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Clémence de Napoléon envers Madame de Hatzfeld.

Clémence de Napoléon envers Madame de Hatzfeld.

Napoléon Ier reçoit la reine de Prusse à Tilsitt, 6 juillet 1807

Napoléon Ier reçoit la reine de Prusse à Tilsitt, 6 juillet 1807

Clémence de Napoléon envers Madame de Hatzfeld.

Clémence de Napoléon envers Madame de Hatzfeld.

Date représentée : 1806

H. : 81

L. : 65

peinture à l'huile sur toile

Domaine : Peintures

© Photo RMN - Grand Palais - D. Arnaudet

http://www.photo.rmn.fr

93DE3190/MM.92.5.1

Galanterie de Napoléon

Date de publication : Mars 2016

Auteur : Jérémie BENOÎT

Lors de certaines entrevues avec des souverains ou de grands personnages, Napoléon eut l’occasion, lorsqu’il s’agissait de femmes, de manifester à la fois sa galanterie, sa magnanimité et sa grandeur d’âme. Ce fut le cas en Prusse lors de deux entrevues célèbres qui suivirent l’effondrement du royaume en 1806-1807, entrevues qui fournirent aux artistes l’occasion de décliner un nouvel aspect de la personnalité de l’Empereur.

Clémence de Napoléon envers Madame de Hatzfeld de Marguerite Gérard

Le livret du Salon de 1808 explique ainsi ce sujet de Marguerite Gérard, belle-sœur de Fragonard, l’une des nombreuses femmes artistes du temps (Mmes Vigée-Lebrun, Labille-Guiard, Vallayer-Coster, Benoist, etc.) : en 1806, « Le prince de Hatzfeld était chargé par S.M. l’Empereur du gouvernement civil de Berlin. Des lettres interceptées aux avant-postes firent connaître qu’il instruisait le prince de Hohenlohe des mouvements des Français ; en conséquence il fut arrêté. Sa femme vint se jeter aux pieds de S.M., en protestant de l’innocence de son mari […]. Vous connaissez l’écriture de votre mari, lui dit l’Empereur, je vais vous faire juge […]. Cette femme grosse de plus de huit mois s’évanouissait […]. L’Empereur fut touché de son état. Eh bien, lui dit-il, vous tenez cette lettre, jetez-la au feu. »

C’est donc un nouveau face-à-face qui est peint ici, Napoléon étant représenté au moment où il donne l’ordre de brûler la lettre. Mais si son attitude est autoritaire, la dureté du sujet est tempérée par l’évanouissement de la princesse de Hatzfeld, qui s’oppose à la rigidité impériale. Marguerite Gérard reprend un type de représentation traditionnelle à l’époque néoclassique, qui réserve les lignes droites et dures aux hommes, et les courbes souples aux femmes (cf. Le Serment des Horaces de David, 1785, musée du Louvre).

Le sujet avait été plusieurs fois représenté au Salon de 1808, par L. Lafitte (n° 338), par M. Vafflard (n° 587), mais c’est le tableau de Marguerite Gérard qui eut la préférence de la critique. Ce n’était pas la première fois que l’on représentait des scènes de magnanimité de Bonaparte ou de Napoléon, mais ce thème fut le mieux développé en peinture.

Napoléon reçoit la reine de Prusse à Tilsit de Jean-Charles Tardieu

Après l’écrasement de son armée à Iéna et l’entrée de Napoléon à Berlin à la fin de 1806, la Prusse, dont l’allié russe avait été défait à Eylau le 8 février 1807 et à Friedland le 14 juin, ne se trouvait plus en état de résister, sinon localement (Kolberg). La famille royale s’était réfugiée à Tilsit (actuelle Sovietsk), en Prusse-Orientale, et pour tenter d’éviter le pire, la reine Louise, célèbre pour son patriotisme et sa beauté, sollicita une entrevue avec l’Empereur. Recherchant la clémence de Napoléon, celle qu’il avait surnommé « le seul homme de la Prusse » s’approche en suppliante, sachant que l’idée de l’Empereur est de dépecer son royaume. Demeuré insensible à son charme, sachant qu’elle était avant tout l’âme du parti de la guerre à outrance contre la France, Napoléon offrit certes une rose à la reine, mais ne céda rien, surtout pas la place de Magdebourg qu’il convoitait. Elle devait mourir de chagrin en 1810 et devenir un véritable mythe pour les nationalistes prussiens lors de la revanche de 1813.

C’est donc ce nouveau face-à-face qu’a représenté Tardieu dans ce tableau maladroit, presque naïf, dérive du style modelé très souple de Regnault dont il fut l’élève. Le sentiment de résignation qui se lit sur le visage des Prussiens s’oppose à la froideur des Français. Napoléon est suivi des habituels Bessières, Berthier et Murat (qui, dans une pose maniérée et figée, descend l’escalier), et surtout du tsar Alexandre, qui par sa position semble avoir définitivement abandonné la Prusse. A l’inverse de bien des tableaux, mais cela se justifie par le fait qu’il a affaire à une femme, c’est Napoléon qui s’avance vers la reine Louise.

Certes, ces tableaux montrent des scènes de galanterie napoléonienne, mais l’Empereur demeure fidèle à lui-même. Il reste froid, autoritaire, et sa magnanimité est toute relative. Autant la princesse de Hatzfeld apparaît comme une faible femme, autant la reine Louise traite d’égal à égal avec l’Empereur. La rigidité des figures du tableau de Tardieu est là aussi pour souligner la tension et les enjeux de l’entrevue. Toutefois, ces œuvres n’ont d’autre signification que de rappeler certains hauts faits de Napoléon. Ils se classent tout naturellement dans l’imagerie propagandiste napoléonienne.

Claire CONSTANS Musée national du château de Versailles. Les Peintures , 2 vol.Paris, RMN, 1995.Roger DUFRAISSE, Michel KERAUTRET La France napoléonienne. Aspects extérieurs Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », 1999.Annie JOURDAN Napoléon, héros, imperator, mécène Paris, Aubier, 1998.Jean TULARD (dir.) Dictionnaire Napoléon Paris, Fayard, 1987.Jean TULARD (dir.) L’Histoire de Napoléon par la peinture Paris, Belfond, 1991.Collectif De David à Delacroix , catalogue de l’exposition au Grand-PalaisParis, RMN, 1974-1975.Collectif Dominique Vivant Denon. L’œil de Napoléon , catalogue de l’exposition au LouvreParis, RMN, 1999.Claire CONSTANS Musée national du château de Versailles. Les Peintures , 2 vol.Paris, RMN, 1995. 

Jérémie BENOÎT, « Galanterie de Napoléon », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 12/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/galanterie-napoleon

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