Aller au contenu principal
C'était vraiment la peine de nous faire tuer.

C'était vraiment la peine de nous faire tuer.

Date de création : 1835

Date représentée : 1835

H. : 21 cm

L. : 29 cm

Illustration du journal :"La Caricature", 27 août 1835.lithographie sur blanc

Domaine : Estampes-Gravures

© Saint-Denis, musée d'art et d'histoire - Cliché I. Andréani

plche 254, caric.251, 27 août 1835

Critique de la monarchie de Juillet, les espoirs déçus de 1830

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Robert FOHR

Critique de la monarchie de Juillet

Critique de la monarchie de Juillet

Après l’attentat à la « machine infernale » commis le 28 juillet 1835 par le conspirateur Giuseppe Fieschi contre Louis-Philippe et sa suite, qui se rendaient ce jour-là à la Bastille pour la fête de la révolution de 1830, le gouvernement impose les fameuses « lois de septembre sur la presse » qui instaurent un régime de censure et d’autorisation préalable. Elles seront votées le 9 septembre.

Dans l’impossibilité de poursuivre une activité satirique tournée principalement contre le régime en place, le journal La Caricature cesse de paraître après le no 251 du 27 août où est publiée cette planche. À travers Le Charivari, Daumier, qui ne fera plus de dessin politique jusqu’à la fin de la monarchie de Juillet, c’est-à-dire jusqu’en 1848, se tourne dès lors vers la satire des mœurs de ses contemporains qui lui inspirent des séries qui vont asseoir définitivement sa popularité.

Dans ce même numéro du 27 août, La Caricature reproduit le texte de la loi contre la presse en composant certains articles comme des calligrammes en forme de poire, ultime provocation à l’encontre de la personne royale.

« C’était bien la peine de nous faire tuer » est l’un des dessins politiques les plus grinçants de Daumier. Thématiquement, l’œuvre peut être rapprochée d’un des Caprices de Goya (no 39), mais se rattache aussi à la tradition des danses macabres médiévales qui mettent en scène des morts sortis de leurs tombes pour rappeler avec ironie aux vivants la vanité des choses de ce monde.

Dépourvue cependant de toute dimension fantastique, elle représente sur un mode réaliste des héros de la révolution parisienne des 28, 29 et 30 juillet 1830 – les « Trois Glorieuses » –, comme l’indiquent les inscriptions portées sur la colonne et la croix funéraires qui surplombent leurs sépultures. Ces personnages aux types populaires – l’émouvante figure d’ouvrier plantée au centre de la composition témoigne de la grandeur que Daumier sait donner aux plus humbles – assistent avec un air effaré ou désolé au triomphe de la religion, que symbolise la procession solennelle esquissée à l’arrière-plan à gauche, et à la politique de répression des idées démocratiques et des mouvements sociaux que résume la cavalerie chargeant la foule, sabre au clair, à l’arrière-plan à droite.

Le message porté par cette image est limpide : non seulement la révolution de 1830 a été détournée de son but – l’instauration d’une véritable République –, mais la monarchie de Juillet se solde par la fin des libertés et le retour à l’ordre moral traditionnel.

L’organisation de la composition n’est pas sans rappeler par ailleurs le modèle social de l’Ancien Régime, en principe aboli en 1789 : clergé, noblesse et tiers état

François FURET, La République 1770-1880 : de Turgot à Jules Ferry, Paris, Hachette, 1988 rééd. coll. « Pluriel », 1992.

Philippe RÉGNIER (dir.), La Caricature entre République et censure, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1996.

Philippe VIGIER, La Monarchie de Juillet, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1982.

COLLECTIF, Daumier, 1808-1879, catalogue de l’exposition au Grand Palais (5 octobre 1999 – 3 janvier 2000), Paris, RMN, 1999.

Robert FOHR, « Critique de la monarchie de Juillet, les espoirs déçus de 1830 », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 21/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/critique-monarchie-juillet-espoirs-decus-1830

Lavigne Philippe (non vérifié)

Bonjour, Je me permets ce commentaire pour signaler une erreur - me semble-t-il - dans l'analyse de la gravure de Daumier, "C'était vraiment la peine de nous faire tuer". En effet, l'oeuvre est rapprochée du Caprice n° 39 de Goya, alors qu'il s'agit plus vraisemblablement du Caprice n° 59 intitulé "Y aun no se van!". Non pas donc une erreur, mais une simple faute de frappe ... Je vous remercie par ailleurs pour la qualité de ce site. Bien cordialement, Philippe Lavigne.

jeu 13/04/2017 - 08:08 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Charge anti-républicaine

Charge anti-républicaine

Le 22 avril 1885, Le Figaro titre « Nouvel incident au Salon » : le tableau de Maurice Boutet de Monvel est définitivement refusé à l’exposition…

Charge anti-républicaine
Charge anti-républicaine
Charge anti-républicaine
Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831

Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831

Le paupérisme

L’arrivée de Louis-Philippe au pouvoir en juillet 1830 suscite le ressentiment des républicains, très vite doublé de la question…

Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831
Le Chômage à Paris et à Lyon en 1831
Le vin symbole de la Nation

Le vin symbole de la Nation

La journée du 20 juin 1792

Le 17 juin 1789, le Tiers État se proclame Assemblée nationale. Le 9 juillet, Louis XVI est contraint à la…

Le vin symbole de la Nation
Le vin symbole de la Nation
Un collectionneur, mécène et pédagogue : Antoine Vivenel (1799-1862)

Un collectionneur, mécène et pédagogue : Antoine Vivenel (1799-1862)

Né à Compiègne, dans l’Oise, le 27 ventôse An VII (17 mars 1799), Antoine Vivenel appartient à une longue lignée d’artisans compiégnois qui ont…

Un collectionneur, mécène et pédagogue : Antoine Vivenel (1799-1862)
Un collectionneur, mécène et pédagogue : Antoine Vivenel (1799-1862)
Un collectionneur, mécène et pédagogue : Antoine Vivenel (1799-1862)
Talleyrand au Congrès de Vienne et la déclaration du 13 mars 1815

Talleyrand au Congrès de Vienne et la déclaration du 13 mars 1815

La déclaration du 13 mars 1815

Issu d’une famille de la haute noblesse, Charles Maurice de Talleyrand-Périgord (1754-1838) est évêque d’Autun…

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres

Prodige et renoncement

Pianiste hors norme et compositeur novateur, Franz Liszt (1811-1886) est l’un des plus grands musiciens du XIXe…

Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
Franz Liszt, de la gloire aux ténèbres
La « vélocipédomanie » sous le Second Empire

La « vélocipédomanie » sous le Second Empire

Les débuts du « vélocipède » moderne et l’évolution de sa représentation

C’est au cours du XIXe siècle que le « vélocipède » fait son…

La « vélocipédomanie » sous le Second Empire
La « vélocipédomanie » sous le Second Empire
Nadar, l’art et la photographie

Nadar, l’art et la photographie

La photographie prend son envol

Le tournant des années 1850-1860 marque une étape cruciale quoiqu’en partie méconnue dans l’histoire de la…

Portraits-charges des célébrités du juste milieu

Portraits-charges des célébrités du juste milieu

Les bustes-charges des “ Célébrités du juste milieu ” et les lithographies qui en découlent remontent aux débuts de la monarchie de Juillet. Leur…

Portraits-charges des célébrités du juste milieu
Portraits-charges des célébrités du juste milieu
Portraits-charges des célébrités du juste milieu
Portraits-charges des célébrités du juste milieu
Du déficit à l'assignat

Du déficit à l'assignat

L’Assemblée constituante doit à la fois assumer les dettes de la monarchie – environ 5 milliards de livres auxquelles s’ajoutent des intérêts…

Du déficit à l'assignat
Du déficit à l'assignat
Du déficit à l'assignat