Vue du Bassin d'Apollon dans les jardins de Versailles
Vue du Grand Trianon du côté de l'avenue
Vue générale du château et des pavillons de Marly
Vue du Bassin d'Apollon dans les jardins de Versailles
Auteur : MARTIN Pierre-Denis, dit le Jeune
Lieu de conservation : musée national du château de Versailles (Versailles)
site web
H. : 234 cm
L. : 188 cm
Huile sur toile
Domaine : Peintures
© GrandPalaisRmn (Château de Versailles) / image GrandPalaisRmn
MV 757 - 91-000396
Les Demeures royales
Date de publication : Juin 2014
Auteur : Stéphane BLOND
Versailles à la charnière de deux règnes
Cette série de tableaux de Pierre-Denis Martin (1663-1742) s’insère à une période charnière de l’histoire du château de Versailles. Le premier tableau est réalisé en 1713, à la fin du règne de Louis XIV, alors âgé de 75 ans. Deux ans plus tard, à la mort du souverain, le régent Philippe d’Orléans transfère la cour à Paris, afin de rompre avec l’étiquette versaillaise. En juin 1722, la cour fait son grand retour à Versailles. Les deux autres tableaux sont réalisés en 1723 et 1724, à cette époque de renouveau pour le domaine.
Élève d’Adam-François Van der Meulen, grand peintre des exploits militaires du Roi-Soleil, Pierre-Denis Martin, dit Martin le Jeune, excelle dans la représentation des résidences royales. Peintre ordinaire et pensionnaire des rois Louis XIV et Louis XV, il réalise différents tableaux consacrés au palais de Versailles et au château de Marly.
Ces peintures s’inscrivent dans le prolongement d’une première commande réalisée par Louis XIV. En 1688, il envisage un cycle de tableaux dédiés aux jardins de Versailles, afin d’agrémenter les galeries de Trianon. En 1713, le roi ordonne cette fois la réalisation d’un tableau du bassin d’Apollon, pour le salon des sources, dans les appartements de Trianon du roi. Les deux autres tableaux sont commandés par Marie-Anne de Bourbon-Conti, fille légitimée de Louis XIV. Au même titre que la vue du Palais, ces peintures sont d’abord installées dans la salle à manger du château de Choisy-le-Roi, avant d’intégrer la collection du château de Versailles au début du XIXe siècle.
Les divertissements versaillais
Le peintre joue sur les effets de champ et les vues en contre-plongée qui accentuent la perspective et permettent d’embrasser un large territoire. Ces tableaux mettent en scène trois lieux de plaisirs : la perspective centrale du Parc, le Grand Trianon et le château de Marly. Ils constituent une source irremplaçable dans l’histoire de Versailles, une forme d’instantané de la vie du château. Chaque tableau comprend une foule de personnages et représente des espaces très animés.
Dans le premier tableau, le peintre imagine un axe est-ouest en contrebas de l’allée royale qui mène au palais. Ce dernier est composé de trois plans principaux. Le roi et sa suite prennent la pose. Différents personnages porteurs de l’ordre de Saint-Esprit tournent leur regard vers le spectateur. Les gardes françaises, en manteau bleu et pantalon rouge, assurent la protection du souverain qui, du fait de son âge avancé, circule dans un siège roulant. Seul personnage couvert, il porte la grande plaque de l’ordre du Saint-Esprit et occupe une position dominante. Au second plan, le bassin d’Apollon est animé par de puissants jets qui masquent la statue du dieu grec placée au centre. Le dernier plan s’ouvre sur une perspective infinie, avec le Grand Canal sillonné par des barques et des gondoles.
Avec son format resserré proche d’un carré, le tableau consacré au Grand Trianon comprend deux plans qui correspondent à la voie d’accès, plus la cour et le château. Monté sur un cheval blanc, le régent Philippe d’Orléans donne ses directives, alors que le cortège manœuvre dans la cour pour récupérer le petit souverain qui attend sur le perron, au centre du péristyle.
Le tableau du château de Marly est réalisé dans le même format que le précédent, probablement pour constituer un ensemble décoratif cohérent. Le carrosse du jeune roi est précédé d’une longue escorte, avec des cavaliers qui rafraîchissent leur monture à un abreuvoir. Au second plan, les pièces d’eau sont encadrées de part et d’autre par des pavillons. Au fond, le pavillon central se situe au cœur d’un théâtre de verdure qui dessine un large amphithéâtre.
La nature domestiquée
Les deux premiers tableaux de Pierre-Denis Martin décrivent l’état du domaine après plusieurs décennies d’aménagements au cours desquelles le roi cherche à faire du parc de Versailles un outil supplémentaire dans la quête du pouvoir absolu. Cette description fidèle concerne les jardins dessinés par Le Nôtre et les différents travaux menés par les architectes du roi. Ceux-ci transforment l’ancien terrain de chasse en un vaste parterre verdoyant qui démontre que le souverain maîtrise aussi la nature. L’alliance du végétal et de l’eau forme un parc à la française façonné à l’image du roi.
Sur le premier tableau, Louis XIV participe au rite de la promenade. Il parcourt ses jardins adorés, dont il conçoit lui-même un itinéraire de visite intitulé Manière de montrer les jardins de Versailles. Le bassin d’Apollon participe au mythe du Roi-Soleil dont l’action se rattache à des dieux de la mythologie grecque. Le souverain décrit le site en ces termes : « On descendra à l’Apollon, où l’on fera une pause pour considérer les figures, les vases de l’allée royale, Latone et le château ; on verra aussi le canal. »
À quelques encablures du palais, le Grand Trianon, ou Trianon de marbre, est édifié par Jules Hardouin-Mansart à partir de 1687. L’objectif est de créer un cadre plus intimiste pour le roi, loin de la stricte étiquette du palais. Le tableau de Martin le Jeune souligne le grand raffinement des lieux en représentant l’art de la découpe et de l'assemblage de pierres en calcaire blanc, des placages en marbre rose et un péristyle reliant deux corps de bâtiments. Dans la lignée de son retour à Versailles, le jeune Louis XV réinvestit les lieux.
La représentation du château de Marly décrit un dernier endroit important dans la vie quotidienne du souverain, à huit kilomètres au nord de Versailles. Édifié par Jules Hardouin-Mansart dès 1679, le château est installé dans un parc dont on a du mal à imaginer la longueur tant la perspective est profonde. Le pavillon central correspond au lieu de réception privilégié pour les proches du roi, avec à nouveau un décor très délicat. Les douze pavillons attribués aux invités font référence aux astres qui gravitent autour du Soleil. Tout autour, la nature participe à nouveau au faste royal. En outre, le tableau de Martin comble un grand vide historique, car différents réaménagements interviennent au XVIIIe siècle, avant la destruction totale du château au début du XIXe siècle.
Joël CORNETTE (dir.), Versailles, le pouvoir de la pierre, Paris, Tallandier, 2006.
Laurent LEMARCHAND, La Monarchie absolue entre deux capitales (1715-1723), Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2014.
LOUIS XIV, Manière de montrer les jardins de Versailles, Paris, R.M.N., 2001.
Vincent MAROTEAUX, Versailles, le roi et son domaine, Paris, Picard, 2000.
Gérard SABATIER, Versailles ou la Figure du roi, Paris, Albin Michel, 1999.
Stéphane BLOND, « Les Demeures royales », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 25/11/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/demeures-royales
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