L'Évasion de Rochefort
Auteur : MANET Edouard
Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web
Date de création : Vers 1881
Date représentée : 19 mars 1874
H. : 79 cm
L. : 72 cm
Huile sur toile.
C'est la plus petite des deux versions de "L'Évasion de Rochefort", la seconde est conservée au Kunsthaus de Zurich.
Domaine : Peintures
© RMN - Grand Palais (musée d'Orsay) / Franck Raux
RF 1984-158 - 21-535875
Henri de Rochefort et les déportés de la Commune
Date de publication : Mars 2016
Auteur : Bertrand TILLIER
La déportation en Nouvelle-Calédonie
Plus de 4 000 communards furent condamnés par les conseils de guerre à la déportation en Nouvelle-Calédonie – la colonie française la plus éloignée de la métropole, située en plein Pacifique. Dans l’attente de leur transportation, les condamnés furent incarcérés dans des pontons portuaires ou des forts du littoral atlantique. De là, ils embarquèrent sur des navires pour un voyage de cinq à six mois. Le premier convoi partit sur la Danaé le 3 mai 1872.
Les déportés furent répartis en trois catégories dans l’archipel calédonien : les forçats au bagne de l’île Nou, les condamnés à la déportation en enceinte fortifiée sur la presqu’île Ducos et les déportés simples sur l’île des Pins. Les conditions d’existence y étaient précaires. Dans l’attente d’une amnistie qui tarda jusqu’en 1880, les déportés se mirent au travail. D’autres préférèrent tenter l’évasion, rendue improbable par la surveillance des gardiens aidés des Kanak et par la nature récifale des îles.
L’évasion de Rochefort
Henri Rochefort (1830-1913) avait été condamné à la déportation en enceinte fortifiée. Arrivé en Nouvelle-Calédonie en décembre 1873, il parvint à s’en évader en juillet 1874. Riche et célèbre, il acheta la complicité du commandant d’un navire australien qui arrangea la fuite du journaliste et de cinq de ses camarades : Ballière, Paschal Grousset, Francis Jourde, Olivier Pain et Granthille.
C’est à cette évasion – la plus importante de l’histoire de la déportation, dont le retentissement international exaspéra l’administration française – qu’Édouard Manet (1832-1883) s’intéressa en 1880-1881. Dans un format réduit, le peintre représenta au milieu d’une mer immense une frêle embarcation, où l’on peut identifier Rochefort et Pain, et qui se dirige vers la silhouette noire d’un navire visible à l’horizon.
Un héros moderne
Quand Manet entreprit cette œuvre, il était à la recherche d’un tableau « à sensation » destiné au Salon. Il pensa à un héros moderne parce que solitaire, rebelle et incompris. Au moment où l’amnistie générale de la Commune fut votée, qui permit le retour en métropole des déportés et des proscrits – parmi lesquels Rochefort, réfugié en Angleterre, en Suisse et en Belgique –, Manet peignit deux versions de son évasion romanesque où ses traits sont identifiables, ainsi qu’un portrait de l’infatigable pamphlétaire (Hambourg, Kunsthalle).
Animateur de journaux tels La Lanterne, La Marseillaise, Le Mot d’ordre ou L’Intransigeant, titulaire de mandats électifs desquels il démissionna souvent rapidement, Rochefort incarnait pour Manet l’opposant politique, permanent et irréductible : républicain sous le Second Empire, antiversaillais pendant la Commune sans pour autant s’être engagé dans ses rangs, extrémiste en République modérée… C’est le portrait de ce personnage insaisissable et inattendu que Manet tenta de fixer en 1880 sur la toile, bien avant que l’homme ne dérive vers le boulangisme, le nationalisme, l’antisémitisme et l’antidreyfusisme.
Éric DARRAGON, « Manet, L’Évasion », in Revue de l’Art, no 56, 1982, p. 25-40.
Bernard NOËL, Dictionnaire de la Commune, 2 vol., Paris, Flammarion, coll. « Champs », 1978.
COLLECTIF, Catalogue d’exposition Manet (notice no 223), Paris, RMN, Grand Palais, 1983.
Bertrand TILLIER, « Henri de Rochefort et les déportés de la Commune », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 14/12/2024. URL : https://histoire-image.org/etudes/henri-rochefort-deportes-commune
Lien à été copié
Découvrez nos études
Le Marquis de Montcalm, héros de la guerre de Sept Ans
Louis-Joseph de Montcalm de Saint-Véran est né le 28 février 1712 au château de Candiac, à proximité de Nîmes. Issu d’une famille de la vieille…
L'abolition aux Antilles
A Saint-Domingue l’esclavage est caractérisé par l’arrivée constante de nouveaux esclaves du fait de l’ampleur de la traite. On évalue entre 500…
École de jeunes filles en Algérie
Après la prise d’Alger par les Français le 5 juillet 1830, la monarchie de Juillet, un temps hésitante,…
Kan Gao, Chinois de Cayenne
L'Émancipation à la Réunion
La première moitié du XIXe siècle voit l’émergence d’une classe dominante de colons dont la richesse…
Les tirailleurs sénégalais dans la guerre de 1914-1918
Cette peinture de Félix Vallotton est datée de juin 1917, quelques semaines à peine après les offensives d’avril-mai sur le front de l’Aisne et de…
L’expédition de Madagascar, 1895
L’intérêt français pour Madagascar se précise depuis les années 1860. L’enjeu est d’abord…
Les Croisières de Citroën : publicité et colonialisme dans l'entre-deux-guerres
La Croisière noire, relevant à la fois de l’aventure coloniale, du raid automobile et de l’opération publicitaire, est née de la volonté d’un…
Henri de Rochefort et les déportés de la Commune
Plus de 4 000 communards furent condamnés par les conseils de guerre à la déportation en Nouvelle-Calédonie…
Pigments de Léon Gontran Damas
L’école coloniale française promeut une petite partie de la jeunesse colonisée afin de l’assimiler et d’en faire la future élite destinée à…
Ajouter un commentaire
Mentions d’information prioritaires RGPD
Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel