Portrait d'alphonsine dite Marie Duplessis (la Dame aux camélias), assise au balcon d'un théâtre, 1845
La Dame aux camélias interprété par Mme Sarah Bernhardt et sa compagnie
Portrait d'alphonsine dite Marie Duplessis (la Dame aux camélias), assise au balcon d'un théâtre, 1845
Auteur : ROQUEPLAN Camille
Lieu de conservation : musée Carnavalet – Histoire de Paris (Paris)
site web
Date de création : 1845
Date représentée : 1845
H. : 24 cm
L. : 18,2 cm
Aquarelle
Domaine : Peintures
© CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris
D.2308
La Dame aux camélias
Date de publication : Janvier 2016
Auteur : Catherine AUTHIER
Marie Duplessis, muse de Dumas
Le dessin à l’aquarelle de Camille Roqueplan représente Marie Duplessis, qui fut probablement la toute première grande courtisane du XIXe siècle, le prototype de l’idéal féminin de la génération romantique, une femme belle, élancée, diaphane, mystérieuse et d’apparence fragile. Elle gravit les échelons de la prostitution en un temps record, une héroïne extraordinaire, passant en quelques mois de la misère à la fortune. Elle souffrait toutefois d’une maladie de poitrine, phtisique, un mal du type de la tuberculose mais qui avait une connotation vénérienne au XIXe siècle.
Elle meurt le 3 février 1847 à seulement 23 ans.
Or c’est justement le caractère fulgurant de sa destinée qui marqua les esprits et la fit passer à la postérité. Un sujet en or pour son ancien amant de cœur, Alexandre Dumas fils, celui que Marie appelait affectueusement Adet. Ils avaient vécu une histoire d’amour fiévreuse entre septembre 1844 et août 1845. Quand Dumas apprend la mort de la courtisane le 10 février 1847, il se rend à la vente aux enchères des biens de celle qu’il avait aimée et retrouve des souvenirs dans son appartement. Effondré, il rédige un poème inspiré par la jeune femme que l’on retrouve dans le recueil des Péchés de jeunesse. La liaison qu’il vécut avec elle lui inspira ensuite l’écriture du roman La Dame aux camélias, écrit seulement dix mois après la disparition de la jeune femme. Marie Duplessis joua ainsi le rôle de muse et nourrit la création du personnage de Marguerite Gautier, alors que son amant, Armand Duval, est un mélange de Dumas fils lui-même et du comte Edouard de Perrégaux.
Le deuxième document est une affiche du cinématographe datée de 1911 représentant la grande tragédienne Sarah Bernhardt dans le rôle de La Dame aux camélias, illustrée par l’artiste graveur Robert Kastor, datée de 1911.
De Marie à Sarah
Marie Duplessis, au premier plan, est assise, seule dans sa loge de théâtre dans une posture de reine de la Monarchie de Juillet. Elle apparaît comme une femme honorable, élégante, munie de jumelles, amateur authentique de théâtre. Selon Dumas fils « son visage forme un ovale d’une grâce indescriptible. Les yeux noirs, surmontés de sourcils dont l’arc est d’une telle pureté qu’il semble peint, sont voilés de grands cils qui s’abaissent jetant de l’ombre sur la teinte rose des joues. Le nez fin est droit et spirituel. Les narines un peu ouvertes démontrent une aspiration ardente vers la vie sensuelle. » Marie est entourée de loges où apparaissent des dandys qui semblent l’admirer alors que des jeunes filles sur le fond observent avec curiosité les hommes, parées de coiffures, chapeaux et costumes caractéristiques de l’époque romantique. Marie appréciait les soirées culturelles, les grandes expositions ou les concerts et semblait surtout avoir nourri une vraie passion pour le théâtre. Elle manquait rarement les premières et y consacra d’ailleurs sa toute dernière soirée.
Le deuxième document présente Sarah Bernhardt accoudée sur une table sur laquelle est disposée une belle guirlande de fleurs de camélias. L’actrice avait déjà interprété au théâtre le rôle de Marguerite Gautier auquel elle s’identifiait totalement l’année 1880, après avoir rompu avec la Comédie Française. Elle n’avait alors que 36 ans et avait rencontré un immense succès. Elle en a soixante-sept lors de la sortie du film produit par la société Film d’Art par André Calmettes et Henri Pouctal, le premier long métrage de l’artiste. La réclame de l’époque annonçait : « Prochainement La plus grande artiste de l’époque Madame Sarah Bernhardt pour la première fois au cinématographe. » Sarah Bernhardt avait déjà été pionnière en matière de cinéma en présentant le « Phono-Cinéma-Théâtre », une réflexion sur le cinéma parlant qui associait projection et phonographe lors de l’Exposition universelle de 1900.
Le film fut un triomphe à Paris comme en Amérique, l’actrice ayant compris qu’elle pouvait désormais toucher un public beaucoup plus vaste que celui du théâtre. Dans un entretien repris dans le Courrier Cinématographique, elle déclara :
« Le théâtre et le cinéma peuvent très bien vivre côte à côte. Et voici la preuve : je me souviens que, dans une récente tournée que je fis en Amérique avec La Dame aux camélias, notre troupe fut suivie par une entreprise de cinématographe. Partout où je m’arrêtais, et fréquemment dans une salle voisine de celle où je jouais, le cinéma donnait aussi La Dame aux camélias. Il arriva même que les deux affiches se touchaient. Pourtant, le soir, les deux salles étaient pleines : mais dans l’une on payait quinze ou vingt sous et dans l’autre quinze ou vingt francs »
Le mythe de la courtisane vertueuse
Dumas fils, avec le personnage de Marguerite, transforme complètement Marie. Il donne naissance à une courtisane idéale, celle qui est rêvée par les hommes et la société du XIXe s, une courtisane devenue morale et repentie. Sa mort précoce et douloureuse rachète sa vie et Marguerite incarne ainsi la courtisane purifiée, vertueuse, au grand cœur. L’histoire est ensuite adaptée à la scène et jouée au théâtre du Vaudeville le 2 février 1852 avant d’inspirer Verdi et la naissance du personnage de Violetta dans la Traviata créée le 6 mars 1853 à la Fenice de Venise. Progressivement le mythe éclipse la réalité et Marie devient ce personnage martyr qui se sacrifie par amour. On en retrouvera de sublimes incarnations au théâtre et au cinéma avec Sarah Bernhardt dont le jeu inspirera plus tard Maria Callas dans une mise en scène de la Traviata signée par Visconti à la Scala de Milan en 1955.
AUTHIER Catherine, Femmes d’exception, femmes d’influence : une histoire des courtisanes au XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 2015.
BOUDET Micheline, La fleur du mal : la véritable histoire de la Dame aux camélias, Paris, Albin Michel, 1993.
DUMAS Alexandre fils, La Dame aux camélias : pièce en cinq actes, mêlée de chant, Paris, D. Giraud et J. Dagneau, 1852.
Catherine AUTHIER, « La Dame aux camélias », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 23/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/dame-camelias
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