
La France irait à la misère si elle laissait entrer le bolchevisme...

Tous les pays d'Europe ont vaincu le communisme. La France reste seule menacée.

La France irait à la misère si elle laissait entrer le bolchevisme...
Auteur : ANONYME
Date de création : 1920
Date représentée : 1920
H. : 0
L. : 0
© Collections La Contemporaine
La menace communiste dans la France de l'entre-deux-guerres
Date de publication : Janvier 2006
Auteur : Alexandre SUMPF
Cependant, le nombre des adhérents de la S.F.I.C. décroît à partir de 1921. Les dirigeants soviétiques imposent en effet, par le biais du Komintern (le nom russe de l’I.C.), la tactique « classe contre classe », accusant les socialistes d’être des « sociaux-traîtres » et de représenter l’ennemi de la classe ouvrière. L’année 1934 constitue toutefois un tournant. Hitler s’étant emparé du pouvoir en Allemagne, Staline, un temps hésitant, accepte d’abandonner le combat contre les partis bourgeois pour lutter contre le fascisme. En France, la montée en puissance des ligues d’extrême droite, dont la crise du 6 février 1934 est la manifestation la plus visible, justifie plus encore l’adoption de la « politique de la main tendue » par Maurice Thorez, le dirigeant de la S.F.I.C. Socialistes et communistes signent alors des accords électoraux qui leur permettent de remporter largement les élections législatives de 1936 et de former un gouvernement de « Front populaire ».
Contrairement à l’image dénonçant la mise à feu et à sang de la France par le bolchevisme, l’affiche qui compare le communisme à une pieuvre situe l’essentiel de son message sur ses bords. Le terme « communisme » est dévalorisé par la typographie, écrasé entre « tous les pays d’Europe » et la « France », donnée comme l’enjeu principal de la lutte internationale contre les Rouges. La carte qui sert de fond au décor met parfaitement en évidence la progression de l’invasion : parti de l’est, à droite, le communisme fond sur ses victimes potentielles à l’ouest, à gauche. L’œil est d’abord captivé par la tête gigantesque de la pieuvre, dont il suit chacun des tentacules lancés à travers l’Europe. Le communisme est clairement dénoncé par l’emploi de la couleur rouge. Toutefois, la représentation de l’étoile à cinq branches de l’Armée rouge, la faucille et le marteau, nettement distinguables, visent directement l’U.R.S.S., antre de « l’hydre » communiste. L’image de la pieuvre, l’un des symboles du capital dans les affiches communistes, notamment soviétiques, est ainsi retournée contre le Komintern. Par contraste, la plupart des adversaires supposés de l’Union soviétique ne se distinguent les uns des autres que par la mention neutre de leur nom. Le fond blanc et bleu ciel fait ressortir le rouge, dont l’emploi est lui aussi détourné au cœur même de l’affiche : les gouttes de sang qui jaillissent des tentacules déjà tranchés symbolisent la défaite des communistes. Dans la péninsule Ibérique, un personnage dans lequel on reconnaît sans peine un phalangiste antirépublicain achève de sectionner le tentacule qui s’était aventuré jusque-là. Rien ne saurait mieux illustrer le sort de l’éphémère République espagnole. Enfin, la France se détache franchement des autres nations. Elle est symbolisée par le drapeau tricolore, celui de la Nation et de la République, que le communisme soviétique tente d’arracher de son sol.
L’affiche datant de 1936 ou 1937 illustre bien l’évolution majeure de ce type de média dans l’entre-deux-guerres. Commanditée par le Comité de propagande des Républicains nationaux d’Henri de Kérillis, elle est réalisée par un dessinateur qui se cache sous le pseudonyme « Yo. Mich ». Il est l’auteur de plusieurs affiches pour le compte du Comité – dont une variante de celle-ci, simplifiée, où l’Europe, teinte en vert, est assimilée à une forêt qui s’embrase à partir de l’Est. Ici, le message s’est fait slogan, le dessin est moins complexe, plus symbolique. Indéniablement, le public français est désormais tout à fait apte à saisir les codes et les références qui lui sont proposés. La carte représentée contraste par exemple fortement avec les cartes habituellement accrochées aux murs des salles de classe ou reproduites dans les journaux à grand tirage. Dépourvue des lignes de frontière qui constituent pourtant un enjeu majeur de la politique internationale de l’époque, elle oppose visuellement l’Europe « éternelle » aux invasions barbares venues de l’Est. L’antibolchevisme initial laisse ici la place à l’anticommunisme et même à l’antisoviétisme. La carte rappelle de manière symbolique l’histoire récente de l’Europe, à commencer, en Allemagne, par l’écrasement de la révolution spartakiste de janvier 1919, puis l’interdiction du parti communiste K.P.D. par Hitler en 1933. En Turquie, la guerre nationaliste d’Atatürk repousse les Russes rouges au-delà de la frontière nord du pays. En Italie, dès 1920-1922, triomphe le mouvement fasciste de Mussolini, ancien socialiste devenu le pire ennemi des communistes de son pays. En Grande-Bretagne, la répression des manifestations ouvrières est implacable, le parti communiste peine à sortir de l’ombre, la rupture diplomatique avec Moscou est consommée en 1927. Seules l’Espagne et la France, toutes deux dirigées par un gouvernement de Front populaire, troublent ce rejet en apparence unanime de la révolution. Dans ces pays, le lancement de campagnes de propagande de masse par le moyen de la presse et de l’affiche est donc indispensable.
Maurice AGULHON, La République, Paris, Hachette, coll. « Pluriel », 2 tomes, nouvelle édition augmentée, 1990.Jean-Jacques BECKER et Serge BERSTEIN, Histoire de l’anticommunisme en France, tome I « 1917-1940 », Paris, Orban, 1987.Philippe BUTON et Laurent GERVEREAU, Le Couteau entre les dents : soixante-dix ans d’affiches communistes et anticommunistes (1917-1987), Paris, Chêne, 1989.Pascal ORY (dir.), Nouvelle histoire des idées politiques en France, Paris, Hachette, coll. « Pluriel », édition revue et augmentée, 1987.René REMOND, Les Droites en France, Paris, Aubier-Montaigne, 1982.Jean-François SIRINELLI (dir.), Les Droites françaises. De la Révolution à nos jours, Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire », 1992.Michel WINOCK, Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, Paris, Le Seuil, coll. « Points », 1990.
Alexandre SUMPF, « La menace communiste dans la France de l'entre-deux-guerres », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 09/02/2023. URL : histoire-image.org/etudes/menace-communiste-france-entre-deux-guerres
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Paula Gouablin
est-ce que l'affiche a eut un impact , était faite à grande échelle ?
merci
Histoire-image
Concernant la diffusion des affiches, il s'agit d'affiches en couleur donc coûteuses pour l'époque, surcout pour la première. Émanant de groupes politiques de droite nationale, il est peut vraisemblable qu'elles étaient été diffusées largement et surtout pas dans les quartiers populaires où résidait un peuple de gauche alors très actif. En outre leur diffusion a sans doute été limitée à la région parisienne où les groupes politiques les produisant étaient surtout actifs.
Il est difficile d'évaluer l'impact de ces affiches mais on peut penser qu'elles avaient surtout pour vocation de renforcer l'anticommunisme d'une partie de la population et de légitimer l'opposition radicale, violente contre un communisme présenté comme une menace de l'étranger.
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