Affrontement américano-soviétique au Checkpoint Charlie sur la Friedrichstrasse
Auteur : ANONYME
Lieu de conservation : Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz (BPK, Berlin)
site web
Date de création : 22 octobre 1961
Date représentée : 22 octobre 1961
Domaine : Photographies
© BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais / image BPK
30001741 - 09-542044
Démonstration de force à Checkpoint Charlie
Date de publication : Février 2024
Auteur : Alexandre SUMPF
Le mur se referme
Ce 27 octobre 1961, la guerre froide manque d’un cheveu de virer à l’incendie planétaire. Depuis plusieurs semaines, la capitale allemande est le théâtre d’un nouveau durcissement des relations entre les Soviétiques et leurs anciens alliés. Le 13 août, les Allemands de l’Est ont commencé à ériger un mur de pierres et à déployer des réseaux de barbelés autour des trois zones française, américaine et britannique, achevant d’en faire un isolat au cœur du Brandebourg occupé par l’Armée rouge. La convention datant de 1945 maintient toutefois trois points de passage (checkpoints, en anglais) ouverts aux ressortissants étrangers entre République démocratique allemande (R.D.A.) à l’Est et République fédérale allemande (R.F.A.) à l’Ouest : Alpha à Helmsted, Bravo à Drewitz, et enfin Charlie au cœur de Berlin. Tous les autres points de franchissement de la frontière sont réservés aux Allemands de l’Ouest – quant aux Allemands de l’Est, ils n’ont plus le droit de sortir du pays.
La crise est déclenchée le 22 octobre quand les soldats est-allemands contrôlant l’accès à Berlin-Est sur la Friedrichstrasse se mettent en tête de contrôler un diplomate américain. Durant 16 longues heures, de 17h le 27 octobre à 11h le 28, les troupes s’observent de part et d’autre du point de passage. Plusieurs photographes ont alors l’occasion de capturer ce moment historique, dont l’auteur anonyme de ce cliché.
Duel berlinois
Pris du côté américain matérialisé par la pancarte trilingue à droite de l’image, le cliché saisit la scène dans toute sa profondeur. Au premier plan, on distingue des policiers ouest-allemands reconnaissables à leur képi, debout à côté d’un fourgon de police. Au second plan se détachent nettement trois chars américains M-48 stationnés sur les côtés et en avant du checkpoint américain – une simple guérite entourée de sacs de sable. Sous le panneau, des officiers et des civils observent le camp d’en face. Celui-ci se situe à plusieurs dizaines de mètres, au-delà du no man’s land (1) créé en août par la destruction de bâtiments côté soviétique. On distingue les plaques de béton empilées et au-delà, quelques-uns des 10 chars T-34 déployés. Les Américains ont pu se convaincre que ces blindés n'appartiennent pas à l’armée est-allemande, mais bien à l’Armée rouge.
Drôle de jeu de rôles
La symétrie de l’affrontement symbolique a été sacrifiée par le photographe au profit d’une vision plus rapprochée des forces soviétiques en présence. En réalité, sept autres chars américains sont positionnés en soutien immédiat juste derrière la caméra. La rue totalement occupée côté soviétique, au dernier plan, contraste avec l’espace laissé entre chaque véhicule au premier plan, donnant l’impression d’une armée prête à s’élancer vers le spectateur. La présence d’Allemands côté occidental affiche l’objectif défensif des Américains. Peu de soldats sont présents sur place – une dizaine de chaque côté, symbolisant la confrontation sans donner de prétexte à l’adversaire pour intervenir. Les M-48 équipés de lames de bulldozer ne viendront pas balayer les dalles de béton, et les 20 autres T-34 cantonnés porte de Brandebourg ne se précipiteront pas vers Checkpoint Charlie.
L’espion Gueorgui Bolchakov sert d’intermédiaire à la négociation entre Kennedy et Khrouchtchev, qui parviennent à faire baisser la tension. Le 28 au matin, un premier char soviétique recule de cinq mètres, imité juste après par un char américain. Mètre par mètre, véhicule par véhicule, le nœud de la crise se dénoue et le checkpoint reprend son allure normale. Du côté américain, on se refuse par principe à construire un bâtiment, pour souligner le caractère provisoire de la coupure de l’Allemagne en deux.
En revanche, de l’autre côté, on renforce année après année le dispositif de contrôle en multipliant chicanes et miradors.
Georges-Henri Soutou, La Guerre froide : 1943-1990, Paris, Fayard / Pluriel, 2010.
Fred Taylor, Le Mur de Berlin. 13 août 1961 - 9 novembre 1989, Paris, Perrin, 2011.
Alfred Wahl, L'Allemagne de 1945 à nos jours, Paris, Armand Colin, 2009.
1 - No man’s land : zone neutre entre les premières lignes de deux pays en guerre ou zone neutre entre deux frontières.
Guerre froide : Période historique mondiale qui s'étend de 1945 à 1990. À l'issue de la seconde guerre mondiale, le monde est divisé entre le bloc de l'Ouest dominé par les États-Unis et le bloc de l'Est dominé par l'Union soviétique : on parle alors d'un mode bipolaire. Il s'agit d'une guerre idéologique (états communistes ou états libéraux) et stratégique, les affrontements se font sur des terrains non-occidentaux (comme la guerre du Vietnam, Cuba, Afghanistan). La guerre froide se termine avec la chute du mur de Berlin et la désintégration du bloc de l'Est.
Alexandre SUMPF, « Démonstration de force à Checkpoint Charlie », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 03/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/demonstration-force-checkpoint-charlie
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petit erreur les chars sont…
petit erreur les chars sont des T54 ou T59
Rectification
Bonjour,
Sûrement dû à une erreur d’inattention de votre part, j’ai constaté que vous avez écrit que les chars en présence du côté soviétique sont des t34, or les blindés présent sont des t54, chars plus moderne que son prédécesseur
Je vous remercie.
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