement référence au texte de la chanson, et notamment au premier couplet qui s’ouvre sur les deux strophes : « Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines, Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne ». Les corbeaux disent ainsi l’ombre et le mauvais augure nazie qui rôde, noir de menaces et d’humiliations. Les chaînes évoquent quant à elles « l’esclavage » et la privation de liberté. Le village symbolise enfin métonymiquement (et assez traditionnellement) la France dans son ensemble, écho aux « plaines » de la chanson ou encore aux « campagnes » de La Marseillaise.

Presque étonnante ici, la Statue de la Liberté que l’on associe habituellement plutôt à l’univers urbain de New-York et qui domine ce petit ensemble villageois. Outre ses indéniables qualités graphiques, elle semble avoir été choisie en tant qu’unique symbole immédiatement et universellement reconnaissable de la liberté. Enfin et peut-être surtout, elle constitue un signe évident de la reconnaissance du pays pour les soldats américains qui, en 1944-1945, combattent encore sur le sol français. On comprend aussi que les « origines » françaises de la Statue rappellent la solidarité historique entre deux peuples épris de liberté depuis leur Révolutions respectives (d’où la référence à La Marseillaise), indiquant en creux que les Français ont toujours été et sont encore aujourd’hui aussi les acteurs de leur propre émancipation, notamment à travers les Résistants dont le chant est l’hymne.

Le Chant des partisans, hymne de la Résistance, avec Anna Marly, une vidéo de France Musique - Culture Prime

AZÉMA Jean-Pierre, Nouvelle histoire de la France contemporaine. XIV : De Munich à la Libération (1938-1944), Paris, Le Seuil, coll. « Points : histoire » (no 114), 1979.

AZÉMA Jean-Pierre, WIEVIORKA Olivier, Vichy (1940-1944), Paris, Perrin, 1997.

BROCHE François, CAÏTUCOLI Georges, MURACCIOLE Jean-François (dir.), Dictionnaire de la France libre, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2010.

MARCOT François (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance : résistance intérieure et France libre, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2006.

MARLY Anna, Anna Marly : troubadour de la Résistance. Mémoires, Paris, Tallandier, coll. « Historia », 2000, livre + CD audio.

MURACCIOLE Jean-François, Histoire de la France libre, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? » (no 1078), 1996.

1- Joseph Kessel (1898-1979) : fils d'émigrés juif russe en France, il devient un journaliste et écrivain français. Engagé volontaire en 1916, il est versé dans l'aviation. Après guerre, il est naturalisé français à sa demande. Il parcourt le monde comme reporter pour les grands journaux français dont Paris-Soir et commence à publier des romans et nouvelles. Pendant la Seconde guerre mondiale, il entre en Résistance et rejoint les Forces Francaises Libres. Il est l'auteur avec son neveu du Chant des Partisans. Après guerre, il continue son métier de reporter et assiste au procès d'Eichmann. En 1963, il est élu à l'Académie Française. Il est l'auteur de L'Armée des Ombres et du Lion

Alexandre SUMPF, « Le Chant des partisans », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 19/03/2024. URL : histoire-image.org/etudes/chant-partisans

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